vendredi 29 novembre 2024 09:27

Politique de l’immigration : une pétition ouverte dénonce les promesses non tenues de François Hollande

Une centaine de personnalités adresse une pétition ouverte à François Hollande dénonçant les reculs dans l’égalité des droits, notamment le contrôle au faciès, les régularisations des sans-papiers et le vote des étrangers…
«Il est encore temps de changer de politique pour l'égalité des droits !», rappelle le texte de la pétition lancée le 9 novembre 2012 qui rassemble à ce jour presque un millier de signatures.
Parmi les personnalités, Daniel Cohn-Bendit, Myriam Martin, Olivier Besancenot, Patrick Chamoiseau, Pierre Laurent, Philippe Lioret, Martine Billard, Lilian Thuram, Richard Moyon…
«C'est maintenant qu'il faut mettre en chantier ces mesures qui feront qu’à l’avenir, l’immigration cessera de n’être considérée que comme "un problème"», écrivent-ils.
«Dix années durant, nous avons combattu côte à côte la politique d’immigration dévastatrice de Sarkozy. Nous nous sommes retrouvés dans la rue, devant les préfectures et les centres de rétention, signataires d’innombrables pétitions, parrains et marraines d’enfants, de jeunes et de familles, proclamant notre refus d’une politique stérile et malfaisante qui dévaste des vies et nous déconsidère aux yeux des peuples du Sud. Des milliers de photos et de vidéos, chargées d’émotions, témoignent de ces combats communs.
Même si le candidat François Hollande s’est montré timoré dans ses prises de position sur l’immigration, le 6 mai laissait espérer un véritable changement sur ces questions. Des mesures en faveur des sans papiers, certes, du droit de vote des étrangers, la fin des contrôles au faciès, bien sûr. Mais aussi des gestes qui disent à tous les habitants de ce pays qu’ils sont ici chez eux, qu’ils sont légitimement de ce pays, qu’ils sont ce pays.
Au-delà de ceux qu’elle visait explicitement, les sans papiers, les Roms, les jeunes des quartiers, la politique d’exclusion de Sarkozy atteignait et blessait en réalité toutes celles et tous ceux dont le nom, le prénom, la couleur de peau ou le visage disent que leur patrimoine génétique n’est pas que berrichon, mâtiné, auvergnat et, par ricochet, tous ceux qui vivent avec eux, travaillent quotidiennement ou partagent des loisirs avec eux, les aiment et font des enfants avec eux.
Les mesures courageuses attendues du nouveau président auraient eu valeur de symbole, bien au-delà des catégories directement concernées. Le recul sur les contrôles d’identité, la poursuite de la destruction des bidonvilles Roms, les tergiversations sur le vote des étrangers, le refus répété d’une régularisation massive sont d’inutiles dérobades. Ce n’est pas pour ça que vous avez été élu(e)s.
L’électorat de droite, travaillé par l’extrême-droite, ne s’en satisfera pas. La base sociale, le pays réel, auquel le gouvernement devrait s’adresser est déçue, désorientée bientôt dépitée. Il s’agit d’un malaise profond et d’une question grave. Des pans entiers de la société française se sentent exclus, marginalisés, méprisés, suspectés. La précarité et l’exclusion sont les terreaux de l’incivilité et de la délinquance. Quand la seule réponse est la répression, comme ce fut le cas des années durant… et comme cela semble devoir l’être encore, la machine à produire des Mohamed Merah a de beaux jours devant elle. L’actualité le prouve.
Les réponses à ces problèmes existent. Le président Hollande a les moyens de les donner. Tenir bon sur les contrôles d’identité, accorder le droit de vote aux étrangers aux élections locales. Régulariser ceux que la politique de Sarkozy a transformés en sans papiers. Autant de gestes qui affirmeraient publiquement, avec éclat, que les divisions artificielles entretenues délibérément par le régime précédent n’avaient plus lieu d’être. Que le métissage de la population est irréversible et un enrichissement pour tous. Que Mohamed et Aminata sont maintenant des prénoms français comme François ou Valérie et autant que Manuel ou Carla. Que blacks blancs et beurs sont de plein droit de ce pays et qu’ils y ont un avenir commun.
La société y est prête. Les actions de solidarité avec les lycéens sans papiers, avec les parents sans papiers d’enfants scolarisés, avec les travailleurs sans papiers en grève ont mis au jour une évolution en profondeur de la population de ce pays qui se sait métissée, l’assume, voire le revendique. Ce n’est pas pour rien que Yannick Noah, Zinedine Zidane et Omar Sy sont les personnalités préférées!
Certes, les sondages montrent un certain recul de l’opinion sur ces questions. C’est ainsi qu’alors qu’il était très majoritairement souhaité, le vote des étrangers ne le serait plus. Ce n’est pas étonnant: à ce jour non seulement le gouvernement ne s’est pas engagé dans la bataille idéologique qu’il faudrait mener, mais il a même rendu des points au camp d’en face.
Le droit de vote des étrangers, l’acceptation des migrants sans papiers établis en France et la reconnaissance de leurs droits seraient des gestes éclatants à l’adresse de tous ceux qui ne se sentent pas pleinement acceptés et d’abord des milieux populaires précarisés et métissés. Qui pourrait générer quelque chose comme l’enthousiasme de la coupe du monde jadis ou, plus près de nous, celui de la foule mélangée qui, à sa grande surprise, avait accueilli le vainqueur de Le Pen à la Concorde. Mais en mieux.
Sans doute est-il tard. Il aurait probablement été préférable que cette bataille soit engagée dès le début du quinquennat. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas la mener. Il n’y a rien à gagner à ménager les thèses de la droite modérée qui suit la droite décomplexée qui elle-même file le train à l’extrême-droite.
Il y a urgence à engager cette bataille pour rendre la fierté d’appartenir à la société aux catégories exclues et adresser un message de fraternité à toutes celles et tous ceux perpétuellement renvoyés à leur condition « d’immigré », de la première, de la deuxième, de la nième génération, comme une éternelle malédiction.
A ce jour, l'action du gouvernement ne soulève guère d’enthousiasme. Il y a pourtant urgence ! Pour aboutir, pour triompher des idées toutes faites et de l’immobilisme, ces réformes doivent être mises en chantier très vite, dans les premières semaines, les premiers mois tout au plus, du mandat d’un président nouvellement élu, symbolisant la rupture avec l’ordre ancien et mettant au jour des évolutions en profondeur des mentalités.
C’est maintenant, dans les semaines qui viennent qu’il faut mettre ces réformes en chantier, celles qui resteront dans l’histoire comme l’acquis de François Hollande. Les mesures qui feront qu’à l’avenir, l’immigration cessera de n’être considérée que comme « un problème ». Ca ne règlera pas tout le reste. Mais ce sera quand même un progrès. Un vrai. Et, peut-être, la mise en mouvement du potentiel d’énergie, de créativité et d’enthousiasme aujourd’hui bridé par le poids du passé.»
10/11/2012
Source :  Médiaterranée (Newsring.fr)

Google+ Google+