jeudi 4 juillet 2024 14:22

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«Les compétences médicales marocaines du monde se mobilisent pour leur pays»

Lorsqu’à la faveur de l’exercice rituel de la photo de groupe, les compétences médicales marocaines du monde entonnent l’hymne national sur la plateforme extérieure de la faculté de médecine de Casablanca, l’émotion est très forte.

Le symbole est significatif au moment où les repères s’effacent, où les mutations s’accélèrent et l’hymne chanté devient témoignage de lien, d’attachement profond au pays d’origine de toutes ces compétences venues de loin. Cardiologues, neurologues, oncologues, gérontologues, psychiatres, chercheurs de différents domaines, experts en qualité sont venus d’Europe (France, Belgique, Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas), d’Amérique du Nord et d’Afrique et ont été accompagnés par le ministre chargé des MRE, Abdellatif Maazouz, le président du Conseil national de l’Ordre des médecins, Moulay Tahar Alaoui, le SG M. Bernoussi, des responsables du secteur public (Directeurs centraux et autres responsables relevant du ministère de la Santé, des CHU de Rabat, Casablanca, Marrakech et Oujda, des universités des mêmes villes) et du secteur privé, industries pharmaceutiques, médecins généralistes, médecins spécialistes, pharmaciens, cadres de l’Institut Pasteur, médecins de l’hôpital Cheikh Zayed…Ce premier forum ayant pour objectifs d’impliquer ces compétences dans le développement du domaine de la santé, de renforcer et consolider les réseaux.
Mais qui sont ces compétences médicales marocaines du monde qui se sont réunies ce 1er juillet à la faculté de médecine de Casablanca ? Des jeunes Marocains et Marocaines qui, en l’espace d’une génération, ont énormément investi la connaissance et les sciences et qui ont très tôt compris que l’éducation était la principale voie d’ascenseur social. En une génération, venus de leurs terroirs, Figuig, Zaio, Nador, Kénitra, Khouribga, Ouarzazate, Taroudant, Meknès, Fès...ils sont devenus aujourd’hui des pourvoyeurs de l’intelligence pour leurs pays d’accueil, mais aussi «travailleurs de la connaissance» dans le nouvel ordre mondialisé, nouveaux acteurs de la coopération internationale. Ils ont acquis, en s’investissant énormément et malgré les mille et une difficultés, leurs droits d’entrée dans les sociétés d’accueil sans pour autant abandonner leur identité. Au moment où la migration devient un révélateur de tensions et de changement, où la circulation, la production, l’usage et l’appropriation des connaissances deviennent un enjeu mondial de pouvoir, ils expriment haut et fort leur existence pour apporter une valeur ajoutée au monde et à leur pays d’origine avec qui ils n’ont cessé d’entretenir des liens comme en témoigne le formidable rush au pays des MRE durant les vacances. Aujourd’hui, au-delà des transferts d’argent, ils veulent contribuer au développement des ressources humaines de leur pays.
«Du Brain Drain au Brain Gain»
Le phénomène n’est pas lié au seul Maroc et les expériences des diasporas indienne, chinoise ou celles de l’Amérique Latine montrent que l’on peut assurer le transfert de connaissances, de partout dans le monde. Dans ces exemples on voit à l’œuvre des modes divers de production, de circulation des échanges entre diverses parties du monde, avec des compétences où qu’elles se trouvent. Le concept mécanique du «retour» des politiques migratoires est alors transformé en liens durables avec les compétences MRE. Des liens qui seront d’autant plus durables qu’ils concerneront les régions d’origine de ces compétences ce qui pourrait induire un rôle actif des collectivités locales, des régions et l’intérêt de la coopération décentralisée, c’est ainsi qu’au forum de Casablanca, on aura beaucoup évoqué les premières expériences mises en œuvre dans l’Oriental, à Oujda, Figuig et Bouarfa…
Aujourd’hui ces compétences, et tous le clament très fort, veulent renforcer et promouvoir ces liens pour en faire un outil de développement des pays d’origine qui à leur tour veulent «construire des ponts avec les réseaux» pour soutenir la dynamique actuelle. Ces compétences veulent semer à leur tour ces graines de la connaissance et du savoir dans leur pays d’origine. Ils peuvent à la faveur d’une bonne politique de mobilisation de compétences devenir des acteurs clés pour faire développer leurs pays, faire reculer l’ignorance et faire avancer, grâce à leur interculturalité, le dialogue et la paix dans le monde. Ils sont prêts à améliorer la coopération qui lie leurs deux pays d’origine et d’accueil, prêts à identifier toutes les possibilités de partenariat. Et ces possibilités sont immenses tant le potentiel est grand. Selon une étude du CCEM, «la qualification de compétences couvre variablement autant les profils scientifiques de grandes qualifications, les entrepreneurs, les financiers, les investisseurs ou acteurs associatifs, mais aussi les talents artistiques, sportifs et médicaux. Les données de l’OCDE concernant les résidents d’origine marocaine dans ses pays membres estiment à 14% le pourcentage de travailleurs hautement qualifiés.
Ces mutations vont de pair avec un processus historique inédit, fait d’enracinement durable des migrants marocains et de leurs familles que révèle par exemple le fort taux de naturalisations et de maintien, par-delà les générations, d’un fort sentiment d’attachement au pays d’origine. Leur émergence à travers le monde se mesure par un niveau croissant des taux de qualification de Marocains dans les universités européennes et américaines, un nomadisme persistant des scientifiques et de cadres hautement qualifiés, ainsi que l’émergence progressive d’une élite socio-économique parmi les générations issues de la migration de travail des années 60-70. Ces potentialités marocaines déployées à travers le monde se trouvent enracinées dans un phénomène de production, de mouvement et d’usage des savoirs au cœur d’une configuration planétaire devenue complexe. Les compétences marocaines du monde, en adéquation avec les exigences des standards internationaux de qualification et diversement expérimentées, ne diluent pas pour autant le sentiment de rattachement au Maroc.
Les possibilités de réétablissement ou de connexions professionnelles avec le Maroc ne sont pas rares. La compétence se réalise ainsi en fonction de la demande, des concurrences, des développements et des intérêts pour des secteurs spécifiques ou pour des ciblages dans des niches de compétences ultra-spécialisées.» Mais comment, dans quelles conditions, avec quels acteurs, en identifiant quelles contraintes et avec quelle stratégie de captation, de reconnexion de ces cadres et de ces ressources humaines. Des pré-requis sont indispensables: il faut savoir qui fait quoi, quelles sont les bases de données disponibles sur les qualifications des migrants, quels sont les réseaux et associations identifiables, en un mot le profil des compétences et les caractéristiques sociologiques qui permettent d’identifier les potentiels existants. La dynamique est amorcée depuis les années 90 avec ces dernières années une forte inflexion vers cette mobilisation de compétences qu’explique Abdellatif Maazouz, ministre en charge des MRE.
Le potentiel de compétences est important, il reste à consolider la confiance pour optimiser ce capital humain dont le Maroc a immensément besoin. Les compétences médicales s’organisent et différentes expériences réussies, comme les deux greffes rénales réalisées à Cheikh Zayed, les opérations de cardiologie d’Oujda ou les sessions de formation dans les CHU et universités témoignent de l’importance de cette dynamique qu’il faut suivre et qui peut aider au renforcement au Maroc des ressources humaines.
Point de vue : Abdellatif Maazouz, ministre en charge des MRE
«Mobilisation des compétences : un pari qui est à notre portée»
Cette rencontre s’inscrit dans un environnement qui se globalise de manière irréversible, nonobstant les perturbations cycliques causées par diverses crises. Le Maroc s’y est engagé: avec l’ouverture de son économie et la mobilité de ses ressources humaines.
Ces choix économiques et sociaux pour le développement sont maintenant clairs et bien définis et nécessitent l’engagement de tous. C’est dans ce cadre que le ministère chargé des Marocains résidant à l’étranger a, dans le cadre des missions qui lui sont dévolues, mis en place une nouvelle approche pour la mobilisation des compétences nationales expatriées, la valorisation de leur savoir-faire et de leurs expériences professionnelles et l’optimisation de leur rôle, désormais incontournable, dans la dynamique de développement du Maroc.
Pour concrétiser cet engagement, plusieurs mécanismes et dispositifs ont été envisagés, s’appuyant sur des études réalisées afin de mieux localiser notre communauté à l’étranger et cerner son profil, savoir dans quelle mesure elle peut participer à l’effort de développement du pays, mettre en place les différentes modalités pour y parvenir et prévoir les moyens susceptibles de l’y inciter.
Pour le secteur de la santé, quelque 8 000 professionnels marocains expatriés sont disséminés à travers le monde et manifestent une forte volonté, ces dernières années, de participer aux «transferts inverses» au profit du Maroc. Ils l’ont démontré en répondant massivement à l’appel lors de la rencontre de Paris du 25 juin 2011. Si le Maroc est classé au 3e rang mondial avec ses 18,5% en termes de taux de fuite de cerveaux, il est certain que les initiatives de mobilisation des compétences peuvent ralentir cette fuite et, pourquoi pas, l’inverser. C’est le cas avec les projets associant au processus de développement du secteur de la santé du Maroc ses compétences à travers les cinq continents.
La rencontre du 25 juin dernier à Paris nous a donné l’occasion d’identifier les opportunités de partenariats qu’offre le Maroc dans le domaine de la santé. Le moment est venu pour vous, avec les Médecins Marocains du Monde, de mettre à l’œuvre leur expertise et de faire preuve de leur engagement pour le développement de votre mère patrie.
Avec ce forum «Coopération médicale: formation et recherche-qualité et standards», nous attendons des actions concrètes à l’issue de cette rencontre. Les professionnels d’ici et d’ailleurs réunis aujourd’hui en sont largement capables. D’après le portefeuille de projets qui sont présentés durant ces deux jours, on ne peut qu’être fier de l’étendue des domaines où s’activent nos compétences, de leur énergie, de leur créativité et, surtout, de leur désir de bien faire.
Ce capital immatériel, sans cesse renouvelé et enrichi, est générateur de plus-values multiples, aux effets induits innombrables, tant au niveau de l’économique que du social, notamment à travers les transferts d’expertise et de la dissémination des bonnes pratiques et de la bonne gouvernance. Ce que nous entreprenons aujourd’hui a une importance indéniable, non seulement dans le domaine qui nous intéresse, mais à l’échelle de l’ensemble de nos communautés, ici et ailleurs. Les réseaux coalisés et leurs actions agrégées ouvriront des perspectives prometteuses à ceux qui y croient et s’y investissent.
Il ne faut pas croire, parce que certains projets sont de moindre envergure que d’autres, que leurs porteurs ont moins de mérite. Toutes les individualités se fondent dans une valeur collective. Cette valeur est d’autant plus grande que les compétences se proclament de cette expérience au nom d’une communauté tout entière. Notre démarche est fédératrice, enrichissante, stimulante et foncièrement novatrice. Elle nous permet de renouveler les codes de la coopération en la centrant sur l’élément le plus précieux de l’échange, l’humain. Le principal acquis de notre formule de mobilisation des compétences est de consolider le partenariat entre le Maroc et les pays d’accueil à travers la passerelle des talents que nous avons en commun. Tout le monde doit y être gagnant. C’est un pari qui est à notre portée. Des projets sont formulés ainsi que des partenariats pour les mettre en chantier.
La phase qui suit, celle du passage à l’acte, est la plus difficile. Elle est décisive, non seulement pour la survie du projet, mais pour la crédibilité des acteurs, surtout ceux qui prennent le relais, ici au Maroc. C’est pourquoi je me permets de lancer un appel aux professionnels de la santé et à tous les autres intervenants de la partie marocaine pour qu’ils apportent tout l’engagement attendu par nos partenaires expatriés.
Convention
Les services de cardiologie du CHU Ibn Rochd de Casablanca et du CHU Al Farabi d’Oujda ont signé deux conventions avec le service de médecine interne de l’hôpital de Flensburg et le service de chirurgie cardiovasculaire de l’université de Kiel en Allemagne. Ces conventions portent sur l’échange d’expériences, la réalisation d’études scientifiques, l’offre de stages au profit des étudiants et la promotion de la mise à niveau des diplômes médicaux en vue de leurs équivalences réciproques par les institutions compétentes. Certaines offres d’expertise et de formation exposées lors des workshops ont été retenues par les partenaires marocains, dont l’expérience de greffe d’organes initiée avec l’hôpital Cheikh Zayed et une équipe de médecins belges, la proposition de formation à la gestion des catastrophes par une équipe de médecins nantais, la formation continue des médecins relevant des Facultés marocaines, la formation des médecins marocains à l’utilisation de certains équipements médicaux de pointe. À l’issue des travaux de ces deux journées, l’annonce de la création du réseau C3M (Compétences Médicales Marocaines du Monde) a été faite et ses statuts exposés, les responsables du réseau ont à cette occasion dévoilé leur feuille de route au titre des années 2012 et 2013.
3 Juillet 2012 , Farida Moha
Source :  LE MATIN

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