Bruxelles a annoncé un réexamen des relations avec la Suisse après sa décision de limiter l'immigration, un choix salué par l'extrême-droite au risque d'exacerber les tensions à quatre mois des élections européennes.
La Commission européenne a ainsi fait part de son intention d'examiner "les implications (du référendum) sur l'ensemble des relations entre l'UE et la Suisse" tout en regrettant la décision des électeurs suisses qui ont approuvé dimanche à une courte majorité de 50,3% une limitation de l'immigration.
Le vote des Suisses risque effectivement de remettre en cause de nombreux accords entre la Suisse et l'Union européenne. Ainsi, "l'accord sur la libre-circulation des personnes avec l'UE est remis en cause", a souligné le président actuel de la Confédération helvétique Didier Burkhalter qui a toutefois tenu à rappeler que son pays dispose d'un "système de démocratie directe" et que "le peuple s'exprime".
"C'est un mauvais résultat, la Suisse a besoin de bonnes relations avec l'UE", a commenté le syndicaliste et député socialiste Paul Rechsteiner, dont le parti a parlé de "défaite".
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, le plus européen des ministres d'Angela Merkel, a "regretté" le vote suisse estimant qu'il allait " créer de nombreuses difficultés pour la Suisse dans beaucoup de domaines.".
"Il faut que les responsables en Suisse en prennent bien conscience", a-t-il martelé admettant toutefois que "dans ce monde de la mondialisation, les gens ressentent un malaise grandissant vis-à-vis de la liberté complète d'installation".
A l'opposé, plusieurs partis européens d'extrême droite se sont félicité du choix des électeurs suisses.
En France, le Front national, présidé par Marine Le Pen, a salué "la lucidité du peuple suisse" tandis que le chef du parti britannique populiste Ukip, Nigel Farage a parlé d'une "merveilleuse nouvelle pour les amoureux de la liberté et de la souveraineté nationale en Europe".
En Autriche, le dirigeant du parti d'extrême droite FPÖ Heinz Christian Strache, a salué un "grand succès", affirmant qu'"en Autriche aussi, la majorité des personnes se prononcerait en faveur d'une limitation de l'immigration".
En Italie, le chef de la Ligue du nord Matteo Salvini, considérée comme populiste, a annoncé sur twitter l'intention de son mouvement de réclamer un référendum pour limiter également l'immigration en Italie.
"Ici chez nous, il n'y a plus de place ni de travail pour les immigrés. Il faut donner la priorité à nos millions de chômeurs, de retraités sans droits et de jeunes", a déclaré Massimo Bitonci, chef de file de la Ligue au Sénat.
Mais ces déclarations ne seront pas forcément suivies d'effet. La Ligue du nord ne représente plus qu'environ 4% des électeurs dans les sondages et pour convoquer un référendum en Italie, il faut recueillir 500.000 signatures tandis que les référendums sont uniquement abrogatifs de lois existantes.
L'ancien chef de la Ligue et actuel président de la région Lombardie, Roberto Maroni, avait d'ailleurs critiqué le référendum suisse, estimant qu'il risquait de pénaliser les nombreux travailleurs frontaliers italiens, qui tous les jours passent la frontière pour aller travailler dans le Tessin voisin de la Lombardie.
"Je ne vois pas comment les Suisses feraient sans les travailleurs italiens", avait-il ajouté.
Dans le même ordre d'idée, le président du comité de défense des travailleurs frontaliers (CDTF) du Haut-Rhin, département français frontalier de la Suisse, a fait valoir que la Suisse pouvait difficilement se passer des travailleurs étrangers.
De nombreux travailleurs frontaliers sont recherchés en Suisse parce qu'ils ont des compétences "très spécifiques", que ce soit dans les secteurs de la recherche, de l'artisanat, du BTP ou du tourisme, a rappelé Jean-Luc Johaneck, interrogé par l'AFP.
9 févr. 2014
Source : AFP