jeudi 4 juillet 2024 10:17

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Etudiants étrangers: la circulaire Guéant fait école outre-manche

Alors que la circulaire Guéant fait encore débat en France, Londres réduit à son tour les possibilités pour les étudiants étrangers de travailler au Royaume-Uni à l'issue de leurs études. Dans un contexte de lutte de plus en plus dure contre l’immigration, cette mesure menace l’attractivité des universités britanniques.

La Grande-Bretagne va-t-elle continuer à caracoler dans le peloton de tête des pays attirant le plus d’étudiants étrangers? Sa deuxième place, juste derrière les Etats-Unis, est aujourd’hui menacée.

D’abord pour des raisons internes: depuis aujourd'hui, les étudiants étrangers non européens n’ont plus droit de rester deux ans dans le pays pour travailler sans avoir à demander un visa de travail, comme c’était le cas sous le mesure Tier 1 (ou "Post-study work"). Cette restriction intervient dans le cadre de la politique de plus en plus sévère de lutte contre l’immigration du gouvernement conservateur.

Les étudiants extra-communautaires représentent les 2/3 des demandes de visas. Ainsi 80.000 étudiants étrangers de moins que les années précédentes devraient être admis à poursuivre leurs études au Royaume-Uni lors de la prochaine année universitaire. Aujourd'hui, sur les 369.000 étudiants non britanniques, 262.000 viennent de pays non européens.

Le prétexte? Selon le gouvernement de David Cameron, faire ses études dans les universités et écoles britanniques serait la principale voie empruntée par les candidats à l’immigration.

Barrières physiques et monétaires

L’adoption de ces mesures ne va pas sans poser problèmes : elles vont réduire les ressources non négligeables retirées par les universités de l’accueil d’étudiants étrangers et notamment de ceux en provenance de pays non européens qui paient des frais de scolarité supérieurs.

Ce manque à gagner est d’autant plus problématique que les facs britanniques doivent faire face aux coupes budgétaires décidées par le gouvernement.

Une grande partie d’entre elles ont ainsi été contraintes d'augmenter considérablement les frais déjà élevés de scolarité. Alors qu’une loi votée au parlement en décembre 2010 leur recommandait de les élever de 3.350 livres (4.000 euros) à 6 000 livres (7.300 euros) par an voire exceptionnellement jusqu’à 9 000 livres (11.000 euros), nombre d’établissements ont opté pour cette limite supérieure.

Ils limitent la casse financière, mais se tirent dans le même temps une balle dans le pied en instaurant une barrière financière souvent rédhibitoire pour des étudiants étrangers.

D’autant que la Grande-Bretagne, qui a longtemps surfé sur la demande de formations en langue anglaise pour attirer les étudiants, n’est plus aujourd’hui la seule à proposer des cursus dans la langue de Shakespeare : les pays du Nord, de l’Est, mais aussi la France, se positionnent sur ce créneau.

Un système "trop généreux"

En Inde, où un grand nombre d’étudiants vont étudier dans les universités britanniques, les candidatures pour la rentrée 2012 ont déjà commencé à chuter par rapport aux années précédentes. Sous le programme Tier 1, les étudiants indiens pouvaient commencer à rembourser leur prêt, et amélioraient leurs perspectives d’emploi pour leur retour dans leur pays d'origine grâce à l’expérience acquise au Royaume-Uni.

Mais selon un porte-parole du ministère de l’Intérieur cité par le Times of India,

Ce programme était trop généreux. Il n’y avait aucune restriction et les gens en abusaient".

Alors que les étudiants internationaux rapporteraient plusieurs milliards d’euros par an à l’économie britannique, le ministre de l’immigration Damian Green estime que "la croissance économique et le contrôle de l’immigration ne sont pas incompatibles".

D’autres programmes pour obtenir des visas de travail existent, mais les critères sont particulièrement restrictifs et la plupart des étudiants ne pourront pas répondre aux exigences, notamment financières.

La Chine en profite

Dans les milieux académiques, on ne manque pas de souligner ces contradictions : comment vouloir d’un côté jouer en première division en vantant les mérites des universités britanniques si, par ailleurs, les pouvoirs publics et les établissements eux-mêmes multiplient les barrières tant physiques que monétaires imposées aux candidats ?

La baisse du nombre de visas, tout comme l’augmentation des frais de scolarité, pourraient également menacer des équipes de chercheurs britanniques dans des domaines aussi cruciaux que les biotechnologies, les sciences informatiques ou l’ingénierie dont certaines sont formées, pour l'essentiel, d’étrangers désormais jugés indésirables!

Les universités britanniques, aujourd’hui en première ligne, ne sont d’ailleurs pas les seules à s'inquiéter. Sur le marché mondial des formations, le British Council prévoit ainsi la fin à moyen terme de la prédominance des pays occidentaux.

La Chine, qui a déjà attiré 165.000 étudiants étrangers en 2010, compte en recevoir 500.000 en 2013. Une de leur principale cible : les étudiants africains qui, faute de visas, politiques sécuritaires obligent, voient se fermer les portes des universités anglaises, mais aussi américaines ou françaises.

6/4/2012, Laurence Estival - Clémence Grison

Source : myeurope

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