Pour sa sixième participation au Salon international de l'édition et du livre de Casablanca (SIEL), qui en est cette année à sa 20ème édition, le Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME) a choisi de rester en phase avec l'actualité en plaçant la question de la migration subsaharienne au Maroc au cœur de son programme, a indiqué le Secrétaire général du CCME, Abdellah Boussouf.
La participation du CCME au SIEL 2014 (13-23 février), placée sous le thème "L'Afrique, aux sources de la mobilité", entre ainsi dans le cadre de la nouvelle dynamique créée en ce qui concerne l'accueil des immigrés subsahariens sur le sol marocain, à la faveur de l'initiative de SM le Roi Mohammed VI qui a appelé le gouvernement à élaborer une nouvelle politique migratoire dans ce sens, a souligné M. Boussouf dans un entretien accordé à la MAP.
Pour enrichir le débat sur ce sujet, le Conseil a invité un parterre de responsables et d'experts représentant les instances chargées de la question migratoire, notamment des pays de l'Afrique de l'Ouest, qui engageront une réflexion commune destinée à anticiper les problèmes et faire en sorte que l'installation des immigrés subsahariens au Maroc se passe dans de bonnes conditions et que les relations historiques et privilégiées du Royaume avec ces pays africains soient renforcées par cette nouvelle politique d'immigration, a-t-il dit.
Cet espace d'échange et de concertation qu'offrira le CCME dans le cadre du SIEL permettra aussi, selon M. Boussouf, d'éviter "tout malentendu ou exploitation malvenue de quelques rares incidents qui se produisent ici et là" et de "démontrer la volonté du Maroc à garantir un bon accueil et une bonne intégration de ces immigrés, surtout que SM le Roi a beaucoup insisté sur la dimension humaine de cette migration".
Le pavillon du CCME au SIEL servira aussi de lieu d'échange d'expériences, notamment celle marocaine pour laquelle nombre de pays africains ont manifesté leur intérêt, a noté M. Boussouf, ajoutant qu'il s'agira de faire bénéficier ces pays de l'expertise importante accumulée par le Maroc en ce qui concerne la gestion de la migration, notamment dans les volets relatifs aux politiques publiques et aux mécanismes institutionnels.
S'attardant sur la nouvelle politique marocaine d'immigration et d'asile, le Secrétaire général du CCME a estimé qu'un pas important a été franchi dans la mise en œuvre de cette politique, avec le début de l'opération de régularisation de la situation de plusieurs milliers d'immigrés "qui s'est déroulée dans de bonnes conditions", se disant confiant que les critères fixés vont permettre de mieux répondre aux attentes des personnes ciblées.
Pour relever ce défi, M. Boussouf prône un modèle d'intégration propre au Maroc, qui passe par la scolarisation des enfants des immigrés, la formation professionnelle et l'insertion dans le marché du travail, ainsi que par une meilleure connaissance de la langue et de la culture marocaine, mais aussi par une connaissance, de la part de notre société, de la culture de ces immigrés subsahariens.
"En plus d'un programme d'intégration approprié et du volet administratif, ce sont toutes les valeurs traditionnelles d'accueil, d'entraide, de respect et d'acceptation de l'autre, si chères à la société marocaine, qu'il faut mobiliser afin de faire face à toute tentative de rejet ou de racisme et permettre à ces immigrés installés au Maroc de se sentir vraiment chez eux", a-t-il insisté.
Concernant la situation de la diaspora marocaine en Europe, un autre axe de réflexion proposé par le CCME lors de cette 20ème édition du SIEL, M. Boussouf a considéré que "le processus d'intégration des Marocains, notamment dans les pays d'Europe, est irréversible".
"Les sondages effectués montrent que 78 pc des Marocains ont la nationalité des pays européens dans lesquels ils sont installés, donc l'intégration est déjà réalisée et sa marche est irréversible", a-t-il soutenu, faisant remarquer que des compétences et élites commencent à émerger dans les universités, les entreprises, les partis politiques, voire dans les gouvernements en tant que ministres, comme c'est le cas en France et en Belgique.
Selon le Secrétaire général du CCME, les Marocains sont parmi les communautés d'immigrés les mieux intégrées dans les pays d'accueil. Et pour cause, l'une des caractéristiques de l'immigration marocaine réside dans le fait qu'elle s'est grandement mondialisée et qu'"elle a eu la capacité de réaliser des adaptations pour mieux vivre son implantation", a-t-il expliqué.
Parmi les mutations importantes à signaler dans l'histoire de la migration marocaine et sur laquelle se pencheront également les invités du CCME, figure la "féminisation" de l'immigration qui a atteint un taux de 50 pc ces dernières années, surtout dans les pays européens. "Les femmes marocaines migrent pour différents motifs: Etudes, travail et affaires. Si certaines vivent bien leur expatriation, il arrive que d'autres rencontrent des difficultés, voire de l'exploitation, parfois par ignorance des lois des pays d'accueil", a relevé M. Boussouf.
Et de faire observer que la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent ces immigrées, pas seulement en Europe, mais aussi en Afrique (surtout au Sénégal, au Mali et en Côte d'Ivoire) et dans les pays du Golfe, les met à la merci des réseaux de prostitution qui exploitent leur vulnérabilité pour les mettre dans des conditions de servitude et les priver de leurs droits les plus élémentaires.
Pour mettre fin à ces pratiques, le responsable a appelé à élaborer un programme de sensibilisation qui touche à la fois les immigrées marocaines, l'administration marocaine et l'administration des pays d'accueil, et à faire preuve, aux niveaux politique et administratif, de plus de fermeté face à ce phénomène.
L'autre question fondamentale inscrite au programme du CCME durant le SIEL, consiste en l'islamophobie en Europe, cultivée par des groupuscules extrémistes - surtout à l'approche des rendez-vous électoraux - qui ne ménagent aucun effort pour diaboliser et stigmatiser les communautés musulmanes.
Cette peur est totalement injustifiée, parce que l'Islam est devenu aujourd'hui "une réalité européenne", avec plus de 15 millions de musulmans installés dans le continent, qui y vivent normalement et qui contribuent à la création de richesses, tient à souligner M. Boussouf.
En effet, analyse-t-il, à défaut d'un véritable projet de société, les partis d'extrême droite essayent de surfer sur la peur de l'Islam et de la cultiver afin d'attirer les voix des électeurs qui ne connaissent pas bien l'Islam et qui sont influencés par les idées véhiculées par certains médias sur la base d'événements dramatiques isolés.
"A mon avis, l'Islam en Europe est aujourd'hui arrivé à un stade où il est capable de faire face à ce genre de phénomènes. Les Musulmans sont devenus à présent des citoyens européens à part entière, avec les mêmes droits et devoirs que les européens d'autres confessions. Il incombe, ceci dit, aux membres des communautés musulmanes de faire un effort d'adaptation, de s'imprégner des valeurs de juste milieu, de respect, de tolérance, de diversité, d'ouverture sur la société et d'acceptation de l'autre, parce que ce sont là les points sur lesquels sont construites les campagnes de stigmatisation de l'Islam qui cherchent à faire peur aux Européens de l'arrivée massive des Musulmans", a-t-il fait valoir.
Et d'affirmer que "cette machine de l'islamophobie ne peut cacher l'autre réalité, à savoir qu'il y a aussi, dans la grande majorité des sociétés européennes, des groupes ouverts et respectueux envers l'Islam, qui aident à la construction des mosquées et à la formation des imams et qui œuvrent à la reconnaissance de l'Islam dans certains pays européens. Il faut donc que les Musulmans et ces groupes modérés travaillent main dans la main pour faire face aux groupuscules extrémistes et les réduire à leur juste valeur".
13 févr. 2014, Meriem RKIOUAK
Source : MAP