mercredi 27 novembre 2024 22:38

Sortie de la crise, l'Irlande s'emploie à faire revenir ses expatriés

L'Irlande officiellement tirée d'affaire économiquement a entamé cette semaine une campagne pour faire revenir au pays tout ou partie des 240.000 migrants qui ont fui la crise et sont partis depuis 2008 tenter leur chance en Australie, en Nouvelle-Zélande ou au Canada.

"L'émigration a eu un impact dévastateur sur notre économie. Nous avons besoin que ces personnes reviennent à la maison", a souligné le Premier ministre Enda Kenny en présentant son plan à destination de la diaspora, intitulé "Global Irish".

M. Kenny pense que 2016 se terminera pour la première fois en sept ans sur un solde migratoire positif, avec un nombre d'Irlandais revenant au pays supérieur au total de ceux qui s'expatrient.

Passée l'hémorragie déclenchée en 2008 qui signifiait la perte de talents partis implanter à l'étranger leur entreprise ou y trouver du travail, l'Irlande va désormais beaucoup mieux.

Au point de rembourser par anticipation les sommes prêtées par le FMI et l'UE en 2010 pour sauver le système bancaire irlandais menacé de faillite.

L'Irlande est officiellement sortie du plan d'aide international en décembre 2013 et d'une austérité budgétaire de six ans en octobre dernier.

Son économie est en phase de reprise, avec une croissance vigoureuse de 4,7% en 2014, selon une évaluation faite par les autorités qui attendent encore 3,9% cette année.

 Génération émigration

et d'aides pour favoriser le retour des expatriés. Un forum sera en outre organisé en juin pour analyser les défis que peut représenter le fait de revenir au pays.

Mais si la crise de 2008 a accentué le phénomène, l'émigration a fait partie intégrante de l'histoire de l'Irlande depuis les années 1840, quand plus d'un million de personnes ont quitté un pays ravagé par la famine.

Celle de la jeunesse s'est poursuivie sans interruption jusqu'aux années 1990, avant qu'une inversion du processus ne se produise lorsque l'économie du "Tigre celtique" a connu l'une des croissances les plus rapides du monde.

L'émigration a repris de plus belle à partir de la crise de 2008 avec l'Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande comme destinations privilégiées, outre le Royaume-Uni et les Etats-Unis, du fait de la facilité d'obtention de visas de courte durée.

Le manque de main-d'oeuvre notamment dans le bâtiment, a rendu ces pays attirants pour les milliers d'Irlandais sans emploi après l'effondrement du secteur de la construction immobilière en 2008.
L'un de ces migrants économiques, Shane Mulvey, un ingénieur de 26 ans, est parti s'installer en Malaisie après avoir décroché un emploi dans une compagnie australienne de BTP en 2012.

"Il n'y avait pas d'emplois, pas de perspectives en Irlande parce que tous les projets de construction d'infrastructures avaient été gelés alors je n'avais vraiment pas le choix", a-t-il dit à l'AFP.

Rentré en Irlande en fin d'année dernière, il a trouvé un emploi à Galway (ouest), concédant une réduction de salaire.

 Les expatriés veulent des "preuves formelles" pour rentrer

"Le salaire n'est pas comparable, mais vous êtes de retour, vous êtes au pays. Il y a des avantages et des inconvénients", a-t-il ajouté, philosophe.

"J'ai l'impression que ça commence à repartir. Il y a des compagnies qui embauchent maintenant en Irlande en quantité", s'est félicité Bronagh Cotter, un employé de Jobs Expo, un salon consacré au recrutement.
Les derniers chiffres disponibles montrent néanmoins que le solde migratoire est toujours négatif. Entre avril 2013 et avril 2014, 40.700 Irlandais ont quitté l'Irlande alors que seuls 11.600 ont fait le chemin inverse, soit le plus faible nombre total de retours depuis 1996.

Dublin vise le plein-emploi d'ici à 2018, mais l'Irlande affiche toujours un taux de chômage de 10,1%.

"Beaucoup ont quitté l'Irlande avec l'espoir de revenir lorsque l'économie irait mieux. Nous espérons créer un environnement et un climat économique propices à leur retour, notamment grâce à des baisses d'impôts", a déclaré à l'AFP Jimmy Deenihan, secrétaire d'Etat à la diaspora. "Je suis persuadé que la campagne sera un succès", a-t-il ajouté.

Pour Joe O'Brien, du Crosscare Migrant Project, qui aide les irlandais expatriés souhaitant revenir au pays, le véritable retour en masse n'est pas encore là.

"Les gens doivent prendre des décisions difficiles concernant leur vie et de la même manière qu'ils ont mis du temps à partir, je pense qu'ils vont attendre qu'il y ait des preuves formelles que la situation s'est améliorée", a-t-il jugé.

4 mars 2015, Conor BARRINS

Source : AFP

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