mardi 26 novembre 2024 12:43

Libye : les réfugiés étrangers attendent leur rapatriement

Le poste-frontière tunisien de Ras Jédir s'est organisé pour faire face à l'exode massif de travailleurs étrangers fuyant la Libye. Des milliers d'entre eux se massaient encore mercredi du côté libyen de la frontière, en attendant de pouvoir passer en Tunisie. Les policiers et les militaires tunisiens appellent par haut-parleur la foule à s'organiser par nationalités. Puis, par petits groupes d'une dizaine, les gens sont admis sous les hangars de la douane, où se forment de longues files d'attente. La pagaille des jours précédents a fait place à une meilleure organisation. Les fonctionnaires tunisiens visent les papiers, fouillent les maigres bagages qu'emportent ces travailleurs souvent peu qualifiés, quelques vêtements, des couvertures synthétiques, confisquent ceux de leurs outils, truelles ou clefs à molettes, qui pourraient servir d'armes, et les dirigent vers les parkings. Égyptiens, Ghanéens, Bengalis, Chinois, Vietnamiens, toute la main-d'œuvre étrangère employée en Libye défile à ce poste-frontière.

Les ressortissants des pays riches ont été évacués directement depuis Tripoli par des avions ou des bateaux affrétés par leurs gouvernements. Ceux qui se massent à Ras Jédir sont originaires de pays trop pauvres, ou dont les gouvernements ne se préoccupent guère de leur sort. Devant la frontière, les Bengalis ont dressé une émouvante pancarte en carton : «Nous voulons sauver. Nous voulons rentrer Bangladesh. S'il vous plaît, aidez-nous.» Assis en rangs, une centaine de Ghanéens écoutent les instructions du consul du Ghana : «Notre gouvernement envoie un avion pour vous rapatrier. Donnez vos noms et un numéro de téléphone au pays. Nous comptons sur votre comportement, vous devez donner l'exemple !» «Merci, que Dieu vous bénisse !», lui répondent les Ghanéens.

85 000 personnes en transit

À un moment arrivent du côté libyen de la frontière des pick-up toutes sirènes hurlantes. Des bennes, des jeunes gens jettent des packs d'eau minérale dans la foule, manquant assommer leurs destinataires. «Vive Kadhafi ! Ne partez pas ! N'écoutez pas les mensonges des médias !», crie un homme aux gens rassemblés. Peu convaincue par cette habile opération de communication, la foule retourne vite aux barrières tunisiennes.

Une fois entrés en Tunisie, les migrants sont dirigés vers la sortie de la zone frontière. En attendant d'être embarqués dans des bus réquisitionnés dans tout le Sud tunisien, les ressortissants étrangers s'installent comme ils le peuvent, tendent leurs couvertures sur les grilles pour se protéger du soleil, font la queue devant les tentes où des organisations d'aide distribuent de la nourriture. Il y a beaucoup de Tunisiens, venus pour faire des affaires - vendant à même le sol des téléphones portables ou des cigarettes -, pour donner un coup de main ou en simples curieux.

«Une crise humanitaire ? Non, c'est plutôt un exode massif que nous devons gérer», dit le lieutenant-colonel Malek Mihoub, un officier de la Protection civile tunisienne. «Une fois que les douanes ont rempli les formalités d'entrée, on dirige les gens vers le camp de transit de La Chucha, installé par l'armée à 6 km d'ici. Et de là, vers l'aéroport de Djerba et le port de Jarjis, en fonction de l'arrivée des avions et des bateaux. La situation sanitaire est sous contrôle, nous avons simplement besoin que les gouvernements étrangers viennent les chercher.»

D'après l'officier, près de 85 000 personnes sont passées depuis le début de la révolte libyenne, dont 35 000 Égyptiens, et 20 000 Asiatiques. «Il n'y a pas de crise pour le moment, nous arrivons à faire face, assure aussi le lieutenant-colonel Khaled Baltagi, un médecin militaire tunisien. Nous gérons un camp de transit, pas de réfugiés. C'est différent.»

3/3/2011, Adrien Jaulmes

Source : Le Figaro

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