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Allocution d'ouverture de Mme Fadila Laanan, Ministre de la culture et de l'audiovisuel de la communauté française de Belgique

mardi, 26 mai 2009

 

 

Monsieur le Ministre,

Mesdames, Messieurs, en vos titres et fonctions,


Retenue par d'autres obligations en Belgique, je n'ai pu être présente pour prendre part à vos travaux et je vous prie de m'en excuser.

Je voudrais néanmoins profiter de la parole qui m'est donnée, via ma collaboratrice, pour remercier le Conseil de la Communauté Marocaine à l'Etranger ; en particulier son Président, Monsieur Driss El Yazami, qui a tenu à ce que je sois ici représentée.

Je salue également les autorités marocaines pour la mise en place et le démarrage des travaux de ce Conseil. Je lui souhaite tout le succès dans la réalisation des larges attributions qui sont les siennes.


Une telle structure peut en effet être un organe précieux pour le débat démocratique et pour la défense des émigrants Marocains, qui aujourd'hui encore, sont nombreux à vouloir quitter vers d'autres territoires.

A l'heure où les phénomènes migratoires nous mettent face à des modèles, à des stratégies, à des profils d'acteurs migrants très éloignés des connaissances et des conceptions que nous en avions développées sur base des immigrations économiques des années 1960 ;


A l'heure aussi où les enjeux sociaux et humains liés à ces phénomènes migratoires ne sont plus posés qu'en termes juridiques ; il est important que les sociétés démocratiques ouvrent des pistes de réflexion et d'action, visant à repenser les mouvements de populations ; qui, je le rappelle, sont au fondement des sociétés humaines.


Nous avons là un défi commun. Et effectivement, il me paraît important, que les sociétés d'origine s'inquiètent du sort réservé aux plus fragiles de leurs ressortissants et qu'elles puissent en effet les renforcer dans leurs droits les plus élémentaires.


En matières juridiques, ce Conseil a devant lui une perspective de travail largement ouverte sur des questions touchant tant les anciennes que les nouvelles émigrations.


De prime abord, les missions qui sont attribuées à ce CCME le chargent d'un travail d'ouverture, d'écoute et de réparation, qui nécessite une attention toute particulière envers « l'absent ».


Personnellement, cette nouvelle ouverture me touche. Elle tranche singulièrement avec une option qui donnait à penser que « l'absent » avait toujours tort.


Je salue donc, cette démarche visant à rendre la parole à des hommes et des femmes, jusqu'ici oubliés de l'histoire, au travers de leurs témoignages ; mais aussi au travers des analyses, des réflexions et de productions artistiques, qui telle le film de Yamina Benguigui qui est prévu dans votre programme, ont levé le voile sur cette parole oubliée.


En concordance avec ses missions, ce CCME cherche aussi à impulser, en toute sérénité, un dialogue aujourd'hui plus qu'utile à la connaissance et à la reconnaissance mutuelles entre des populations marocaines et des communautés d'origine marocaine, établies ou nées ailleurs. Le programme de vos deux journées intitulé « Marocaines d'ici et d'ailleurs : mutations, trajectoires et défis » en est une preuve et je m'en réjouis.


En tant que Ministre de la Culture, je me réjouis également que l'on puisse travailler au croisement des points de vue entre ceux 'd'ici' et ceux 'd'ailleurs'. Ces croisements et échanges sont signes de créativité et de dynamisme culturels. Ils ne peuvent être que bénéfiques tant à nos scientifiques qu'à nos artistes ; qui ont beaucoup à gagner de la rencontre et de la confrontation entre toutes nos différences.


Loin des discours et des démonstrations, le champ de la Culture et des Arts est, à mes yeux, un domaine privilégié pour approcher de manière sensible ces différences qui nous constituent et qui en définitive font nos richesses.


Je peux vous assurer à cet égard que je suis très attentive au travail des artistes et aux programmes de coopération qui lient nos deux pays.


Du point de vue identitaire, les hommes et les femmes ; qu'ils soient nés ici ou là-bas, qu'ils y reviennent ou qu'ils n'y reviennent plus ; témoignent d'un lien très diversement construit et entretenu avec la société marocaine.


Cette construction, on ne doit pas l'oublier, s'est aussi élaborée sur des investissements et des parcours qui les intègrent différemment dans leur contexte de vie ; témoignant, en immigration également, d'une grande diversité sociale, générationnelle, générique, mais aussi culturelle, linguistique, philosophique,...


Ici comme ailleurs, les identités ne sont jamais univoques et figées. Elles sont le fruit de nos héritages, de nos luttes et de nos acquis : complexes et en mouvement.


Les familles immigrées marocaines et les générations qui en sont nées ont vécu des réalités qui les ont différemment ancrées dans les sociétés d'accueil ; dans des trajectoires qui les ont socialement et culturellement marquées différemment, mais qui les ont aussi très inégalement dotées.


La rencontre d'aujourd'hui repose sur les travaux de la commission qui au sein du CCME est chargée de développer une « Approche genre et nouvelles générations ».


Ces deux thèmes : celui des générations nouvelles qui ne sont plus des 'migrants' et celui du rapport aux femmes, ouvrent deux perspectives importantes sur les immigrations. Importantes, au sens où elles en interrogent les non dits, les vérités officieuses et silencieuses ; les espoirs contrariés et oubliés ; les marches en avant sans voies de retour... bref, des processus qui les ont mis, eux ainsi que leurs familles, en mouvement autrement et ailleurs que là où ils étaient attendus.


C'est dire combien la thématique des femmes est importante et aborder les faits migratoires au travers de l'intérêt féminin est prometteur quant au développement des connaissances que nous pouvons en attendre.


Puisque nous assistons ici à l'une des grandes sessions d'ouverture des travaux du Conseil, permettez-moi de formuler quelques remarques, visant à renforcer les enjeux tant du point de vue de la société d'émigration que de celle d'accueil.


Ici comme ailleurs, les femmes ont à leur niveau et selon les ressources dont elles disposent, développé des résistances et mené des luttes qui restent de part et d'autre fort peu connues. Un travail de mise en lumière des enjeux est à ce stade utile pour renforcer les femmes d'ici et d'ailleurs dans leurs droits collectifs et individuels.


Sur ce plan, l'associatif féminin et les organisations féministes ont un rôle primordial à jouer.

La collaboration entre les associations actives sur ces questions dans nos différents pays est également une piste à explorer. En effet les femmes d'ici et celles parties doivent pouvoir être relayées au Nord comme au Sud, là où se pose leur intérêt.


Cette première rencontre des femmes qui se tient à Marrakech est donc une première pierre à un édifice qui je l'espère de tout cœur, va permettre de poser les jalons de liens de solidarité solides entre elles.


Dans cette optique, la coopération bilatérale et multilatérale entre nos deux états (Maroc / CF) pourrait inclure un tel axe de travail.


J'espère aussi que ce rassemblement va donner aux femmes, les présentes et les absentes, de nouvelles forces, de nouvelles ressources pour faire face aux défis qui leur sont posés.


Je vous souhaite un excellent travail

 

Madame Fadila Laanan, Ministre de la Culture et de l'Audiovisuel

 

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