La décision du gouvernement fédéral de donner plus de pouvoir aux employeurs dans le choix des travailleurs étrangers qui pourront s'établir au Canada ouvre la porte à de possibles fraudes.Le ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme, Jason Kenney, multiplie les annonces au sujet de sa réforme de l'immigration. Le ministre veut permettre aux employeurs de recruter les immigrants qu'il leur faut pour combler, par exemple, la pénurie de travailleurs de métiers dans l'Ouest canadien.
À l'heure actuelle, un étranger accroît ses chances de s'établir au pays s'il a une offre d'emploi en main. Jason Kenney entend privilégier davantage ceux qui détiennent de telles offres d'emploi réservées (OER).
Pourtant, une évaluation interne de Citoyenneté et Immigration Canada fait état d'offres d'employeurs inexistants, de postes fictifs et d'offres de complaisance de la part d'amis ou de parents.
Le rapport parle même d'un possible trafic d'offres d'emploi.
Extrait de l'Évaluation du programme des travailleurs qualifiés (fédéral) :[...] les agents des bureaux des visas visités sont extrêmement défavorables à l'utilisation des OER. Selon eux, il est difficile de valider les employeurs et les offres d'emploi à l'étranger, beaucoup d'offres sont frauduleuses [...].
Certains clients iraniens de Negar Achtari, une avocate en droit de l'immigration, ont été joints par une organisation qui leur a demandé jusqu'à 50 000 $ pour une offre d'emploi.
« Quand on parle de vente d'offre réservée, c'est vrai. » — Negar Achtari, avocate en droit de l'immigration
Le président de l'Association québécoise des avocats en droit de l'immigration, Dan Bohbot, croit même que cette situation risque de se détériorer avec les compressions annoncées dans la fonction publique.
« Les ressources allouées justement pour contrer la fraude vont diminuer. » — Dan Bohbot, président, Association québécoise des avocats en droit de l'immigration
La réforme de l'immigration permettra de combler la pénurie de travailleurs de métier dans l'Ouest canadien.
Les experts rencontrés par Radio-Canada se demandent si le pays doit vraiment confier aux employeurs le choix des immigrants.
De son côté, Citoyenneté et Immigration Canada soutient que les immigrants qui ont un emploi réservé à leur arrivée gagnent beaucoup plus d'argent et s'intègrent plus facilement. Quant à la fraude, le ministère promet des mesures pour la réduire.
Des réactions aux Communes
Le dossier a rebondi, lundi après-midi, à la période de questions à la Chambres des communes.
La porte-parole du NPD en matière d'Affaires étrangères, Hélène Laverdière, a apostrophé le ministre Jason Kenney. Elle lui a demandé si « les conservateurs allaient refaire leurs devoirs au lieu d'inciter à la fraude ».
Le ministre a répliqué en soulignant que les immigrants qui obtiennent une offre d'emploi avant leur arrivée touchent un salaire deux fois plus élevé que les autres qui n'ont pas d'offres préalables.
Jason Kenney a répété que son gouvernement continuera à lutter contre la fraude envers les immigrants.
14/5/2012
Source : Radio Canada