Nous avons l'habitude d'entendre des récits de racisme ordinaire vécus par des gens ordinaires, des attitudes et des remarques de bas étage qui sont devenues monnaie courante et que même à force on n'y prête plus attention, sinon les tribunaux seraient engorgés. Mais qu'un ambassadeur de la République, toujours en exercice se plaint de discriminations à son égard, cela jette un trouble et mérite qu'on s'y attarde un peu.
Dans une lettre rendue publique par son auteur, adressée à M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères, Zaïr Kedadouche, ambassadeur de France à Andorre, ancien consul général de France à Liège, et membre du haut conseil à l'intégration, se plaint de son expérience humaine douloureuse au Quai d'Orsay.
Monsieur l'ambassadeur fait un constat amère et lourd de sens: de nombreux pays d'immigration, sont parvenus à promouvoir une diplomatie efficace où la diversité est valorisée à tous les niveaux et sur tous les types de poste alors que le manque d'ouverture et d'innovation, malgré les évolutions récentes, empêche de valoriser de nouveaux parcours, en particulier celui des français issus de l'immigration maghrébine dont vous savez bien, que malgré les efforts possibles d'intégration, ils continuent à subir des rejets et des discriminations feutrées...
On voit bien qu'à travers cette expérience personnelle, Monsieur l'ambassadeur, avec courage et lucidité met sa carrière entre parenthèses, pour mettre la lumière sur la problématique globale des discriminations dont sont victimes les français d'origine maghrébine. Dans ce registre, il est permis de parler de mécanismes de pensée et de comportement à l'œuvre dans un silence consensuel, avec des relents néocolonialistes, qui sont autant de freins à l'intégration, tant évoquée dans les discours officiels lors de certaines manifestations mondaines.
Plus on monte dans les postes à responsabilité, plus la diversité se fait discrète voir inexistante; pourtant les talents sont là. De plus en plus de jeunes diplômés issus de l'immigration partent ou envisagent de partir à l'étranger pour accomplir leur carrière professionnelle. Pour eux, la France n'est plus un rêve.
C'est une première, Zaïr Kedadouche, ambassadeur de France dans la principauté d'Andorre, vient de saisir par écrit, Dominique BAUDIS, défenseur des droits, au sujet de comportements, dont il estime avoir été victime et qu'il qualifie de contraires aux principes de la République. A mon sens, ce cri d'alarme est certainement l'expression d'une profonde crise de l'intégration.
On dit souvent qu'écrire, c'est hurler en silence !
Hamid SOUSSANY
