dimanche 24 novembre 2024 21:40

Pas de centres de rétention des migrants irréguliers en vue au Maroc

l n’y aura pas de centres d’accueil pour les migrants irréguliers au Maroc. Le ministère de l’Intérieur a mis ainsi fin hier aux rumeurs qui enflent depuis quelques jours et selon lesquelles un pareil centre sera prochainement édifié à Salé avant que d’autres établissements ne voient le jour à Tanger, Oujda et Nador. C’est ce qu’a révélé l’agence espagnole EFE en citant des sources de ce département sans donner plus de précision.

«L’information a été relayée il y a quelques jours par un organe de presse arabophone. Elle avait annoncé l’ouverture d’un centre pour immigrants illégaux. Entre-temps, aucun communiqué ou source officielle n’avait ni confirmé ni infirmé cette information», nous a indiqué Saïd Tbel de l’Espace associatif.  Même son de cloche de la part de Stéphane Julinet, chargé du Programme droit des étrangers et plaidoyer au Groupe antiraciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants (GADEM) qui nous a précisé que le flou n’a que trop duré. «Il y a eu un black-out de la part du ministère de l’Intérieur   concernant ce sujet d’autant que certains parlaient non pas de centres d’accueil, mais plutôt de centres de détention», nous a-t-il expliqué. 

En effet, le projet de création de centres d’accueil des migrants illégaux et des demandeurs d’asile ne semble pas avoir fait l’unanimité au sein du monde associatif œuvrant dans le domaine de la migration. Pour Saïd Tbel, la création de ces centres engendrera plus de problèmes qu’elle va en résoudre.  «L’expérience a démontré l’inefficience voire le danger de créer pareils centres comme en attestent les expériences française, espagnole et italienne dans ce domaine. Mieux, le Maroc a déjà expérimenté les limites de cette mesure avec l’échec du centre de détention pour mineurs créé en 2005 qui s’est révélé un vrai fiasco», nous a-t-il  confié. 

Notre source estime que ces centres exigent plus de contrôles notamment policiers. Ce qui crée, selon lui, des situations conflictuelles difficiles à gérer. «On est pour des centres d’accueil pour ces personnes qui endurent des  conditions d’extrême précarité socio-économique notamment en matière de santé et de sécurité. Mais ces centres devraient être gérés par des ONG et non pas par l’Etat», nous a-t-il lancé avant d’ajouter : «Il y a une pression de la part de l’UE pour la mise en place de ce genre de centres dans le cadre du «partage» de responsabilités concernant la nouvelle politique d’externalisation».  D’après lui, la réalité d’aujourd’hui n’annonce rien de bon pour les migrants irréguliers comme en témoigne l’opération d’identification des personnes via la politique de régularisation en cours et la reprise des  activités de retours volontaires avec l'OIM. 

De son côté, le  GADEM  a déclaré à EFE que l'ouverture d'un centre d’accueil d’immigrés en situation irrégulière serait «une erreur historique» au Maroc. Pour sa part, Stéphane Julinet nous a déclaré que ces centres ne s’inscrivent pas dans les mesures d’urgence et que cette question peut attendre, surtout que l’opération de régularisation de la situation des étrangers en séjour illégal au Maroc traîne encore.

Pour l’ensemble des acteurs associatifs, la création des centres d’accueil se pose aujourd’hui avec acuité notamment à quelques jours de la réunion mixte, entre Mohamed  Hassad, ministre de l’Intérieur, et son homologue espagnol, Jorge Fernando Diaz, prévue pour le 26 mars à Tanger. Une rencontre très attendue et qui intervient à un moment où l’Union européenne veut faire pression sur Rabat pour signer un accord de réadmission des immigrés clandestins en Europe. 

Des inquiétudes que certains observateurs tentent d’apaiser.  Pour eux, le Maroc a toujours refusé d’installer des centres d’accueil sur son territoire comme il a toujours  refusé d’être associé à l’idée  européenne qui veut faire du Royaume un gendarme de l’Europe. «Le Maroc a toujours été réticent et cela depuis longtemps et il a ses raisons. C’est pourquoi, il ne faut pas attendre grande-chose de la réunion maroco-espagnole», nous a confié une source sous le sceau de l’anonymat.  

 20 Mars 2014, Hassan Bentaleb

Source : Libération

 

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