mercredi 27 novembre 2024 09:50

Politique migratoire : la phase de la régularisation réussie, cap sur le challenge d'intégration (Expert)

Après l'étape de la régularisation de la situation des immigrés couronnée de succès, leur intégration dans la société marocaine reste un challenge à relever, a indiqué le secrétaire général de l'Association Marocaine d'Etudes et de Recherches sur les Migrations, Mohammed Khachani.

"L'accompagnement de l'intégration des immigrés doit se faire sur deux niveaux, à savoir la mise en place et le suivi de la politique d'intégration des immigrés au niveau social, économique, culturel et politique, ainsi que le réexamen du cadre législatif et institutionnel", a relevé M. Khachani, dans un entretien accordé à la MAP à l'occasion de la journée internationale des migrants, célébrée le 18 décembre.
L'expert a noté que l'intégration des immigrés passe en premier lieu par l'accès à l'emploi, soulignant que pour l'immigré, le chômage peut provoquer le repli identitaire qui a des conséquences néfastes.

L'immigré ne doit plus seulement être perçu comme l'"autre", l'étranger, mais comme un travailleur qui contribue au développement du Maroc. Ceci devrait inciter à percevoir l'altérité non comme un problème à résoudre, mais comme une chance à exploiter, a-t-il noté.

"La présence de ces migrants est une aubaine pour l'économie marocaine, vu que le Royaume est aujourd hui très avancé dans le processus de transition démographique", a expliqué M. Khachani.

Il a précisé que cette transition commence à se sentir au niveau du marché de l'emploi, notamment dans le secteur de l'agriculture, du BTP et des travaux domestiques.

L'expert a fait savoir que l'âge moyen de ces immigrés est de 27,7 ans, alors que leur niveau d'instruction est supérieur à celui de la population marocaine (16,1 pc des immigrés ont un niveau supérieur).
Pour mieux intégrer ces immigrés, M. Khachani a mis en relief l'importance de l'école et de l'accès au logement, précisant que la période d'installation des immigrés subsahariens est estimée en moyenne à 2,5 ans.

"Le ministère de l'éducation nationale n'épargne aucun effort pour la scolarisation des enfants de migrants dans les écoles publiques", a indiqué l'expert, ajoutant que plus de 6.000 enfants sont scolarisés.
Toutefois, l'accès au logement pose un problème, a déploré M. Khachani, soulignant que 63 pc des immigrés vivent dans des chambres collectives.

"Pour relever ce défi, il suffit de trouver un emploi pour ces immigrés", a-t-il estimé.

Au niveau de l'espace culturel, M. Khachani a relevé le rôle de la société civile afin de faciliter la rencontre des différentes cultures, appelant à adopter une pédagogie interculturelle au niveau des écoles afin de limiter le conflit culturel de 116 nationalités présentes sur le territoire marocain.

Concernant l'espace politique, l'expert rappelle que l'article 30 de la constitution stipule que les étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes et citoyens marocains, conformément à la loi.

Ceux d'entre eux qui résident au Maroc peuvent participer aux élections locales en vertu de la loi, de l'application de conventions internationales ou de pratiques de réciprocité.

En effet, M. Khachani a mis l'accent sur la nécessité d'adopter dans les brefs délais la loi sur l'asile, la loi sur la traite des êtres humains et la loi sur l'immigration pour abroger la loi 02-03, ainsi que la loi sur les droits des travailleurs domestiques.

La nouvelle politique migratoire, passant de l'approche sécuritaire à l'approche droits humains, exige des mesures d'accompagnement et une implication active de l'ensemble des acteurs sociaux et des partenaires internationaux du Maroc, a indiqué M.Khachani.

Le rapport du Conseil national des droits de l'homme (CNDH) a permis de dresser un diagnostic sur les droits des immigrés avec des recommandations qui concernent les principaux acteurs, censés s'impliquer dans cette nouvelle politique, notamment le parlement les médias et les syndicats.

Cette politique intervient dans un contexte où le Maroc est passé d'un pays de transit à un pays de destination. Ce nouveau statut peut être expliqué par les nouvelles dispositions prises par l'Union Européenne et l'exclusion de l'option de retour pour ces immigrés, a relevé M. Khachani.

L'expert a passé en revue le processus d'adoption de cette politique, rappelant que le Maroc a ratifié plusieurs conventions qui s'inscrivent dans cet esprit de droits humains, notamment la convention de Genève sur les réfugiés, le protocole de lutte contre la traite des êtres humains (2000) et la convention internationale sur la protection des travailleurs migrants.

La nouvelle politique marocaine d'immigration se décline en un plan d'action opérationnel autour des quatre axes essentiels du rapport du CNDH, à mettre en œuvre selon une démarche d'association avec cette institution et de concertation avec l'ensemble des autres acteurs concernés.

Sur le plan d'asile, il a été procédé au lancement immédiat d'un processus de mise à niveau du cadre juridique et institutionnel national et ce, dans le but de doter le Royaume d'un système de gestion conforme aux standards internationaux et respectueux de ses engagements en matière de promotion et de protection des droits de l'Homme.

Concernant les étrangers en situation administrative irrégulière, les autorités compétentes pour continuer de traiter les personnes en situation de séjour irrégulier dans le strict respect de la loi et de veiller à la protection de leurs droits et de leur dignité.

Parallèlement, les autorités marocaines continueront leur lutte sans relâche contre les réseaux de trafic des migrants et de traite des personnes, avec notamment le renforcement du dispositif juridique et des actions de sensibilisation en la matière.

En effet, une opération exceptionnelle de régularisation de la situation administrative des étrangers en situation de séjour illégal a permis de régulariser la situation de 18.694 demandeurs sur 27.643, soit 68 pc des cas.

17 déc. 2015,Malika Mojahid

Source : MAP

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