jeudi 28 novembre 2024 17:45

Manuel Valls: «L'islam sera un enjeu électoral»

Le Premier ministre a conclu, lundi, le colloque sur l'islam à l'Assemblée nationale.

A son arrivée, Manuel Valls serre beaucoup de mains. Puis il va s’asseoir entre les deux parlementaires socialistes, la sénatrice de Paris, Bariza Kiari et le député des Hautes-Pyrénées, Jean Glavany. À leur tour, les socialistes organisent, à l’Assemblée nationale lundi après-midi, «leur» colloque sur l’islam. Cela risque de ne pas s’arrêter d’ici longtemps… Même s’il le regrette, le Premier ministre, venu conclure les travaux, le reconnaît : «L’islam sera un enjeu électoral en 2017.» Connu pour sa conception très stricte de la laïcité, Jean Glavany s’insurge quand on compare son forum à celui des Républicains de Nicolas Sarkozy qui a eu lieu le 4 juin. «Ici, ce n’est pas à huis clos. Il y a même des caméras de télévision», lâche-t-il.

Avec l’aide du philosophe Abdennour Bidar, les socialistes ont rassemblé une trentaine de personnalités. La moitié d’entre elles est de culture musulmane. Il y a là beaucoup de médecins, quelques enseignants, un policier. Et puis des personnalités, comme Patrick Kessel, l’ancien grand maître du Grand Orient de France ou l’avocat de Charlie Hebdo, Richard Malka. Devant cet aréopage, Jean Glavany dit vouloir «tirer vers le haut» l’instance de dialogue avec l’islam, mise en place, lundi dernier, au ministère de l’Intérieur. Bidar, lui, regrette que celle-ci ne «s’occupe que de l’organisation du culte» et souhaite son élargissement à la culture.

Une pierre dans le jardin du ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, absent du forum ? Le député des Hautes-Pyrénées assure qu’il a bien été invité. Mais que c’est le Premier ministre qui est venu lui-même conclure les travaux. Proche de Glavany dans sa conception de la laïcité, Manuel Valls lève une ambiguïté. «Il y a un paradoxe à ce que le gouvernement traite ce dossier et en même temps dise que c’est à l’islam de s’organiser», pointe le Premier ministre. Mais c’est un «défi à relever», souligne encore Manuel Valls, un travail indispensable, qu’il faut vivre avec cette «contradiction».

Dénonçant une «complicité» objective entre l’extrême droite et les salafistes, Manuel Valls plaide pour une meilleure connaissance de l’islam, un retour à la grande tradition française de l’islamologie. Car les Français, dit-il, doutent de la compatibilité de l’islam avec la modernité. Pour le Premier ministre, la bataille est aussi culturelle que géopolitique. «Si nous faisons la démonstration que l’islam, sous toutes ses formes, est compatible avec la démocratie, la laïcité, l’égalité hommes-femmes, nous gagnerons une bataille idéologique majeure, déclare-t-il. C’est sans doute à la France d’être moteur dans ce défi. Est-ce possible dans le monde arabo-musulman ? J’en doute. Ce sont dans les vieilles démocraties que nous pouvons en faire la démonstration.» Cela tombe bien. Dans l’assistance, beaucoup plaident pour un aggiornamento de la religion musulmane, pour un «islam des Lumières».

23 JUIN 2015,

BERNADETTE SAUVAGET

Source : liberation.fr

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