« Couples d'ici, parents d'ailleurs » est un ouvrage de sociologie éclairant les pratiques des jeunes enfants d'immigrés au moment de former un couple. L'étude montre que les références de ces jeunes gens au modèle socio-culturel de leurs parents influencent le moment de leur union, mais peu leur pratiques de couple, une fois mariés.
Comment les enfants d’immigrés composent-ils leur couple ? La question est à l’origine de l’ouvrage « Couples d'ici, parents d'ailleurs », paru en mai, aux Presses universitaires de France (PUF). Les auteurs, Beate Collet, maître de conférences à l'université Paris-Sorbonne, et Emmanuelle Santelli, chargée de recherche au CNRS, se sont intéressés, entre 2005 et 2007, aux enfants d’immigrés venus en France, des pays du Maghreb, de Turquie et d’Afrique sahélienne entre les années 50 et 70. Ils sont en âge, aujourd’hui, de se mettre en couple. « Français de par leur socialisation scolaire, amicale et médiatique, on peut supposer que leur éducation familiale a été marquée par l'univers culturel et religieux de leurs parents », commence l’ouvrage.
Le moment de former un couple, cristallise la confrontation entre les deux modèles « celui des parents, marqués par les valeurs patriarcales et la tradition musulmane de la société d'origine et celui plus individualiste et sécularisé de la société française », explique Le Monde, dans son article du 14 août. « Les processus de transformation culturelle sont plus longs qu'on l'imagine, il faut compter deux générations », constate Beate Collet, pour que la formation du couple de ce groupe de population ne comporte plus aucune différence avec les pratiques de la population française prise dans son ensemble.
61% de couples endogames
Déjà, le choix du conjoint, comme dans la population majoritaire, s’effectue majoritairement librement. Toutefois, 61% des couples sont qualifiés d’endogames et 39% de mixtes. L’endogamie, dans le cadre de la formation d’un couple, est la tendance, pour un individu à choisir son conjoint dans le même groupe socio-culturel que lui. Ici, ils s’agit de ceux qui se marient entre enfants d’immigrés.
La forte proportion de couple « endogames » est, toutefois, difficilement comparable à celle de la population majoritaire, car cette dernière n’est pas confrontée à l’altérité dans la même manière que les enfants d’immigrés. De plus, il n’est pas évident que la tendance à l’endogamie, à se marier « entre soi », baisse d’une génération à une autre, chez les enfants d’immigrés. Plus probablement, les critères qui définissent le groupe social auquel un individu appartient changent d’une génération à l’autre. La propension à se marier avec des gens qui nous ressemblent, n’est donc pas nécessairement plus forte chez les enfants d’immigrés que chez les autres, elle est simplement plus visible parce que les critères de définition du groupe d’appartenance (religion, nationalité) sont plus clairs dans la population majoritaire.
17% cohabitent sans être mariés
Plus concrètement, il y a une réelle spécificité des pratiques des enfants d’immigrés pendant la période de formation du couple. Elle reste influencée, pour la génération étudiée par Beate Collet et Emmanuelle Santelli, par les normes de la société de leurs parents. Les couples des enfants issus de l'immigration ne sont que 17 % à cohabiter sans être mariés, contre 39 % pour les autres. L’importance de l’institution du mariage est telle que seuls 19 % des enfants d'immigrés ont cohabité avant le mariage, contre 48 % pour les autres ménages de la population majoritaire, dont les deux parents sont nés en France.
Avant le mariage, les jeunes ménages gardent leurs relations amoureuses secrètes, notamment les jeunes femmes. Elles ne présentent à leurs parents que l’homme qu’elles veulent épouser. Dans le doute, elles s’abstiennent. Le jour, du mariage, ces jeunes couples combinent mariage civil et mariage religieux, même si, dans les faits, ils ne sont pas très pratiquants. Une attitude qui rappelle également celle des couples de la population majoritaire.
Une fois mariés, leurs pratiques n’ont plus de spécificité. 60% d’entre eux utilisent la contraception, dans les mêmes proportions que la majorité. Enfin, et on le sait plus, ils n'ont pas plus d'enfants que la moyenne des Français. Toutes épouses et mères qu’elles soient, les femmes participent également massivement au marché de l'emploi.
25/8/2012
Source : Yabiladi