L'immigration reste à l'Intérieur, au moins jusqu'aux législatives
Le ministère de l’Intérieur garde pour l’instant la haute main sur la politique de l’immigration, une réforme emblématique du mandat de Nicolas Sarkozy dénoncée en son temps par les socialistes et les ONG de défense des étrangers qui espèrent un changement après les législatives en juin.
«L’immigration reste à l’Intérieur», a indiqué à l’AFP l’entourage du nouveau ministre Manuel Valls, adepte d’une gauche moderne et décomplexée, d’origine catalane et naturalisé français à 20 ans.
Lorsque la politique de l’immigration est entrée complètement Place Beauvau à la suite d’un remaniement du gouvernement de François Fillon en novembre 2009, le PS s’en était indigné. Au même titre que les associations.
En rattachant l’Immigration à l’Intérieur, le gouvernement «fait un lien entre immigration et insécurité», avait alors dénoncé auprès de l’AFP la députée Sandrine Mazetier, spécialiste de la question qui n’a pas souhaité réagir jeudi.
Les associations regrettent cette décision
«On aurait pu imaginer une rupture avec cette réforme symbolique de Nicolas Sarkozy mais ce n’est pas le cas», remarquait jeudi Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés (Gisti). «On constate que la conception policière (de l’immigration) reste imprimée dans ce choix» de François Hollande, ajoutait-il.
«Le compte n’y est pas», a regretté France Terre d’Asile (FTA) qui a salué la victoire du socialiste le 6 mai. Son président, Pierre Henry, se dit désormais «dans une position d’attente jusqu’aux élections législatives».
«Pas d’impatience, attendons les législatives», a insisté M. Henry, estimant qu’«une rupture symbolique doit s’opérer» avec la conception de Nicolas Sarkozy car «les questions de l’asile et de l’intégration ne peuvent pas relever de la logique de sécurité».
Autre association de défense des étrangers, la Cimade avait appelé juste après la victoire de M. Hollande à une rupture avec «l’approche sécuritaire» de son prédécesseur. Le «premier signe» en serait, selon elle, «de sortir la question de l’immigration de l’Intérieur».
«La gauche doit être très claire»
Au début de son quinquennat, Nicolas Sarkozy avait instauré un «ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire» qui avait été fortement critiqué à cause de l’association «immigration» et «identité nationale».
Jusqu’à cette date, la politique de l’immigration relevait de plusieurs ministères: Affaires étrangères, Emploi et Affaires sociales et Intérieur.
Le maintien de l’immigration dans le giron de Beauvau «ne doit pas être détaché de la nomination de Manuel Valls», incarnation de la droite du PS, a analysé M. Maugendre.
Portée au coeur de la campagne électorale par Nicolas Sarkozy qui a tenté de séduire les électeurs de l’extrême droite, l’immigration a révélé un malaise au sein du PS, partagé entre ceux qui souhaitent «plus de fermeté» et ceux qui «veulent plus d’humanité» vis-à-vis des étrangers.
Son candidat, accusé de «flou», a fini par dévoiler une doctrine démentant le laxisme dont il était soupçonné par la droite. Il s’est prononcé pour le «contrôle des flux» et contre les «régularisations massives», promettant que les étrangers non régularisés «ont vocation à être reconduits» dans leur pays d’origine.
Cette position a été exprimée sans ambiguïté par Manuel Valls quand, il y a un an, son prédécesseur a expulsé des centaines de Tunisiens arrivés en France après la chute du dictateur Ben Ali.
«Les migrants qui sont en situation irrégulière n’ont pas vocation à rester sur le sol français. Je pense que la gauche doit être très claire sur cette question», avait approuvé M. Valls.
17/5/2012
Source : Libération/AFP