Le candidat socialiste à l'élection présidentielle en France, M. François Hollande a défendu face au candidat sortant, Nicolas Sarkozy, qui y est hostile, sa proposition d'accorder le droit de vote aux étrangers aux élections locales, donnant l'exemple du Maroc où ce droit a été introduit dans la constitution votée le 1 er juillet dernier.
Au cours du face-à face télévisé de mercredi soir, et dans un échange vif sur la question de l'immigration et de la place de l'Islam en France, Sarkozy a soutenu que ce vote devrait se limiter, comme c'est le cas actuellement, aux ressortissants de l'Union européenne ou dans le cadre de la réciprocité et exclure les autres de peur que les immigrés de confession musulmane établis en France n'imposent leurs pratiques religieuses.
Hollande qui défend cette proposition socialiste qui revient dans le débat depuis 30 ans, a rappelé à son adversaire qu'il était "intellectuellement favorable" en 2008 au vote des étrangers, sans condition de "réciprocité", mais Sarkozy a précisé qu'il y était favorable "sous condition de réciprocité".
Pour lui, la différence entre les communautaires et les non-communautaires, c'est la "citoyenneté européenne et la réciprocité". Le socialiste Hollande a rebondi, lui lançant : "Je rappelle qu'un pays comme le Maroc accorde la réciprocité pour le droit de vote aux élections locales. Votre argument ne peut pas tenir".
La nouvelle constitution marocaine stipule dans son article 30 que "les étrangers jouissent des libertés fondamentales reconnues aux citoyennes et citoyens marocains, conformément à la loi. Ceux d'entre eux qui résident au Maroc peuvent participer aux élections locales en vertu de la loi, de l'application de conventions internationales ou de pratiques de réciprocité " avec d'autres pays.
Le président-sortant qui a fait campagne en reprenant largement des thèmes chers à l'extrême droite (sécurité, immigration, viande halal) dont il convoite les voix pour se faire réélire, a soutenu qu'il était "irresponsable de proposer un vote communautariste".
Dans son argumentaire, Sarkozy a soutenu que ce droit de vote des étrangers aux élections municipales profitera "davantage à une communauté d'Afrique du nord et d'Afrique subsaharienne" et en premier lieu aux communautés "algérienne, tunisienne et marocaine" de " confession musulmane" qui dominent fortement l'immigration en France.
Selon lui, il ya une montée "extravagante" des tensions communautaires en France. Aussi, a-t-il rétorqué à son adversaire, "si vous donnez le droit de vote aux immigrés (...) pour les municipales, il y aura des revendications identitaires et communautaires: des horaires différenciés pour les femmes et les hommes dans les piscines, des menus différenciés dans les cantines municipales, des médecins différenciés pour les hommes et les femmes dans l'hôpital", en référence à des cas isolés.
François Hollande a rejeté ce scénario, assurant que les immigrés qui "viennent du Maghreb et d'Afrique, qui peuvent être musulmans ou pas musulmans, pratiquants ou pas pratiquants, ne conçoivent forcément pas la participation aux élections locales comme un instrument de pression religieuse".
"Il y a des musulmans en France, citoyens français, qui ne font pas de revendications communautaires à ce que je sache, donc pourquoi il y en aurait à l'occasion des élections municipales, pour des étrangers qui sont là depuis des années?", a-t-il demandé à son adversaire.
Mais pour Sarkozy, "le problème dans nos quartiers vient de l'absolue nécessité d'avoir un islam de France et non pas un islam en France. C'est bien là que se trouve le problème et pas ailleurs, refuser de le considérer c'est refuser de voir la réalité".
En cas de victoire, le candidat socialiste cherchera un large consensus pour mettre en Âœuvre le droit de vote des étrangers."Pour faire passer cette réforme, il nous faudra avoir une majorité des 3/5e c'est une révision de la Constitution, je soumettrai donc cette proposition au Parlement". Si la réforme ne passe, "ce sera au peuple français de pouvoir en décider", par voie de référendum, a-t-il affirmé.
Mais au-delà de cette divergence de fond, Hollande qui a été accusé à tort par la droite d'avoir le soutien des mosquées de France, s'est montré ferme et sans concession pour les aspirations communautaires des musulmans.
Il n'admettra, en cas d'élection, "aucune dérogation" en matière de laïcité. "Rien ne sera toléré". "Il n'y a aucun horaire de piscine qui sera toléré s'il fait la distinction entre les hommes et les femmes", "ni présence de viande halal" dans les cantines scolaires, a-t-il promis avant d'affirmer qu'il ne remettra pas en cause la loi Sarkozy contre le port de la Burqa.
03 mai 2012
Source : MAP