mardi 26 novembre 2024 02:48

Les migrants creusent le fossé entre l’Italie et l’Europe

Depuis vendredi 29 avril, près d’une centaine de personnes se seraient noyées dans la Méditerranée en tentant de gagner clandestinement l’Italie.

La crainte d’une arrivée massive de migrants venus d’Italie conduit l’Autriche à vouloir fermer sa frontière.

Un canot pneumatique en mauvais état. Une centaine de migrants à bord. Le canot, après avoir quitté la côte libyenne, se dégonfle peu à peu. Il prend l’eau. C’est le drame, vendredi 29 avril, en pleine Méditerranée. Une poignée de migrants d’Afrique de l’Ouest tombent à la mer. Et disparaissent. L’embarcation est de plus en plus instable, de plus en plus dangereuse. Les passagers basculent dans les flots, les uns après les autres. Les survivants réussissent à joindre au téléphone des gardes-côtes italiens.

Alertés, ils demandent à un navire de commerce de porter secours aux naufragés. Lorsque le cargo trouve le canot, vendredi soir, il n’y a plus que 26 personnes à son bord. Sauvés de la noyade, ils sont remis aux gardes-côtes italiens qui les transportent sur l’île de Lampedusa, entre la Libye et la Sicile.

Chaque semaine, des centaines de personnes, dont de plus en plus de femmes et d’enfants, montent à bord de ces embarcations pour rejoindre l’Europe. Ils parient sur la réactivité des secours en Méditerranée pour les sauver en cas de naufrage. Ce fut encore le cas dans la nuit du 30 avril au 1er mai. À la suite d’un appel à l’aide lancé par téléphone satellite, le Datillo, l’un des navires des gardes-côtes italiens, a pu secourir 249 migrants qui s’entassaient dans un bateau de pêche, à environ 200 milles à l’est de la Sicile.

Pour la seule journée du vendredi 29 avril, les gardes-côtes italiens ont secouru 500 personnes, portant à plus de 2 000 le nombre de migrants sauvés en une dizaine de jours.

Depuis le début de l’année, 27 267 migrants sont arrivés par la mer en Italie, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Ils quittent la Libye dans des canots identiques à celui qui a coulé, ce vendredi 29 avril. La plupart d’entre eux sont originaires du Nigeria, de Gambie et du Sénégal.

Avec la fermeture de la route des Balkans, la route italienne risque d’attirer de plus en plus de monde. C’est en prévision de ce scénario que l’Autriche a annoncé vouloir fermer sa frontière avec l’Italie au col du Brenner.

Dès la fin du mois de mai, elle envisage de rétablir les contrôles sur les routes et l’axe ferroviaire reliant les deux pays. Et d’élever un mur de 4 mètres de haut afin d’empêcher tout passage clandestin.

Cette annonce de l’Autriche a scandalisé toute l’Italie comme en témoignaient les « unes » des journaux, jeudi 28 avril. « Brenner, la gifle de Vienne », titrait La Stampa alors qu’on pouvait lire en une d’Il Giornale : « L’Autriche envoie l’Italie en Afrique »…

« Nous assistons à l’éclatement de l’Europe »

À l’occasion de la crise migratoire, la profonde défiance des Italiens vis-à-vis de l’Union européenne ne cesse de s’intensifier. Et ce n’est pas la déclaration du ministre allemand de l’intérieur, Thomas de Maizière, qui a calmé les esprits à Rome. « Nous partageons le point de vue de l’Autriche, selon lequel à la frontière nord de l’Italie il ne doit pas se créer une situation comme sur la route des Balkans à l’automne dernier », a-t-il dit à l’occasion d’une conférence de presse commune, vendredi 29 avril, avec son homologue autrichien, Wolfgang Sobotka.

« Nous assistons à l’éclatement de l’Europe. L’Autriche construit un mur pour que les migrants restent en Italie pour des raisons de politique intérieure », s’est indigné l’ancien président du Conseil, Romano Prodi, avant d’ajouter « mais nous ne pouvons pas repousser les migrants en mer ».

01/05/2016, Laurent Larcher

Source : La Croix

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