Beaucoup de Libyens en sont persuadés : les immigrés subsahariens présents sur le sol depuis des années ont pour la plupart bénéficié du régime de l'ex-leader libyen. De fait, ils font partie des victimes de cette guerre avec de nombreux Noirs prisonniers accusés par les ex-rebelles d'avoir agi comme mercenaires. Leur quotidien dans la capitale est devenu très difficile.
Dans la vieille ville de Tripoli, ils se faisaient discrets lors de la libération en août dernier. Et pour cause, la couleur de leur peau leur valait toutes les récriminations des Libyens qui les accusaient d'être des mercenaires à la solde de Mouammar Kadhafi, voire des privilégiés de son régime.
Mohamed, jeune nigérien, arrivé il y a deux ans, qui a fait les frais de ce racisme larvé en a un souvenir douloureux :
« Des types armés sont entrés chez moi. Ils m'ont demandé où j'avais mis mes armes. je leur ai répondu que je n'en avais pas. Ensuite, ils ont fouillé la maison. lls n'ont rien trouvé et m'ont alors demandé où était mon argent. Quand je leur ai dit que je n'en avais pas. Ils m'ont attaqué au couteau au niveau des jambes. Quand j'aurais mis assez d'argent de côté, je vous assure que je m'en irai ».
Certains travailleurs journaliers, parmi lesquels quelques dizaines qui attendent au petit matin près du pont de Gargaresh, à Tripoli, pensent de la même façon. Sunny a 29 ans, il aimerait rentrer au Nigeria :
« Je vais rentrer chez moi, peut-être quand tout rentrera dans l'ordre. Car nous avons peur de cette guerre. Nous ne sommes pas venus faire la guerre comme les Libyens le pensent. Nous sommes venus pour travailler. »
Dans la conscience de certains Libyens, l'idée que les immigrés venus d'Afrique subsaharienne ne devraient pas bénéficier de la même complaisance que sous le régime de Kadhafi, s'impose :
« Ces Africains-là ne nous laissent pas travailler ! Nous sommes des travailleurs nous aussi. On sait peindre, faire de la plomberie ! s'indigne un Tripolitain, vous voyez tous ces travailleurs libyens qui attendent ! Les Noirs, vous avez vu ce qu'ils ont fait pendant la guerre. On les a recrutés comme mercenaires à Benghazi, à Misrata, avant d'asséner, sûr de lui, ceux qui ont commis tous ces viols de jeunes filles sont des Africains !»
Tout le ressentiment accumulé durant des années se manifeste désormais au grand jour. Avec la politique d'immigration massive de l'ex-leader libyen, les boucs émissaires sont désormais tout désignés dans la Libye de l'après-Kadhafi.
17/2/2012
Source : RFI
Le quotidien toujours menacé des immigrés subsahariens en Libye
Publié dans Médias et migration
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