«Je ne suis ni pour, ni contre l'immigration clandestine» »
«Andalousie mon amour» est le premier long métrage du réalisateur Mohammed Nadif. Une comédie noire, légère, donnant une vision originale de l'immigration clandestine, un sujet épineux récurrent dans le cinéma marocain. Un film où le réalisateur cumule à la fois, la casquette de réalisateur et d'acteur. Interview.
Le Matin : Parlez-nous de votre premier long métrage «Andalousie mon amour» ?
C'est l'histoire de deux jeunes Casablancais, Said et Amine, qui essayent de traverser le détroit clandestinement à bord d'une barque, avec l'aide d'un instituteur.
J'avais beaucoup d'appréhension par rapport à la sortie de ce film, mais il a enregistré un accueil favorable lors de sa sortie à Marrakech à l'occasion du FIFM, à Oran et pour l'avant-première au Lynx qui s'est très bien déroulée. D'ailleurs, j'en suis agréablement surpris !
Comment s'est passé le casting pour ce film ?
C'est un film où il y a plusieurs rôles importants. On y verra la participation de Youssef Britel, Mehdi Ouazzani, Asmâa EL Hadrami, Mohamed Choubi, Ali Esmili, Hicham Mesbah, Rachid Mountassir, Yasmina Bennani, Paulin F. Fodououp, Mohamed Ourradi, Khouloud Bettioui, Farid Regragui, et Zakaria Atifi. Une palette de comédiens venant de tous les horizons (Algérie, Cameroun et Maroc) pour renforcer la crédibilité de ce film.
Avez-vous eu des problèmes par rapport au budget et à la distribution ?
Au début, j'ai pris le risque de faire ce film avec un petit budget puisque j'étais son producteur. J'ai donc démarré le projet avec l'avance sur recettes accordée par le CCM (Centre cinématographique marocain) et l'apport de ma boîte de production. Ensuite, j'ai reçu l'aide d'autres organismes et grosso modo le budget pour ce film s'élève à environ 6 millions de dirhams.
Ce qui représente un petit budget aux besoins liés au tournage, les lieux et les décors. Mais l'important est qu'on ait réussi à boucler le film avec les moyens de bord, car j'avais confiance en mon équipe et dans mon projet. Pour le reste, le film sort en salle le 11 janvier qui est un jour férié et c'est tant mieux !
Qu'en est-il du choix du thème de l'immigration clandestine ?
En fait, au début, l'idée est venue du scénariste Omar Saghir puisque c'est lui qui a écrit le scénario du film. J'ai donc lu un premier jet du scénario et j'ai trouvé l'idée géniale ! Par la suite, on a dû travailler dessus pendant presque un an pour le remodeler et tester des pistes. Nous avons donc développé cette idée ensemble en attendant le financement.
Ce film a-t-il été facile à faire ?
Non. Comme c'est mon premier long métrage, il y a déjà le côté économique qui a réduit l'espace de création. En effet, les contraintes économiques poussent à faire la mise en scène autrement. Cela dit, nous avons passé un très bon tournage dans une ambiance des plus agréables. Ce qui représente, à mon sens, 60% du tournage. C'est aussi une question de la forme, c'est-à-dire la façon de faire le film, le traitement de l'image qui fait toute la différence.
Pour vous, est-ce un plaidoyer pour ou contre l'immigration clandestine ?
Ni l'un, ni l'autre. En fait, ce long métrage ne fait que relater des faits qui malheureusement existent dans notre société comme ailleurs. Tout au long du film, je pose des questions : pourquoi ces jeunes traversent? Pourquoi ne pas créer une propre Andalousie chez nous ? D'où vient la faille ? Est-elle politique, religieuse ou peut-être l'enseignement y est pour quelque chose. Ce qui m'intéresse, c'est le fait de raconter une fable rassemblant tous les ingrédients pour faire un bon film.
Y a-t-il un point commun entre les différents personnages du film ?
Non, il n'y en pas. En fait, chaque personnage défend quelque chose, sa propre vision de la réalité. L'un cherche à changer sa situation économique et rêve d'aller de l'autre côté de la Méditerranée. L'autre le suit parce qu'il n'a pas de personnalité. Sans oublier le fameux instituteur qui a aussi son mot à dire. C'est donc une palette de personnages, chacun ayant son mot à dire…
Qu'avez-vous appris en faisant ce film ?
J'ai appris beaucoup de choses de mes collaborateurs, car c'est un échange. Je peux dire que ce film m'a permis de faire des rencontres magnifiques. Une très belle expérience, humainement et professionnellement parlant, très enrichissante pour moi. Elle me permettra d'être mieux armé pour mes prochains films.
Y a-t-il un message derrière ce film ?
Il y en a plusieurs. A mon avis, il y a une multitude de questionnements qui sont posés dans ce film. On peut donc avoir plusieurs points de vue. Le message étant que notre pays a les moyens pour changer les choses, mais il faut avoir la volonté de le faire. Et justement dans ce film, nous parlons de corruption, de trafic de drogue…
Y a-t-il un projet futur sur les rails ?
J'ai déjà une idée en traitement. Ce sera un drame avec quelques ouvertures comiques. Des scènes dramatiques qui font rire et tout cela tournera autour de la dépression. Un thème que je trouve d'actualité. J'espère que le scénario sera prêt fin 2012, début 2013. En attendant, je prends mon temps pour le faire.
Synopsis
Saïd et Amine, deux jeunes étudiants de Casablanca, rêvent d'Europe. Ils se retrouvent dans un petit village au nord du Maroc. Avec l'aide de l'instituteur, ils prennent une barque pour la côte européenne. Mais ils font naufrage. La mer rejette Amine sur la côte du village. Saïd échoue sur une plage espagnole. Mais l'Andalousie semble étrange à Saïd. Et Amine, dans le village marocain, observe d'étranges phénomènes...
9/1/2012, Afaf Sakhi
Source : Le Matin