dimanche 24 novembre 2024 21:33

Ma Smiytich 3azzi! (Je ne m'appelle pas 3azzi !)

est le slogan de la campagne qui a été lancée le vendredi 21 mars 2014 par le collectif « Papiers pour tous » et qui vise à lutter contre le racisme au Maroc. 

Cette date qui a été instituée par l’ONU, commémore le massacre de plusieurs manifestants anti-apartheid par des policiers  dans l’Afrique du Sud des années 60. 

Voilà pour le cadrage, maintenant voyons les choses plus profondément. 

D’après mes modestes connaissances, le racisme c’est quand une personne de race blanche se sent automatiquement supérieure. 

Le racisme c’est quand une personne est toujours victime d’intimidation en raison de la couleur de sa peau, de sa religion ou simplement parce qu’elle  est étrangère. 

Le racisme c’est lorsque blanc veut dire beau, le racisme c’est quand une personne déteste le look et la texture de vos cheveux. Je suis raciste quand je refuse de m’assoir à côté d’un étranger, je suis raciste quand je refuse de lui adresser la parole. 

Je suis raciste quand je refuse de lui serrer la main, je suis raciste quand je refuse de marcher avec lui dans la rue, je suis raciste quand je refuse de travailler avec lui, je suis raciste quand je me détourne pour ne pas le regarder, Bref, le racisme c’est le mépris de l’autre à cause de sa race, sa couleur, son sexe, sa religion ou sa langue... le racisme c’est aussi l’esclavage qui en a résulté. 

Depuis les Grecs, en passant par les romains qui instituèrent les marchés aux esclaves, et depuis l’Egypte ancienne qui les a utilisés pour bâtir ses pyramides, depuis l’avènement de l’islam qui l’a toujours pratiqué (et le pratique jusqu’à aujourd’hui dans certaines contrées), et depuis la découverte du Nouveau continent, avec les Espagnols et les Portugais qui ont asservi les Indiens d’Amérique latine, avec les Etats-Unis qui ont « acheté » des Africains par milliers, avec l’Afrique du Sud qui a créé la notion d’apartheid, l’Allemagne nazie qui avait pour objectif d’exterminer tous les Sémites, et même en France qui n’a aboli l’esclavage qu’au 19ème siècle ! 

Peut-on dire que le racisme existe chez nous ? 

Non, nous sommes un peuple issu de métissages entre différentes communautés, d’origines ethniques différentes, et qui s’est construit à travers l’histoire par le brassage de plusieurs races, plusieurs cultures, plusieurs religions, plusieurs couleurs et plusieurs langues… 

Depuis l’aube des temps, les Amazighs et les Juifs ont cohabité en paix et en harmonie, les Romains ont installé leurs comptoirs de façon pacifique, Massinissa, Juba II et Taqfarinas  étaient amazighs, les Marocains d’origine subsaharienne sont Marocains depuis des siècles, les Arabes et les Andalous aussi. 

Durant des siècles, une des villes les plus connues par les Marocains et qui se trouve au sud de Marrakech était Tombouctou !, et dans les années 70, on pouvait encore voir à la sortie de Marrakech un panneau indiquant la direction de cette ville du  Mali, d'où est issue une grande partie des actuels noirs marocains.

Et aujourd’hui, tout ce beau monde fait le Maroc tel qu’il est, nous en sommes fiers et nous n’avons aucun complexe à le crier haut et fort.

Non, mesdames et messieurs du collectif  « Papiers pour tous », je ne suis pas raciste quand je dis « 3azzi » ou « Draoui » ou « Soudani » ou encore « l3azoua » ou « Louiyen » en parlant d’un noir, de la même manière que lui n’est pas raciste quand il dit « Labyad » ou « Z3ar » ou « Lbla9 » ou « Blanche neige » en parlant de moi, (soit dit en passant que « Lak7al » « 3azzi » « Draoui » « Soudani » « l3azoua » « Labyad » « Z3ar » sont aussi des noms de famille très répandus chez nous). 

Non, je ne suis pas raciste quand je dis d’un juif « Lihoudi » tout simplement parce qu’il l’est, je ne suis pas raciste quand je dis d’un Amazigh « Chle7 » parce que c’est comme ça que j’ai appris à l’appeler depuis mon très jeune âge ; non je ne suis pas raciste quand je dis d’un Arabe « A3rab » parce que ça se dit comme ça en tachelhit.

J’ai des amis de toutes les races et de toutes les couleurs, y compris parmi les nouveaux venus, ils ne m’ont jamais fait sentir qu’ils étaient victimes de racisme au Maroc. Tout au plus, ils parlent d’actes isolés, comme celui de Tanger quand les flics ont pourchassé un migrant et qu’il s’est jeté par une fenêtre, ou celui du connard qui refuse  de louer son appartement aux Subsahariens à Casablanca, et ils ont bien conscience que le peuple marocain n’est pas comme ça. 

De la même manière, et bien que nous soyons conscients qu’ils souffrent du racisme ordinaire qui s’est installé ces dernières années en Europe, nous ne pouvons pas nier le fait que certains d’entre nos RME se comportent d’une manière, le moins que l’on puisse dire, indigne, et tentent d’imposer aux citoyens du pays hôte leurs us et coutumes, leurs rituels et leurs habitudes, en ignorant royalement les règlements et les lois, sous la bannière desquels ils ont obtenu le droit de résider dans ces pays, pays dont la majorité écrasante du peuple n’est pas raciste.

Je pense que le Marocain n’est pas raciste envers les autres, il a un problème intrinsèque, et ce problème réside dans le fait qu’il ne s’accepte pas lui-même tel qu’il est, l’obèse n’accepte pas son obésité, le maigre n’accepte pas sa maigreur, le noir n’accepte pas sa couleur de peau, celui qui a des cheveux crépus veut les rendre lisses, et celui qui les a lisses veut les rendre crépus, le 3roubi n’admet pas qu’on l’appelle comme ça, le jebli et le soussi non plus, et le jour où nous aurons vaincu ce phénomène, alors seulement nous serons des gens normaux, des gens comme Louis Armstrong avec qui je partage la même couleur, celle de notre sang. 

Et à mon tour d’appeler à une campagne nationale, et de proposer un slogan : « Je m’accepte moi-même d’abord ! » « Na9bal rassi ana ba3da »

22 Mars 2014, Omar Abbadi

Source : Libération

 

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