jeudi 28 novembre 2024 21:40

Le problème, c'est cette BMW noire de 1997. Moncef Ghezal l'a achetée après sept années passées à travailler en Italie. C'était son rêve. Mais il faut l'entretenir et il n'y arrive pas. "Je l'ai payée 1 000 euros, un bon prix pour un bijou pareil. Mais on me demande 700 euros de plus pour l'assurer pendant six mois. Et puis, il y a le contrôle technique, la vignette, l'essence de plus en plus chère. Je ne peux pas. Je n'arrive même pas à avoir ma propre voiture. L'Italie ne m'a rien donné". A peine cette phrase prononcée, Moncef Ghezal baisse les yeux. Avant de reprendre, gêné : "J'ai beaucoup d'amis italiens. Des gens bien, qui m'ont aidé. Quand je rentrerai en Tunisie, ils me manqueront."

Il a pris sa décision. La comparaison avec ceux qui sont restés est devenue trop difficile. "A Hammamet, mes frères se sont mariés, ils ont fondé une famille et se font construire une maison. Moi, je n'ai rien fait de tout ça." Moncef Ghezal est sur le point de jeter l'éponge, alors même qu'il vient d'obtenir son premier permis de séjour et peut enfin toucher un salaire de 1 260 euros par mois. Pour quelqu'un qui travaille dans les champs fertiles de la Sicile, ce ne doit pas être facile de se dire qu'on n'arrive à rien semer. Aucune graine d'avenir. La Tunisie est toujours devant lui, à l'horizon, de l'autre côté de la mer. Il travaille dans la campagne de Cassibile, à l'extrême sud de l'Italie. Il est ouvrier agricole chez un gros producteur de tomates cultivées en serre. Nous le rencontrons durant sa pause déjeuner. Un sandwich au thon dans un sachet en plastique. Il porte un pantalon militaire et une casquette de la Juventus. "J'ai toujours aimé le foot italien. C'est aussi pour ça que j'étais content de venir ici."

A Hammamet aussi, il était paysan. Il a appris le métier auprès de son père Jilani. Chaque jour, il voyait arriver des camions de France et d'Allemagne, qui repartaient chargés de dattes. En juillet 2005, il s'est caché dans l'un de ces camions, parmi les fruits de son pays. "Je n'ai emporté qu'une bouteille d'eau sucrée. Pendant le voyage, je n'ai pas fait pipi une seule fois." Le camion a débarqué au port de Gênes. Moncef Ghezal est descendu dans une station service dans les environs de Brescia. "Je me souviens très bien de ma première nuit en Italie. Caché dans un champ de maïs, dévoré par les moustiques." Il n'est resté dans le nord que 24 jours. Ensuite, il a travaillé dans les Pouilles pour 3,50 euros de l'heure. Là, il a fait la connaissance de sa fiancée, Elena, une roumaine qui a émigré pour travailler comme aide à domicile. Ensemble, ils ont décidé de partir en Sicile. "Artichauts, courgettes, oranges, pommes de terre, tomates. J'ai cueilli de tout."

Il y a neuf mois, après des années de travail au noir, Moncef Ghezal a décroché son premier contrat régulier. Mais le germe du doute avait déjà entamé sa résolution. "J'ai beaucoup souffert au moment de la mort de mon père. Je n'avais pas de papiers en règle, je n'ai donc pas pu me rendre à son enterrement. Ni non plus au mariage de ma sœur Mnufida." Des photos de sa famille trônent sur la table de nuit. Moncef Ghezal habite un appartement dans le centre d'Ispica, un petit village sur la colline. Il paie 300 euros de loyer par mois. Chaque matin, il part travailler à Cassibile à bord d'une vieille Fiat Punto qu'il partage, tout comme les frais d'essence, avec un ami. Le reste de sa vie italienne, il le raconte ainsi : "Le samedi, je joue dans les buts dans une équipe de maghrébins. Une fois par semaine, je vais manger une pizza avec Elena. A la maison, nous avons un caniche, un chat et sept perroquets." Alors qu'il parle, la parabole diffuse la chaîne nationale tunisienne. "Pendant que j'étais là, exploité et sans papiers, dans mon pays ils ont fait la révolution. La Tunisie s'est améliorée, l'Italie, elle, s'est enfoncée dans la crise." Les écarts se sont réduits. "Mon frère gagne la moitié de ce que je gagne. Mais, lui, il élève deux enfants…" Un sujet qui le travaille sérieusement. "Elena est une femme vraiment très bien, mais elle a 50 ans. Elle me dit que je dois rentrer chez moi et me marier. Car moi j'en ai 31 et je commence à baisser."

En 2011, les demandes d'aide au retour volontaire ont doublé en Italie : 374 émigrés ont obtenu un billet de retour financé par des fonds européens. Ce chiffre, cependant, reste bien en deçà des retours réels, puisque seuls les étrangers détenteurs d'un permis de séjour en règle peuvent en faire la demande. Beaucoup rentrent chez eux écrasés par un sentiment d'échec. Ce ne sera pas le cas de Moncef Ghezal, cueilleur de tomates. En août, il roulera dans les rues d'Hammamet à bord de sa vieille BMW. Il a fait tout ce qu'il a pu. C'est l'Italie qui a perdu.

Niccolò Zancan (La Stampa), traduit de l’italien par Régine Cavallaro

Source : Le Monde

En 2011, les Européens ont beaucoup parlé du Printemps arabe et de ses conquêtes pour les droits de l'homme. Oui mais, note l'ONG Human Rights Watch, l'Europe ferait mieux de balayer devant sa porte. L'année dernière, c'est chez elle qu'ils ont reculé. Etat des lieux de l'autre crise européenne.

Une crise peut en cacher une autre. Pendant que l’Europe économique part à vau-l’eau, les citoyens européens encaissent les lourds tributs d’une autre crise, plus silencieuse, mais tout aussi violente. Celle des droits humains. Dans son rapport annuel, l’ONG Human Rights Watch s’alarme d’une Europe moins démocratique en 2011, et d’un recul des droits humains éclipsé par le Printemps arabe.

Au-delà des belles paroles [sur le Printemps arabe], les droits humains en Europe sont en réalité bien mal en point. Une nouvelle idée chemine, celle selon laquelle:

Les droits des minorités "problématiques" devraient être infirmés dans l’intérêt général

Les politiciens élus qui mènent ce genre de politiques agissent en toute légitimité démocratique",

écrit Benjamin Ward, directeur adjoint de la division Europe et Asie centrale, dans un essai joint au rapport [PDF]. Plus précisément, HRW cible trois thématiques responsables de la crise des droits humains en Europe en 2011 :

Les discriminations et l’intolérance à l’encontre des minorités, en particulier contre les Roms

Les migrations et l’asile, et l'accueil réservé aux migrants de Tunisie et de Libye

Les politiques antiterroristes et leurs atteintes au droit

Le rapport de l’ONG retient 9 pays européens -parmi lesquels la France, l'Italie ou l’Allemagne-, où les droits humains ont reculé dans l’une ou l’autre des trois catégories l’année dernière.

1. DISCRIMINATIONS ET INTOLÉRANCE CONTRE LES MINORITÉS

Les Roms, bouc émissaire de l’Europe en 2011 : Grèce, Italie et Hongrie

La Grèce est épinglée sur la "discrimination systémique dans les domaines du logement et de l'éducation" à l’encontre des Roms. Les jeunes sont particulièrement visés par une "ségrégation à l’école", qui a d’ailleurs fait l’objet d’une plainte collective menée par 140 familles et jugée recevable par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

HRW note par ailleurs que la violence raciste représente un "problème grave", en particulier à Athènes, marquée par des attaques contre la communauté pakistanaise, et des raids de militants d’extrême droite dans les quartiers d’immigrants. L’un d’eux avait fait 25 blessés en mai 2011, parfois à coups de couteau.

La communauté rom a aussi souffert en Italie, et, encore une fois, les enfants sont les premières victimes. L’ONG liste les domaines où la discrimination y est critique : santé, éducation, conditions de vie, etc. Les enfants roms sont également surreprésentés dans le système italien de justice pour mineurs.

Même constat en Hongrie, où les Roms subissent "harcèlement et menaces de la part de milices d'autodéfense dans les régions rurales". En avril, rappelle HRW, la Croix-Rouge hongroise avait dû évacuer 277 Roms d'un campement menacé par un groupe d'autodéfense anti-Roms.

Autres discriminations ciblées : Constitution hongroise, avortement en Pologne, et manifestants espagnols

La Hongrie de Viktor Orban, mauvaise élève de l’année, concourt dans plusieurs catégories. HRW critique ainsi sur la nouvelle Constitution, entrée en vigueur en janvier 2012. Le texte, rédigé par le Fidesz, le parti au pouvoir, porte en lui "des provisions discriminatoires à l'encontre des femmes; des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) ; et des personnes handicapées". La presse n’est pas épargnée : la nouvelle loi hongroise en la matière est "une atteinte à la liberté d'expression", souligne le rapport.

En Pologne, ce sont les droits des femmes qui ont pris un coup. Le pays, doté de "l'une des législations sur l'avortement les plus restrictives d'Europe", a d’ailleurs été rappelé à l’ordre en 2011 par la CEDH. Celle-ci a estimé que "le refus d'accès à un avortement légal équivalait à une violation de l'interdiction des traitements cruels et inhumains". La Pologne a failli adopter une loi interdisant totalement l’avortement, en août, rappelle HRW.

En Espagne, la réforme de la loi de 2010 sur l’avortement est pour bientôt, et risque de suivre la même pente. Le gouvernement l’a annoncé le 25 janvier 2012 : les mineures devront désormais avoir l’accord de leur père pour avorter. 2011, ce fut aussi l'année des manifestations en Espagne. HRW y déplore les violences policières caractérisées à l’encontre des manifestants, lors des mobilisations contre les mesures d’austérité.

2. LES MIGRANTS ET L'ASILE : LA FORTERESSE EUROPE

C’est la crise la plus aiguë en matière de droits humains en Europe, selon HRW.

L’intolérance envers les migrants en Europe est omniprésente. D’après un sondage réalisé en 2010, la majorité des habitants de huit États de l’UE trouvent les immigrants trop nombreux, la moitié des répondants ayant le même avis concernant les musulmans".

La crise migratoire suscitée par le conflit en Libye et l’exode des Tunisiens en 2011 a montré l’incurie des gouvernements des pays européens face à cette question. Le dispositif de répression réservé aux migrants s’est renforcé en France, en Hongrie ou aux Pays-Bas.

Concernant la France, HRW attaque la loi sur l’immigration, adoptée en juin, qui "a affaibli les droits des migrants et des demandeurs d'asile". Comment ? En élargissant l'utilisation des zones de transit (où les migrants ont moins de droits et sont plus aisément expulsables) et en allongeant la période maximale de détention avant expulsion (à 45 jours).

En Hongrie, une loi de décembre 2010 prévoit désormais une période maximale de 12 mois d’enfermement pour les migrants, et une détention prolongée pour les demandeurs d’asile.

Le gouvernement des Pays-Bas a quant à lui pris la décision de faire payer aux demandeurs d’asile déboutés de financer "la totalité du coût de leur rapatriement forcé", tout en limitant le droit d’appel suspensif. Et HRW de déplorer l’acquittement en juin de Geert Wilders, chef du parti de la Liberté, accusé "d’incitation à la discrimination contre les musulmans, les immigrants non occidentaux et les Marocains".

La Grèce demeure quant à elle encore et toujours décriée par HRW pour les conditions de vie des migrants sur son sol, qui n'ont pas progressées en 2011.

3. LOIS ANTITERRORISTES VS. DROITS HUMAINS

L’Allemagne et le Royaume-Uni abusent de l'antiterrorisme

La première a reconduit pour 4 ans son dispositif antiterroriste, accusé par HRW "d’exercer des surveillances et de recueillir des données sur une large échelle".

Outre-manche, le Parlement planche sur 4 nouvelles lois antiterroristes. L’une d’elles prévoit de réduire de 28 à 14 jours la garde à vue dans les affaires de terrorisme… mais instaurerait une possibilité de renouveler la garde à vue pour 28 nouveaux jours "en cas d’urgence".

Et l’UE dans tout ça ?

Benjamin Ward, de la division Europe de HRW, estime que seules la CEDH et la Commission européenne sont en mesure d'influencer les Etats. Retenant deux exemples - l’expulsion de Roms par la France lors de l’été 2010 et la loi sur les médias en Hongrie - il constate cependant que "dans les deux cas, des mesures de coercition ont été prises par la Commission, pour ensuite être révoquées ou mises en suspens sans que les facteurs déclenchants aient été correctement traités". Et de conclure :

Si la Commission ne fait pas preuve de davantage de courage, la pente descendante en matière de droits au sein de l’UE semble devoir se poursuivre".

25.01.2012 | 19:10, Benjamin Leclercq

Source : Myeurope

Hayat Saidi expose ses œuvres jusqu'au 30 janvier à la fameuse Biennale de Rome. Une consécration pour cette artiste autodidacte, férue de la lumière et de la couleur…Suite

Said Ben A mar, un franco-marocain de 26 ans s'apprête à faire l'aventure de sa vie : la traversée de l'Atlantique pour relier Dakar à Cayenne (Guyane) à l 'aviron, à la force des bras, sans escale, sans assistance et en solitaire…Suite

L'Hôpital My Abdellah à Mohammedia a reçu mardi un lot de matériel médical offert par la mairie de Dreux en France.

Le lot se compose de 42 chaises roulantes, 24 sommiers hospitaliers, 30 couvertures ainsi que 28 consignes pour le rangement des médicaments.

Ce don s'inscrit dans le cadre de l'accord de coopération et de jumelage conclu le 4 décembre 2010 entre les mairies de Mohammedia et de Dreux, a indiqué Saïd Bahlaoui, membre du conseil de la ville de Mohammedia, chargé de la communication, assurant que le conseil compte multiplier de telles actions en faveur de cet établissement hospitalier.

Un engagement salué par le Directeur de l'Hôpital My Abdellah qui s'est félicité de ce don qui vient à point nommé, d'autant que l'hôpital enregistre des carences en la matière, espérant que ce partenariat dure et englobe d'autres domaines comme la radiologie qui devrait être numérisée.

Il a aussi déploré le fait que l'unique hôpital dans la ville ne dispose que d'une seule ambulance et d'une morgue trop petite pour répondre aux besoins actuels.

Visiblement sensible à toutes ses attentes, le Président de l'Association Marocaine Interculturelle et Sportive à Dreux (AMIS), Mohamed Chekradi, a fait état de sa disposition de réunir toutes les volontés des marocains résidant dans cette ville pour participer encore à des actions de coopération en faveur de la ville de Mohammedia et de l'hôpital en particulier.

Le président de cette association, qui a œuvré pour l'acheminement de ce don, a aussi fait part de son intention d'œuvrer pour la création d'une association regroupant les Marocains originaires de Mohammedia résidant à Dreux qui représentent 5000 personnes sur les 32.000 habitants de cette ville située dans le Département d'Eure-et-Loir et la région du centre.

24/01/2012

Source : MAP

Le Maroc participe durant le premier semestre 2012 au premier festival euro-arabe du cinéma et du journalisme qui se tiendra dans la capitale espagnole Madrid, apprend-on lundi auprès des organisateurs.

Organisé sous le thème " Cinéma et journalisme: Rapprochement entre les deux rives", le festival est une initiative conjointe de la fédération des associations des journalistes d'Espagne (FAPE) et l'association des journalistes et écrivains arabes en Espagne pour contribuer au rapprochement entre l'Occident et le Monde arabe à travers le cinéma, la culture et les Médias.

Le festival, qui combine projections cinématographiques et conférences thématiques animées par des diplomates arabes accrédités en Espagne, des experts du monde arabe ainsi que des journalistes espagnols et arabes, est organisé en collaboration avec la Fondation Araguaney-puente de culturas.

Au total sept films documentaires de cinq pays, deux du Maghreb (le Maroc et la Tunisie) et trois du Proche Orient (Egypte, Palestine et Irak) seront projetés du 26 janvier au 14 juin prochain, un jeudi de chaque mois, à l'auditorium du centre international de la presse de Madrid.

Les films retenus racontent le printemps arabe en Egypte et en Tunisie avec les documentaires "Plus jamais peur" du tunisien Mourad Ben Cheikh, et "Erhal: journal de la place Tahrir", le conflit Israélo-palestinien "Cette terre est mienne", "Hébron" et "la petite ville de Bethléem", la réalité de la population émigrante avec le documentaire "Al Madina", des inégalités des opportunités avec le documentaire "Khalid" et enfin de la mort de journalistes en Irak "Caméras contre armes".

Le Maroc est représenté à ce festival par deux documentaires "Al Madina" qui raconte, durant 14 minutes, le retour d'un immigré marocain à son pays d'origine après neuf ans passé en Espagne et "Khalid", une parabole sur le passage à l'âge adulte et l'inégalité des chances dans le monde à travers l'histoire de Khalid un enfant de Marrakech devenu adulte trop tôt et obligé de gagner son pain quotidien comme distributeur d'œufs. 23/01/2012

Source : MAP

Le ministre libyen de l'Intérieur, Fawzi Abdelali, a affirmé mardi que la Libye ne serait pas le garde-frontière de l'Europe, faisant état "de problèmes énormes" en raison de l'affluence de milliers d'immigrants clandestins.

 

"La Libye a besoin de beaucoup de moyens pour contrôler (l'immigration). La Libye ne sera pas le garde-frontière de l'Europe. Même si elle le voulait, elle ne le pourrait pas", a-t-il dit au cours d'une conférence de presse.

 

Le ministre a appelé l'Europe et les pays voisins à l'aide pour faire face aux flux d'immigrés.

 

M. Abdelali a notamment demandé de l'aide pour réhabiliter 19 centres de rétention et pour un système de surveillance des frontières.
L'ancien régime du colonel Mouammar Kadhafi, qui utilisait l'immigration comme moyen de pression sur l'Occident, affirmait aussi que la Libye ne pourrait être le garde-frontière de l'Europe.

 

Il y a un an, il avait réclamé à nouveau cinq milliards d'euros par an à l'UE pour la stopper.

 

Depuis plusieurs années, la Libye est une destination et un pays de transit vers les côtes européennes pour des centaines de milliers d'immigrants africains.

 

24/01/2012
Source : AFPF

 

 

Immigration: la Libye ne sera pas le garde-frontière de l'Europe (ministre)

« Le seul Québec possible est celui de la diversité ». C’est sur cette citation du Premier ministre Jean Charest que Kathleen Weil, ministre québécoise de l’Immigration et des communautés culturelles a choisi de clôturer l’entretien qu’elle a accordé à Atlas.Mtl en ce début d’année 2012; premier exercice d’un plan triennal d’immigration qui devrait mener la Belle province à une performance : accueillir un volume stable de 50 000 nouveaux arrivants par an.

Par ce choix, la ministre réfute l’idée sous-jacente à la toute première question répercutant un sentiment souvent présent chez les communautés culturelles du pays, suggérant que la question de l’immigration peut avoir été instrumentalisée jusqu’à ne plus être qu’un instrument de «politique politicienne» ou un enjeu électoraliste. Auparavant, elle aura également pris soin de relever le fait que, malgré quelques gesticulations médiatiques épisodiques, «les Québécois sont ouverts à l’immigration et saisissent son importance dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et de vieillissement de la population».

Mme Weil, met également à profit cet entretien pour souligner une ligne de démarcation importante entre l’approche québécoise de l’immigration et celles de différents autres pays – on pensera ici notamment à la France et à sa Circulaire Guéant – en faisant état du Programme de l’Expérience Québécoise (PEQ), destiné aux travailleurs temporaires et aux étudiants étrangers.

Mais elle a également le courage d’admettre que «dans l’insertion en emploi (…) il faut redoubler d’efforts et ce, avec le concours des différents employeurs. (…) nous le savons, il n’est pas toujours facile pour un nouvel arrivant de trouver un emploi à la hauteur de ses compétences et de ses ambitions». De même, elle accepte de répondre à une question longtemps esquivée par ceux et celles qui l’ont précédées au MICC ces dernières décennies sur l’évaluation des politiques d’intégration mises en place et annonce la mise en place d’ «un plan pluriannuel d’évaluation qui prévoit des évaluations dont plusieurs concernant les politiques et les programmes d’intégration».

Mme Weil consent ainsi à Atlas.Mtl un entretien dans lequel on va enfin au-delà des clichés et des mots pour atteindre l’essentiel, sans langue de bois, sans faux-fuyants. Le tout avec une sérénité dans les propos qui révèle à la fois une réelle maitrise des dossiers et un souci d’efficience dans le traitement des problèmes; autant d’assurances souvent rares dans la planète Migrations. Entretien.

Atlas.Mtl : Madame la Ministre, à la lumière de votre expérience gouvernementale, n’avez-vous pas l’impression que la question de l’immigration, au lieu d’être abordée comme un enjeu démographique et économique et une assurance sur l’avenir, est plutôt devenue une question de politique politicienne et un enjeu de politique intérieure dans lequel la démagogie, le populisme et l’électoralisme l’emportent sur la raison?

Kathleen Weil : Tout d’abord, vous me permettrez de vous dire, sur une note très personnelle, que l’immigration est une question qui me passionne depuis très longtemps. Toute ma vie, que ce soit au plan personnel ou professionnel, j’ai vu l’apport économique, social et culturel des immigrants à notre société. Aujourd’hui, à titre de ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles, j’ai l’immense chance d’être aux premières loges, comme témoin privilégiée, de la richesse qu’insuffle la diversité à notre société et je suis très heureuse de faire partie d’un gouvernement qui a compris que l’immigration joue un rôle clé dans le développement du Québec. Évidemment que nous retrouvons des personnes préoccupées par des questions d’intégration, notamment en emploi, et de francisation et je peux vous assurer que je suis moi-même très sensible à ces questions. Néanmoins, de récentes études démontrent que les Québécois sont ouverts à l’immigration et saisissent son importance dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et de vieillissement de la population.

Revenons au triennat 2012-2014. Il fixe pour objectif l’accueil de quelques 52 000 nouveaux arrivants par an, choisis en fonction de compétences professionnelles très précises. Que va faire le Québec pour atteindre ces objectifs, sachant que beaucoup d’autres pays en déficit de main d’œuvre et de compétences lui livrent une féroce concurrence, dans les mêmes bassins démographiques, pour le recrutement de candidats à l’émigration?

En fait, nous comptons graduellement stabiliser le volume d’immigration pour atteindre 50 000 nouveaux arrivants en 2015, dont la majorité provient de la catégorie des travailleurs qualifiés. Évidemment, je considère que pour atteindre ces objectifs de volumes importants, nous devons être proactifs sur la scène internationale afin de recruter des compétences dont notre marché de l’emploi a besoin. Comme vous le dites, dans un contexte de mobilité de main d’œuvre et de mondialisation, le Québec se retrouve en concurrence avec plusieurs autres juridictions pour attirer les meilleurs talents. Il faut donc développer des stratégies de prospection et de promotion performantes. Parmi ces actions, nous retrouvons l’intensification des efforts de promotion à l’étranger dans des territoires ciblés, tels la France, le Mexique et le Brésil, la mise sur pied des « journées Québec» en France, la réalisation de missions dans de nouveaux marchés présentant un bon potentiel, la réalisation de campagne promotionnelle de grande envergure sur le Web comme « Vous avez une place au Québec ». Et nous nous n’arrêtons pas là. Même chez nous, nous développons des programmes qui nous permettent de retenir les forces vives qui sont déjà sur le territoire, et je pense notamment au Programme de l’Expérience Québécoise (PEQ), destiné aux travailleurs temporaires et aux étudiants étrangers, qui, après une expérience de travail ou suite à l’obtention d’un diplôme d’un établissement d’éducation Québécois, peuvent demander leur certificat de sélection du Québec grâce à cette voie rapide que nous mettons à leur disposition. Alors, je peux vous assurer que nous sommes bien outillés pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

La meilleure publicité en la matière demeurant un bon niveau d’intégration, en particulier en emploi, le Québec est-il aujourd’hui vraiment une destination concurrentielle?

Les dernières données indiquent que d’ici 2015, 730 000 emplois seront à pourvoir au Québec. Nous avons donc des besoins en main-d’œuvre qualifiée auxquels il faut répondre et l’immigration est appelée à jour un rôle essentiel pour combler ces besoins. Vous savez, mettre à profit l’immigration pour relever le défi que représente cette pénurie de main-d’œuvre est une priorité pour moi. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard que l’on retrouve dans le plan d’immigration 2012-2015, une orientation qui vise à mieux arrimer les compétences des candidats à l’immigration avec les besoins de notre marché du travail. Nous avons des besoins croissants dans des secteurs particuliers comme celui de l’informatique, de la recherche biomédicale, de l’aéronautique et des télécommunications. Étant donné que la rareté de la main-d’œuvre se fait déjà sentir due au vieillissement de la population qui mène à des départs massifs à la retraite, le Québec est toujours une destination concurrentielle en matière d’emploi.

Plus précisément, que considérez-vous comme succès dans les politiques publiques visant à l’intégration et où faut-il faire des efforts supplémentaires ?

Je considère qu’il est important de souligner le pas de géant que nous avons fait en matière de francisation. En effet, depuis que nous sommes au pouvoir, nous avons déployé des efforts supplémentaires dans le but de préserver le fait français au Québec. Que ce soit grâce à une meilleure sélection ou à une formule de francisation plus rapide, plus facile et plus accessible, nos bilans sont satisfaisants. Bien entendu, l’adoption du français comme langue d’usage par les nouveaux arrivants exige un support continu. Par contre, je considère que c’est dans l’insertion en emploi ou il faut redoubler d’efforts et ce, avec le concours des différents employeurs. Comme nous le savons, il n’est pas toujours facile pour un nouvel arrivant de trouver un emploi à la hauteur de ses compétences et de ses ambitions. Cependant, nous avons mis en place d’importants outils aidant à la reconnaissance des compétences et à l’insertion au marché du travail, notamment des ententes avec une trentaine d’ordres professionnels, des programmes de stages, des formations d’appoints, de mentorat et d’accompagnement. Ce qui est important un mes yeux, ce que je considère mon cheval de bataille, c’est l’ouverture des entreprises à la diversité. Cette ouverture est importante pour l’immigrant à la recherche d’emploi mais aussi cruciale pour les entreprises. Plusieurs études, dont celle du « Conference Board » le confirment : les entreprises qui misent sur la diversité sont plus compétitives, car elles comptent parmi leurs équipes des têtes de ponts entre différents marchés, des personnes ayant des cultures et des langues différentes qui amènent des idées innovantes. Je peux vous assurer que j’ai cette question à cœur et que je compte déployer tous les efforts nécessaires afin de relever ce défi!

Comment vous évaluez l’impact des politiques menées en matière d’intégration et leur efficacité ?

Nous estimons qu’il est important d’évaluer correctement l’impact des politiques menées en matière d’intégration. C’est donc pour cela que nous avons mis en place en 2009-2010 un plan pluriannuel d’évaluation qui prévoit des évaluations dont plusieurs concernant les politiques et les programmes d’intégration. Il est à mes yeux importants de connaître les performances des programmes que nous mettons en place. L’évaluation de performance est un outil précieux pour que nos actions et nos projets soient efficaces et répondent aux différents besoins exprimés. Par ailleurs, j’ai un intérêt marqué pour la question et c’est d’ailleurs pour cette raison que je rencontre de temps en temps des chercheurs universitaires afin d’identifier des défis particuliers en intégration. Nous sommes aussi en veille constante de ce qui se passe à travers le monde en matière d’intégration. Mais évidemment, il faut être patient et laisser le temps aux politiques que nous mettons en place de faire effet avant de les évaluer, et c’est peut-être là mon seul problème : je ne suis pas patiente !

Vous savez que les principaux pays émetteurs d’émigration vers le Québec se dotent d’organismes consultatifs chargé de proposer des stratégies et des politiques migratoires. Ces démarches vous interpellent-elles ?

Tout à fait ! Ces organismes consultatifs permettent d’avoir une fine connaissance de leurs diasporas respectives au Québec, leur dynamique et leur composition. D’ailleurs, j’ai eu la chance et l’immense plaisir d’assister au colloque Marocaines d’ici et d’ailleurs du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger, il y a quelques mois, ou j’ai rencontré des membres de votre communauté qui provenaient des quatre coins du monde et qui enrichissaient de leurs expériences les discussions et débats organisés dans le cadre de ce colloque.

Si on vous demandait de résumer cet entretien à trois phrases-clés, quelles seraient ces trois phrases ?

- « Le seul Québec possible est celui de la diversité » – Jean Charest

- L’emploi est au cœur de l’intégration

- La diversité est une valeur ajoutée pour la société.

21/2012, Entretien réalisé par Abdelghani Dades

Source : Atlas.Mtl

Des lois Hortefeux et Besson aux démantèlements de campements illégaux en passant par le discours de Grenoble, le gouvernement n'aura cessé depuis 2007 de faire la chasse aux étrangers en situation irrégulière. Et régulière.

Les étrangers ? Dehors. Le quinquennat Sarkozy, celui du ministère de l'Immigration, aura gravé une ligne dure, toujours plus dure, sur l'immigration, de discours stigmatisants en tour de vis legislatifs, de traque aux Roms au renvoi des jeunes diplômés. Début janvier, le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, se félicitait d'avoir atteint 33 000 expulsions en 2011, un record. 10 000 de plus qu'en 2007.

En cinq ans, les verrous ont sauté les uns après les autres. On est passé de la lutte contre l'immigration illégale à celle contre l'immigration légale, notamment professionnelle. La fameuse immigration choisie versus immigration subie. L'intégration, défendue aux premiers temps du quinquennat comme la face postitive de la médaille, n'est plus épargnée. Les naturalisations, symboles de l'intégration réussie, sont malmenées. Et voilà que même les jeunes diplômés étrangers, sortis de grandes écoles françaises et souhaitant exercer leurs talents en France, se retrouvent dans le collimateur du ministère.

Alors que la Cimade, association de défense des étrangers, publie ce mardi un bilan des politiques publiques en matière d'immigration, retour sur les grandes étapes de cinq ans d'offensives.

2007 (23 200 expulsés)

Mai. C'est Brice Hortefeux, fidèle lieutenant de Sarkozy, qui ouvre les hostilités au nouveau poste de ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement.

20 septembre. Liu Chunlan, une Chinoise clandestine, se défenestre par peur de la police, à Paris. Son cas devient emblématique de la traque aux sans-papiers contre laquelle se mobilise, entre autres, le réseau RESF (Réseau éducation sans frontière).

10 octobre. Ouverture, sans inauguration officielle pour cause de malaise dans les rangs de la droite, de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration.

Automne. La loi sur l'immigration dite «loi Hortefeux» suscite réserves et mobilisation. En cause, notamment, un amendement autorisant le recours aux tests génétiques dans le cadre de la procédure de regroupement familial, et un article sur les statistiques ethniques, finalement censuré par le conseil constitutionnel. La loi est adoptée le 20 novembre.

Fin décembre. Publication du décret créant le fichier Eloi (comme éloignement). Il regroupe les données à caractère personnel (nom, prénom et date de naissance des enfants) relatives aux étrangers en situation irrégulière. Fin 2009, le Conseil d'Etat retoquera deux dispositions du fichier Eloi, le reste du texte est validé.

2008 (29 796 expulsés)

Février. Hortefeux remet sur la table l'idée d'instaurer des quotas annuels de migrants admis à séjourner en France, sur des critères professionnels (listes de métiers) mais aussi de nationalité. La fameuse immigration choisie. Pierre Mazeaud, ex-président du conseil constitutionnel, préside une commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration... à la fois irréalisable et opportuniste, estimera la commission en juillet.

Hortefeux rebondira en adaptant son vocabulaire : on ne parle plus de quotas mais d'«objectifs chiffrés» fixés dans un projet de loi-programme pluriannuelle 2009-2012.

15 avril. Des travailleurs sans papiers entament une série de grèves pour réclamer leur régularisation, notamment en Ile-de-France. Sarkozy exclut toute «régularisation massive».

1er juillet. Fin de la période transitoire pour les ressortissants communautaires de l'est de l'Europe. Roumains et Bulgares sont donc libres de circuler... en théorie. Car, pour rester en France, ils doivent encore solliciter une autorisation de travail, sans que la situation de l'emploi ne puisse leur être opposée, et sont soumis à une liste des 150 métiers «en tension».

Août. Remous autour des centres de rétention, où sont placés les étrangers suspectés d'être clandestins. Jusque-là, seule la Cimade avait accès à ces centres pour assister les retenus. Le gouvernement veut ouvrir cette mission à d'autres associations. La Cimade y voit une mesure de rétorsion contre sa trop grande liberté de parole.

30 octobre. Un décret impose l'apprentissage du français et un test de connaissance des «valeurs de la République» dans le pays d'origine pour les candidats au regroupement familial et les conjoints de Français.

2009 (29 288 expulsés)

Mars. La sortie du film Welcome vient illustrer la question de l'entraide, dans le collimateur du ministre Besson, nommé le 15 janvier. A-t-on le droit, en France, de faire entrer chez soi un étranger en situation irrégulière pour lui donner à manger, lui permettre de se doucher ou de charger son portable ? Les associations alertent sur la répression croissante qui s’exerce un peu partout à l’encontre de militants, ou de simples citoyens venant en aide aux clandestins.

24 juin. 1 300 sans-papiers sont expulsés par la CGT de la Bourse du travail, dans le IIIe arrondissement de Paris, qu'ils occupaient depuis mai 2008.

Septembre. Lors de l'université d'été de l'UMP, sortie de Brice Hortefeux, alors ministre de l'Intérieur, à propos d'un jeune militant dont le père est algérien : «Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes.» Le ministre s'empêtre dans les dénégations, assurant qu’il ne parlait pas des Arabes mais des Auvergnats. Condamné à 750 euros d'amende devant le tribunal correctionnel en juin 2010, il sera relaxé en appel du délit d'injure raciale. La cour s'est basée sur un motif juridique et a taxé les propos de l'ex-ministre de l'Intérieur de «méprisants» et d'«outrageants».

22 septembre. Evacuation de la jungle de Calais. Opération ultramédiatisée, le démantèlement du campement sauvage où survivaient dans des conditions précaires des exilés Afghans dans l'espoir d'un hypothétique passage en Angleterre a été mené en deux heures par 500 policiers. Sans régler le problème des migrants en France. Calais, le coup d'éclat qui cache la

12 octobre. Plus de 6 800 travailleurs sans papiers se mettent en grève pour défendre leurs droits.

25 octobre. Eric Besson annonce la tenue d'un «grand débat sur les valeurs de l'identité nationale». Dans le plan com, trois mois de débats locaux et un site internet avec «grille de réflexion» et appel à contributions. Dans les faits, trois mois de polémique, de ministres qui prennent soigneusement leurs distances, de débats locaux propices aux dérapages (mention spéciale à Nadine Morano et l'affaire de la casquette). Tout ça pour quelques mesurettes symboliques annoncée à un mois des régionales.

Novembre. Eric Besson part en croisade contre ce qu'il appelle «les mariages gris».

15 décembre. Un charter franco-britannique est organisé pour renvoyer des Afghans en situation irrégulière vers leur pays pourtant en guerre.

2010 (28 000 expulsés)

Février. Devant une administration de plus en plus tatillonne, les doléances de Français nés à l'étranger se multiplient. A chaque renouvellement de leur carte d'identité et, désormais, pour la délivrance d'un passeport biométrique, il leur faut prouver leur nationalité. La colère monte, et la mobilisation s'organise.

18 juin. Au terme d'un bras de fer de plusieurs semaines entre les travailleurs sans-papiers, qui occupent la place de la Bastille à Paris, et le gouvernement, celui-ci lâche du lest en concédant des «ajustements» sur les régularisations.

10 juillet. Des incidents éclatent à Saint-Aignan (Loir-et-Cher) après la mort d’un jeune de la communauté du voyage, tué par un gendarme. Les Roms (qui n'ont rien à voir avec les gens du voyage) deviennent la cible du gouvernement. Nicolas Sarkozy ordonne le démantèlement des campements illégaux roms et l’expulsion des «Roms qui auraient commis des atteintes à l’ordre public ou des fraudes».

30 juillet. En déplacement à Grenoble, Nicolas Sarkozy annonce une batterie de mesures sécuritaires, ciblant les immigrés. Il demande que la nationalité française puisse «être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte» à la vie d'un policier ou gendarme. Filant le cliché de l'immigré fraudeur, il souhaite qu'on évalue les «droits et prestations auxquels ont aujourd'hui accès les étrangers en situation irrégulière».

5 août. Le ministère de l’Intérieur publie une circulaire ordonnant aux préfets que «300 campements ou implantations illicites devront être évacués d’ici trois mois, en priorité ceux des Roms». Le délit de discrimination est si flagrant que l'Europe et même le pape s'en mêlent. Pendant ce temps, coup d'accélérateur sur les évacuations de campements roms... qui se réinstallent un peu plus loin.

Octobre. Un an après le mouvement de grève lancé par les travailleurs sans-papiers, rien n'a bougé. Ils sont toujours en grève.

16 novembre. Sarkozy supprime le ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire. Ses missions sont transférées au ministère de l'Intérieur. Claude Guéant entre en piste.

29 décembre. L'Aide médicale d'Etat, qui permet aux sans-papiers, privés de tous les droits, de se faire soigner, est rabotée.

2011 (32 922 expulsés)

Avril. Claude Guéant annonce qu’il veut réduire l’immigration légale. Visant en particulier l’immigration professionnelle, rendue selon lui inutile en raison de la crise. Et fixe un objectif de 30 000 expulsions dans l’année.

Mai. Flirtant avec le Front national, le ministre se fait une spécialité des déclarations à l'emporte-pièce sur l'immigration. Exemple : «Le quart des étrangers qui ne sont pas d’origine européenne sont au chômage, les deux tiers des échecs scolaires, c’est l’échec d’enfants d’immigrés.» Stigmatisant et surtout faux.

31 mai. Nouvelle cible, les jeunes diplômés étrangers. Claude Guéant et Xavier Bertrand, ministre du Travail, publient une circulaire sur la «maîtrise de l’immigration professionnelle» qui invite à une interprétation restrictive des règles de délivrance des cartes de séjour «salarié» et de changement de statut «étudiant» vers «salarié». La mobilisation s'organise côté étudiants, réunis dans un «Collectif du 31 mai».

16 juin. La loi Besson sur l’immigration est adoptée après un an de débats parlementaires. Les principales mesures (interdiction de retour, recul de l’intervention du juge à 5 jours, augmentation de la durée maximale de rétention à 45 jours, démantèlement du droit au séjour des étrangers malades), sont votées sans véritable opposition.

11 août. Le nombre de métiers en tension ouverts aux étrangers non communautaires est réduit à 14.

Septembre. Claude Guéant focalise sur le «problème de la délinquance roumaine».

Novembre. Durcissement annoncé du droit d'asile, qui serait détourné «à des fins économiques», selon l'Intérieur.

Décembre. Affirmant que «la délinquance étrangère est supérieure à la moyenne enregistrée dans notre pays», Claude Guéant annonce son intention d'élargir le nombre de délits susceptibles d’être assortis d’une interdiction du territoire français. Un retour à la double peine.

24/1/2012,  CORDÉLIA BONAL, MARIE PIQUEMAL

Source : Libération

Un constat d’échec accablant. C’est le bilan que tire La Cimade des politiques menées ces deux dernières années en matière d’immigration dans son état des lieux 2012. Systématisation des contrôles illégaux aux frontières, impossible dialogue avec l’administration, obsession de la fraude ou crise de l’accueil des demandeurs d’asile, les militants de La Cimade témoignent jour après jour des conséquences dramatiques d’une politique uniquement guidée par l’obsession sécuritaire.

Migrations. État des lieux 2012 dévoile ainsi une toute autre réalité que celle illustrée par les chiffres record du ministère de l’Intérieur. Une réalité d’hommes et de femmes sans droits, précarisés, humiliés, stigmatisés, criminalisés, traqués…au nom d’une politique électoraliste qui ne remplit même pas les objectifs qu’elle s’est fixé.

La Cimade rend aujourd’hui public ce bilan global pour montrer qu’il est urgent et possible de mener d’autres politiques d’immigration et d’intégration. À partir de son expérience de terrain et de son analyse des politiques publiques, La Cimade a élaboré 40 propositions pour une politique d’hospitalité. Des propositions concrètes, à court, moyen et long terme, qu'elle invite à mettre en débat. Ainsi, La Cimade a envoyé un courrier aux candidats aux présidentielles en leur demandant de se positionner sur ses propositions. Consulter le rapport.

24/1/2012

Source : Site de la Cimade

Lettre ouverte à Messieurs Abdellatif Maâzouz, Ministre Délégué auprès du Chef du Gouvernement chargé des Marocains résidents à l’étranger; Abdelhamid El Jamri, Président du Comité pour les travailleurs migrants; Driss El Yazami, Président du Conseil National des Droits de l’Homme au Maroc et Président du Conseil de la Communauté Marocaine à l’Etranger.

Messieurs,

L’honneur m’échoit de présenter respectueusement aux hautes autorités que vous représentez la situation de mes frères africains venus des pays au sud Sahara, communément appelés ‘’migrants subsahariens au Maroc’’.

Je suis moi-même migrant camerounais, ayant vécu dix ans au Maroc. Je suis viscéralement attaché à défendre la cause des personnes déplacées*, que ce soit pour des raisons économiques, politiques, sociales, ou climatiques. Notamment, je porte et dénonce régulièrement les injustices que subissent les sub-sahariens dans des forums sociaux, des conférences et débats. Comme vous le savez, les migrants fuient la guerre, des conditions climatiques difficiles ou des situations économiques désastreuses. Quittant l’Afrique subsaharienne, ils souffrent ensuite profondément de la traversée du désert et cherchent finalement un temps de répit au Maroc. Mais dans le royaume, ils sont précarisés, marginalisés et, trop souvent, déshumanisés.

Tous les jours, des subsahariens meurent de vouloir rejoindre l’Europe dans un silence assourdissant et l’indifférence totale des autorités marocaines. Depuis les tragiques évènements de Ceuta et Melilla en octobre 2005 qui ont vu quinze sub-sahariens mourir sous les balles des gardes marocains et espagnols, des organisations d’accompagnement de migrants et de défense des droits humains au Maroc se sont mobilisées pour intenter une action en justice, sans qu’à ce jour n’aient pu être identifiés et condamnés les responsables de ces meurtres. En 2008, une embarcation de fortune a chaviré au large des côtes d’Al Hoceima, faisant plus d’une trentaine de noyés dont des femmes et des enfants, parmi la soixantaine de sub-sahariens présents à bord. Les rescapés ont témoigné de l’implication des gardes marocains dans le naufrage, et pourtant ceux-ci n’ont jamais été inquiétés de quelque manière que ce soit.

Dans ses multiples communiqués, le GADEM (Groupement Anti-raciste d’accompagnement et de Défense des Etrangers et Migrants au Maroc) fait état des violences et de la déshumanisation dont sont victimes les subsahariens dans le pays : en témoigne par exemple cet extrait d’un communiqué datant du 25/10/2011:

« Citant des informations de la MAP, le quotidien Al Massae rapportait dans son édition du 5-6 novembre 2011 le refoulement par les autorités marocaines, le 25 octobre, de 90 personnes et le 3 novembre, de 60 personnes qui tentaient de passer à Sebta (Ceuta) par la mer. Les nombreux témoignages recueillis par le GADEM permettent d'affirmer que leurs interceptions en mer alors qu’ils cherchaient à rejoindre Sebta ont été particulièrement violentes, et dans certains cas, mortelles. Ces opérations ont donné lieu à des violences disproportionnées et à de nombreuses exactions. D’autres événements similaires antérieurs et plus récents retracent le même type de pratiques par les autorités marocaines et/ou espagnoles qui portent une atteinte grave au droit à la vie de ces personnes.

Les 90 personnes refoulées le 25 octobre à la frontière algérienne sont les rescapés d'un naufrage provoqué suite à l'intervention conjointe des forces de sécurité espagnoles et marocaines pour intercepter leur embarcation qui tentait de contourner par la mer le grillage installé sur la côte entre Fnidq et Sebta. Si certains migrants ont réussi à rejoindre le territoire sous contrôle espagnol, 10 à 15 personnes seraient mortes noyées, selon des témoignages concordants.

Le 3 novembre, 74 personnes, ressortissants de différents pays d’Afrique subsaharienne, ont tenté de rejoindre Sebta à la nage. Ils ont été rattrapés par les bateaux de la marine marocaine, alors que des tirs de balles en caoutchouc de la Guardia civil retardaient leur progression et que des civils marocains, apparemment incités par les forces de l’ordre marocaine, leur jetaient des pierres depuis le rivage. Seules 13 personnes ont pu rejoindre les eaux jouxtant Sebta (…).

Les migrants interviewés par le GADEM, accusent des hommes en uniforme qui leur semblaient être des militaires marocains de les avoir frappés et d’avoir enfoncé la tête de certains sous l'eau jusqu'à la limite de la noyade avant de les ramener à terre, où ils les auraient dépouillés de leur argent et téléphones portables.

Après avoir été emmenés dans différents commissariats des environs puis regroupés dans celui de Tetouan, ils ont été transportés en bus vers le commissariats d’Oujda puis finalement refoulés à la frontière avec l'Algérie, à l'exception des 5 personnes, séparées du reste du groupe, car elles auraient été gravement blessées lors de l’opération d’arrestation ».

Et l’horreur ne connait pas de trêve : le 23 décembre, alors que le monde entier s’apprêtait à fêter Noël et la nouvelle année, les personnes migrantes subsahariennes au Maroc étaient une fois de plus victimes d’une chasse à l’homme sans précédent, traquées telles des bêtes sauvages, sans respect de leurs droits et de leur dignité.

La police marocaine (en civil ou en tenue) a en effet multiplié les arrestations de sub-sahariens dans tout le royaume chérifien. Comme toujours, l’opération a débuté dans les quartiers périphériques des grandes métropoles où vivent les migrants et où la police passe le plus souvent à l’action en faisant du porte à porte. Cette fois encore, des centaines de personnes : femmes (dont certaines enceintes), enfants, demandeur d’asiles et réfugiés ont été arrêté comme des criminels. Sans ménagement, ils ont été menottés puis bastonnés. Ce à quoi s’ajoutent l’humiliation et le traumatisme d’une arrestation publique. Ensuite, sans avoir été présentées devant le juge d’instruction (comme le prévoit pourtant la loi), ils ont été directement reconduits à la frontière algérienne où les migrants sont alors victimes du jeu de ping-pong entre les deux pays. Le Maroc les renvoyant en Algérie et l’Algérie les repoussant vers le Maroc… Tout ceci ne serait qu’un jeu s’il n’avait provoqué la mort par épuisement de deux femmes : l’une du Congo Brazzaville enceinte de six mois, l’autre originaire de la République Démocratique du Congo, noyée avec ses deux filles.

Le lundi 16 janvier 2012, l’Association Rif des Droits Humains (ARDH) et l’Association Beni Znassen pour la Culture, le Développement et la Solidarité (ABCDS) ont demandé au Ministre marocain de la Justice et des Libertés et au Conseil National des Droits de l’Homme que soit menée d’urgence une enquête pour faire toute la lumière sur les trop nombreux cas de noyade de migrants, et sur la responsabilité des forces auxiliaires et de la marine royale dans ces évènements tragiques.

Devant l’ampleur du phénomène migratoire, ce ‘’grand défi de notre temps’’, il est désormais indispensable de porter l’attention de tous sur ces laissés-pour-compte qui ont cru pouvoir circuler librement sur Terre, comme le font tous les jours les capitaux internationaux, les richesses africaines et les touristes occidentaux. Est-ce vraiment utopique, pour un Africain, de souhaiter aller et venir librement sur cette terre ? De prendre son destin en main plutôt que d’attendre de recevoir une aide au développement qui ne tient pas ses promesses ?

Pour avoir rêvé de lendemains meilleurs, ces hommes, femmes et enfants, ont quitté leurs pays comme l’ont fait avant eux les Européens en quête de l’Eldorado ou les Marocains cherchant à améliorer leurs conditions de vie à l’étranger. Mais les subsahariens eux, aujourd’hui, sont pourchassés, emprisonnés, assassinés, stigmatisés, déshumanisés et chosifiés (pour exemple, voir l’article du quotidien marocain Al Massae n°1643 du jeudi 5 janvier 2012, rendant les subsahariens responsables de la propagation du virus du sida au Maroc). Et pourtant, pour nombre d’entre nous, le Maroc est plus qu’un pays de transit : certains y élisent domicile, s’y marient, y fondent une famille. Aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, des subsahariens naissent, vivent et meurent au Maroc. Et considèrent les marocains comme des frères. Pourtant, ils éprouvent les pires difficultés à trouver un travail, à scolariser leurs enfants, à se faire soigner. Mais cela apparait-il dans les notes protocolaires adressées en haut-lieu? Il serait souhaitable que les stéréotypes d’image à l’encontre des migrants soient déconstruits et discrédités et, pour cela, que sa Majesté soit informée de la situation réelle des subsahariens vivant au Maroc.

D’ores et déjà, les migrants vivant au Maroc font entendre leurs voix : à l’occasion de la journée culturelle du 16 juillet 2011 à Rabat (dont le mot d’ordre était « Pour un Maroc riche de ses migrants »), ainsi que lors de la Journée Mondiale des Migrants du 18 décembre 2011, les diverses associations et collectifs de migrants ont affirmé leur loyauté au Maroc et leur souhait d’être régularisés. Pour que l’Afrique reste unie et indivisible. Car il est aberrant que les marocains reproduisent avec les subsahariens les erreurs des Européens en considérant les immigrés comme des citoyens de seconde zone. N’ont-ils pas eux-mêmes déjà suffisamment souffert, en Europe, de préjugés et de stigmatisations? Nous pensons que ce grand pays qu’est le Maroc et dont les dignes fils sont aujourd’hui représentants dans les hautes institutions internationales de défense des droits humains, devrait au contraire soutenir la cause de la liberté de circulation et d’installation des personnes sur son territoire. Le Maroc a été le premier à ratifier la Convention sur la protection des travailleurs migrants et de leur famille. Il a aujourd’hui l’occasion de montrer l’exemple en accueillant et en intégrant ces quelques 35.000 migrants sub-sahariens (chiffre communiqué par le Ministère de l’Intérieur).

C’est pourquoi je me permets de vous interpeller. Car, me semble t-il, il est grand temps d’agir pour que cesse l’absurdité de ces politiques migratoires sécuritaires xénophobes qui ne font qu’attiser la haine entre les peuples. L’Homme, qui soit maghrébin, sub-saharien ou européen, doit pouvoir aller et venir librement. C’est là un droit fondamental qui doit être affirmé et défendu, corps et âme.

Messieurs, j’en appelle donc à vos autorités respectives pour que, dès à présent, les migrants subsahariens au Maroc soient traités avec dignité. Pour cela, nous, migrants sub-sahariens, demandons au Maroc de garantir notre protection et de signer la Charte Mondiale des Migrants, proclamée à Gorée en février 2011 et définissant les droit des personnes en déplacement.

En espérant que mon cri d’alarme trouve un écho favorable, je vous prie de croire, Messieurs, à l’expression de mes meilleurs sentiments militant.

25/1/2012, Fabien Didier Yene

Source : Yabiladi

Les étrangers qui mirent pied au Maroc à l’ère coloniale ne furent pas tous des colons. Parmi eux, on trouve des artistes qui, subjugués par la beauté du pays, vont y produire des œuvres remarquables. Ce fut le cas d’Eugène Delacroix, Henri Matisse, Jacques Majorelle et bien d’autres encore. A ce jour, peintres, photographes et autres artisans de la lumière vouent une véritable passion pour le royaume. Gros plan sur ces artistes étrangers dont le Maroc nourrit la créativité…Suite

En janvier 2002, ils avaient pris d'assaut les consulats d'Espagne et d'Italie à Buenos Aires. La monnaie et l'économie argentines, étranglées par la dette extérieure, s'effondraient. Les présidents fuyaient les uns après les autres, chassés par la colère des classes moyennes. Leurs électeurs, ruinés et désespérés, tentaient eux aussi de fuir le cauchemar argentin. Destination, l'Europe.

Fernando Narbon, 45 ans, faisait la queue depuis douze heures, debout, la chemise collée au torse par la sueur, lorsque nous l'avions rencontré devant le consulat espagnol. Ses parents étaient arrivés d'Espagne en Argentine sous le franquisme, "parce qu'ils crevaient la faim", raconta-t-il. Libraire, il avait vu le produit de vingt ans de travail anéanti par la récession, avait vendu ses biens les uns après les autres, puis avait décidé - difficilement, avouait-il - d'émigrer en sens inverse, pour que ses deux enfants, alors âgés de 18 et 15 ans, aient un avenir. "On ne vit plus, expliquait-il. On ne fait plus attention s'il fait nuit ou s'il fait jour."

Dix ans plus tard, peut-être les deux enfants de Fernando Narbon font-ils à leur tour la queue ces jours-ci, devant le consulat d'Argentine à Madrid. Peut-être une nouvelle génération de Narbon, poussés par la crise économique, ont-ils, pour la troisième fois, décidé de retraverser l'Atlantique.

Dans l'avion, ils ne seront pas seuls. Pour être récente, la tendance n'en est pas moins réelle : entre janvier et septembre 2011, l'Espagne a connu une émigration nette de 50 000 personnes, également répartie entre Espagnols et étrangers résidents. C'est une première, un renversement complet de tendance par rapport à l'année précédente, puisque 2010 avait enregistré une immigration nette de 62 000 personnes.

Ce n'est pas un exode massif. Mais il y a une dynamique de départ due à la crise économique et au chômage - 20 % de la population active, 45 % chez les moins de 25 ans -, que les Espagnols affrontent de plein fouet. L'Institut national des statistiques prévoit que l'Espagne perdra un demi-million d'habitants dans la décennie à venir.

Ce scénario n'est pas limité à l'Espagne, bien sûr. Les Portugais voisins quittent aussi la péninsule Ibérique par dizaines de milliers : en 2010, ils ont été 70 000 à émigrer, dont plus de 40 % de femmes, selon des chiffres fournis par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Une destination très prisée des Portugais, outre le Brésil et la Suisse, est l'Angola, une de leurs anciennes colonies.

Après les ravages de la guerre civile, les miracles de l'or noir ont métamorphosé ce pays lusophone. L'Angola est aujourd'hui une économie à forte croissance (+ 12 %), avide de main-d'oeuvre qualifiée. La seule chose qui n'y a pas changé est son président, l'inusable José Eduardo Dos Santos, arrivé au pouvoir en 1979, mais même lui, finalement, semble avoir aussi bénéficié du miracle. Il est, en tout cas, jugé plus fréquentable qu'au siècle dernier. Le premier ministre portugais, Pedro Passos Coelho, ne lui a-t-il pas déclaré, en allant lui rendre visite il y a deux mois, que Lisbonne accueillerait "très favorablement" des investissements angolais dans son programme de privatisations ? Là encore, sur les vols Lisbonne-Luanda, les émigrants portugais ne sont pas seuls : assis à leurs côtés, des immigrés angolais qui ont plié bagage rentrent au pays, désormais capable de leur offrir du travail.

Les Grecs ? Bien sûr, les Grecs ne sont pas les derniers à quitter leur pays livré aux impitoyables recettes de l'austérité. Mais à la grecque : les chiffres, personne ne les a (l'honnêteté nous impose de préciser que nous n'avons pas non plus de chiffres français). Heureusement, les Allemands, eux, sont là pour en fournir quelques-uns. Eloquents : pour les six premiers mois de 2011, l'immigration grecque en Allemagne, première destination des émigrés grecs, comme des Turcs, a quasiment doublé.

De terre d'accueil, l'Europe, continent en crise, devient une terre d'émigration. De pays du tiers-monde, sous-développés, puis en développement, quelques pays - pas tous - en pleine croissance, ont accédé au statut d'économies émergentes et se transforment en véritables pôles mondiaux d'attractivité. C'est le cas de la Chine et du Brésil, qui ont émergé au-dessus des autres. Du monde entier, leurs ressortissants reviennent, séduits par les promesses de la croissance ou envoûtés par les sirènes du patriotisme. Il est des signes qui ne trompent pas : les footballeurs brésiliens, par exemple, ne voient plus l'exil dans un club européen comme un passage inévitable, ou à tout le moins d'une durée plus brève ; le real brésilien s'est apprécié par rapport à la livre sterling et à l'euro, et les rémunérations offertes à présent par les équipes locales sont tout à fait compétitives.

L'Irlande reste, bien sûr, un précieux baromètre de l'orientation des flux migratoires européens. Après la grande famine du XIXe siècle, qui avait diminué de moitié la population de l'île et peuplé les grandes villes américaines, les Irlandais ont connu un flux continu d'émigration, mais pensaient, avec l'euphorie des années 2000, avoir mis un terme définitif à la malédiction de l'exil. Enfin, Dublin et Boston, les deux métropoles irlandaises, allaient pouvoir traiter d'égale à égale ! A son tour terre d'accueil, la République ouvrit même les bras aux Polonais et aux Baltes.

Mais le malheur est revenu, et la crise financière a remis les Irlandais sur le chemin du départ. Depuis 2009, selon l'OCDE, ce pays est lui aussi confronté à une émigration nette.

Le monde à l'envers ? Pas tout à fait. L'originalité de ce spectaculaire basculement est que l'Europe n'est pas pour autant en train de se vider. Non seulement les Polonais rentrent chez eux, attirés par le dynamisme de leur économie, mais l'Allemagne, c'est logique, tire profit de la situation actuelle. Elle a désespérément besoin d'ingénieurs, de médecins et d'infirmières, et les recrute activement dans les pays en crise. En 2011, pour la première fois depuis 2002, la population allemande a augmenté de 50 000 personnes, grâce à l'immigration. Sur 81,8 millions, certes, c'est peu, et la face de l'Allemagne ne s'en trouve pas altérée. "La barrière de la langue, reconnaît Thomas Libeig, expert de l'OCDE, reste un obstacle important."

Les émigrés du sud de l'Europe du XXIe siècle diffèrent de ceux du XXe : leurs grands-parents étaient pauvres, manuels et peu instruits. Eux sont diplômés, intellectuels... et pauvres. Mais à ceux qui ne choisissent pas le nouveau monde, l'Europe unie, au moins, offre plus de mobilité et de souplesse.

25/1/2012, Sylvie Kauffmann

Source : Le Monde

L’Association des travailleurs maghrébins de France, organise un séminaire sur les discriminations envers les personnes âgées immigrées, en vue de lancer une compagne contre les discriminations dont sont victimes les personnes âgées immigrées..Suite

Lors de la déclaration de politique générale devant le Parlement, le chef du gouvernement a tracé cinq axes pour répondre aux attentes de la Communauté marocaine résidant à l’étranger. L’objectif dit-il, est de défendre les droits des MRE, préserver leurs intérêts et renforcer leurs liens avec la mère-patrie. Mais en face des ces orientations, figurent de nombreux problèmes dont la résolution est plus qu’une urgence.

Les Marocains résidant à l’étranger, une priorité pour le nouveau gouvernement ? Affirmatif selon son chef, Abdelilah Benkirane. Lors de son passage devant les députés de la chambre des représentants et des conseillers, le chef du gouvernement a indiqué vouloir renforcer les liens de la communauté marocaine à l’étranger avec leur pays d’origine. Et ce, à travers cinq grands axes que son équipe, en particulier son ministre délégué en charge des Marocains résidant à l’étranger s’attèlera à réaliser durant ce quinquennat.

Des axes…

Le premier axe touche à la religion et la culture. Les programmes d’éducation, d’encadrement religieux et d’enseignement des langues arabe et amazighe seront renforcés et diversifiés. Une réponse, selon Benkirane, aux demandes croissantes des MRE. Autre demande persistante des cinq millions de Marocains résidant à l’étranger, l’amélioration des services administratifs et consulaires dans leurs pays d’accueil. Le chef du gouvernement promet de s’y atteler à travers le renforcement du réseau des centres consulaires, la modernisation de leurs services et de leurs prestations. Le nouveau cabinet espère ainsi parvenir à protéger les droits des Marocains de la diaspora en généralisant la consultation juridique, judiciaire et administrative, la simplification et l'activation des procédures de traitement des plaintes et de règlement des litiges administratifs. Tels sont les grandes orientations contenues dans l’axe deux, qui s’intéresse aux questions administratives et consulaires.

L’axe trois pour sa part, est consacré au volet social. En plus du renforcement des services sociaux au niveau des consulats et des partenariats avec la société civile des pays d’accueil, l’équipe Benkirane entend consolider le dialogue et diversifier les canaux de communication et coopération avec les gouvernements des pays d’accueil. La révision et l’élargissement des accords bilatéraux dans le domaine social sont également prévus.

Sur le plan économique, Benkirane dit vouloir favoriser l’émergence d'une nouvelle génération des investissements des Marocains de l'étranger. La création d’une banque d’investissements est ainsi prévue, de même que la mise en place de mécanismes de motivation, de financement et d’accompagnement. Pour permettre aux expatriés de participer à la vie nationale, Benkirane a en outre promis de réserver des tranches spéciales MRE dans les grands projets nationaux d’habitat. Telles sont les grandes orientations du gouvernement qui dit faire des Marocains résidant à l’étranger une des priorités de son action.

… et des problèmes

En attendant la présentation de la stratégie du nouveau ministre délégué, Abdelatif Maâzouz, il demeure opportun de rappeler qu’en plus de ces grands axes, les MRE sont constamment confrontés à des problèmes dont la résolution demeure une urgence. Les retraités marocains de l’hexagone continuent de subir les excès des services sociaux français.

La récente saisie des bateaux de la Comarit au port de Sète n’était que la face visible de l’iceberg des tracasseries liées au transport maritime. Si son prédécesseur, Mohamed Ameur, s’était déclaré impuissant pour mettre fin à la politique d’entente sur les prix appliqués par les transporteurs maritimes (notamment espagnols), Maâzouz doit se montrer beaucoup plus fort pour résoudre cette lancinante question. Les MRE réclament également des efforts de la part des autorités pour leur faciliter leurs transactions. Leurs transferts annuels dépassent les 50 milliards de dirhams.

23/1/2012, Oumar Baldé

Source : Yabiladi

Quarante-quatre réseaux criminels spécialisés dans le trafic d'êtres humains ont été démantelés l'année dernière en Catalogne (nord-est de l'Espagne), a annoncé, lundi à Barcelone, le directeur général de la Police nationale espagnole, Ignacio Cosido.

Durant la même période, 1.200 personnes ont été interpellées pour falsification de documents, embauche de sans-papiers et exploitation sexuelle des immigrées, a ajouté M. Cosido, qui intervenait lors de la cérémonie d'installation du nouveau chef de la Police espagnole en Catalogne.

La Catalogne se trouve "en première ligne dans la lutte contre l'immigration illégale et le trafic d'êtres humains", qui constitue l'un des "principaux défis" pour cette région autonome, a souligné M. Cosido, précisant que 600 immigrés clandestins, de diverses nationalités, ont été refoulés en 2011 à leur arrivée à l'aéroport de Barcelone, considéré comme l'un des principaux points d'entrée des étrangers en Espagne, aux cotés de celui de Madrid.

Selon lui, la Police espagnole a détecté, durant la même période, la présence de 65 réseaux du crime organisé en Catalogne, dont plus de 70 pc ont été démantelés.

M. Cosido a, dans ce sens, appelé à l'intensification de la coopération entre les différents services de sécurité, se disant convaincu qu'"aucun corps de sécurité de peut à lui-seul faire face à la menace" que représentent les réseaux du crime organisé aussi bien pour la Catalogne que pour l'ensemble du territoire espagnol.

23/01/2012

Source : MAP

Les Maghrébins vivant en France, et surtout les femmes, souffrent plus du diabète que la population d'origine française, selon un rapport qui vient d'être publié par l'Institut de Veille sanitaire français (InVS).

Selon l'étude, la prévalence du diabète est estimée à 7,5 pc chez les personnes âgées de 45 ans et plus originaires de France, alors qu'elle grimpe à 14 pc chez les populations originaires d'un pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) et résidant en France.
Ces différences étaient davantage marquées chez les femmes (16,6 pc contre 6,5 pc) que chez les hommes (12,1 pc contre 8,6 pc), selon les données de l'enquête décennale portant sur un échantillon de plus de 35.000 personnes résidant en France métropolitaine.
Le rapport souligne que les femmes maghrébines vivant en France métropolitaine présentaient en effet "un risque de diabète 2,5 fois plus élevé que les femmes originaires de France".

Selon les chercheurs, "le niveau d'études plus modeste chez les femmes d'origine maghrébine peut expliquer en partie cette prévalence élevée".

Par ailleurs et paradoxalement, l'obésité (facteur de risque) est moins répandue parmi la population diabétique d'origine maghrébine (hommes et femmes), par rapport à la population diabétique d'origine française.

Les experts suggèrent en conséquence "une influence génétique plus forte ou une forme différente de diabète : les personnes d'origine maghrébine auraient un risque plus élevé de développer un diabète à un niveau de corpulence plus faible par rapport à la population d'origine française".

Toutefois, concluent-ils, le diabète de type 2 (le plus fréquent qui touche surtout les adultes) résulte d'interactions entre génétique et environnement, et cette interaction semble plus forte chez les femmes que chez les hommes d'origine maghrébine.
Les résultats de ce rapport corroborent ceux d'une étude de l'Institut national des études démographiques français (INED) publiée en 1995, qui avait fait état d'une surmortalité due au diabète chez les femmes marocaines résidant en France durant la période allant de 1979 à 1991, avec un risque de 2,49 fois supérieur à la moyenne française.

Par ailleurs, l'équipe de chercheurs de l'InVS a étudié l'état de santé et la qualité des soins des personnes diabétiques d'origine maghrébine à travers les données de l'enquête Entred 2007 et a constaté un "contrôle glycémique souvent médiocre et des complications ophtalmologiques fréquentes chez les personnes originaires d'un pays du Maghreb".

Les chercheurs affirment également que "les personnes diabétiques originaires d'un pays du Maghreb avaient un recours moins fréquent aux médecins généralistes mais un taux d'hospitalisation (quel que soit le motif) identique à celui des personnes originaires de France".

L'étude conclut que "l'impact important du pays d'origine (Maghreb), en particulier sur la prévalence du diabète chez les femmes et sur la prise en charge médicale du diabète dans les deux sexes, doit être pris en compte dans les campagnes de prévention".
Les chercheurs recommandent de mettre à profit les campagnes de prévention primaire du diabète (lutte contre l'obésité et la sédentarité dans les populations défavorisées) pour sensibiliser les professionnels de santé qui prennent en charge médicalement les populations originaires du Maghreb, en particulier les médecins généralistes et les médecins hospitaliers.

D'autre part, une éducation thérapeutique prenant en compte les diversités socioculturelles, ainsi qu'un suivi médical approprié, pourraient être proposés à ces populations, compte tenu de leur forte exposition au diabète.

23/01/2012

Source : MAP

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