Le drame de l'immigration survenu, jeudi au large de M'diq Fnideq, qui a coûté la vie à plusieurs clandestins subsahariens, a déclenché une vive polémique et une vague de réactions en Espagne suite à l'usage par la Garde civile de matériel antiémeute contre les immigrés qui tentaient d'accéder au préside occupé de Sebta.
Face aux critiques des partis de l'opposition et des ONG s'activant dans le domaine de la défense des droits des immigrés en Espagne sur l'utilisation de la "violence" contre ces immigrés subsahariens, les autorités locales de la ville occupée de Sebta se défendent en arguant que la Garde civile a été contrainte à faire usage de "matériel antiémeute et de balles en caoutchouc" en réaction aux actes des clandestins.
Ce matériel a été utilisé comme "moyen dissuasif" pour faire face à "l'attitude très violente" manifestée par ces immigrants ayant "lancé des pierres et d'autres objets contre les forces de sécurité espagnoles et marocaines", selon les mêmes sources.
Même les témoignages recueillis par l'ONG "Caminando Fronteras" auprès des survivants de ce drame attestent que la garde civile espagnole aurait utilisé des balles en caoutchouc et des bombes lacrymogènes contre les migrants, ce qui a provoqué la noyade de ces clandestins.
Pour sa part, la radio privée "Cadena Ser" a rapporté les déclarations d'un immigré qui a vécu de près cette tragédie et qui dénonce que les agents de la Garde civile ont "tiré des balles en caoutchouc dans le but de crever les bouées" utilisées par les clandestins afin d'effectuer la traversée.
Suite à cette tragédie, les réactions ne se sont pas fait attendre, notamment de la part des organisations des droits humains. Ainsi, le Réseau des ONG européennes "Migreurop" a réclamé la mise en place d'une commission parlementaire au Congrès des députés pour enquêter sur les "pratiques policières" à l'encontre des immigrés.
En plus, selon Migreurop, ce drame "reflète l'échec total des politiques migratoires espagnole et européenne obsédées par le blindage des frontières et par des mesures ne prenant pas en considération la réalité des pays d'origine ni le volet humanitaire" de ce phénomène.
Dans la même ligne, "SOS Racisme Madrid" a demandé l'ouverture d'une investigation sur une présumée utilisation par la Garde civile de balles en caoutchouc afin de repousser les immigrés subsahariens.
"Il existe des doutes que la Garde civile aurait tiré des balles en caoutchouc pour empêcher les immigrés d'y accéder. Si cela s'avère vrai, nous serons devant un cas d'homicide", souligne l'ONG dans un communiqué, dénonçant que la "fermeture totale de la frontière" et l'installation des barbelés tranchants "ont conduit ces personnes à une tentative désespérée".
De leur côté, les partis politiques espagnols ne sont pas restés passifs devant cette situation. La principale force d'opposition, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), a exigé la comparution du ministre de l'Intérieur, Jorge Fernandez Diaz, pour s'expliquer sur l'attitude de la Garde civile et la mort de ces immigrants.
Selon le porte-parole de l'Intérieur du PSOE au Congrès des députés, Antonio Trevin, Fernandez Diaz est "obligé" de fournir "tous les détails" après avoir "donné des versions contradictoires" sur les incidents survenus jeudi.
Quant au parti de la Gauche Unifiée (IU), il est allé très loin, demandant la "démission immédiate" du ministre de l'Intérieur, ainsi que l'ouverture d'une "enquête urgente" pour éclaircir toutes les responsabilités liées à cette tragédie humaine.
Même des partis minoritaires comme le Bloc nationaliste galicien (BNG) ont estimé nécessaire la comparution du responsable espagnol pour rendre des comptes sur les "mesures dissuasives" utilisées par son département en matière d'immigration et qui constituent une "violation des droits de l'homme".
Dans le but d'éclaircir les circonstances de ce drame, le gouvernement de Mariano Rajoy a annoncé la comparution la semaine prochaine devant le Parlement de Fernandez Diaz.
Le ministre de l'Intérieur a lui-même demandé de se présenter devant les députés pour les informer de ce qui s'était passé, a indiqué, vendredi, la vice-présidente du gouvernement, Soraya Saenz de Santamaria, lors d'une conférence de presse à l'issue du Conseil des ministres.
7 févr. 2014
Source : MAP