dimanche 24 novembre 2024 10:00

Droit de vote des étrangers : Hollande mis au défi

L'exécutif avance à reculons sur un sujet sensible, promesse de campagne du président. François Fillon a, quant à lui, «solennellement» appelé le président à renoncer.

François Hollande se serait bien passé de cette offensive de sa propre majorité, alors qu'il sort à peine d'une séquence de «Hollande bashing» et qu'il a tenté de rassurer, le 16 septembre sur TF1, sur sa détermination à réformer. Dans Le Mondedaté de mardi, 75 députés PS, toutes tendances et générations confondues, ont lancé un appel au président pour qu'il respecte la 50e proposition de son programme: accorder le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales. «Le temps presse, écrivent ces élus. La réforme doit intervenir rapidement, pour que l'on se donne les moyens de l'appliquer lors des prochaines municipales.»

Une promesse de campagne qui ne semble guère réjouir le ministre de l'Intérieur, chargé, le cas échéant, de la finaliser. Aux universités d'été du PS à La Rochelle, fin août, Manuel Valls s'était fait applaudir par les militants en martelant que le droit de vote des étrangers n'était pas une priorité. Dans Le Monde , le premier flic de France répète qu'il ne s'agit pas d'une «revendication forte» de la société. Ni même un «élément d'intégration». Valls souligne surtout le risque d'une «jonction droite-extrême droite sur ce sujet». «Il faut bien évaluer les conséquences d'un référendum, pas seulement en termes de résultats mais aussi de déchirure dans la société française (…). Ce débat risque de provoquer des fractures. Dans un moment de crise, on voit bien comment cela peut être utilisé», met-il en garde.

L'hypothèse d'un référendum proche de zéro

Au sommet de l'État, le sujet embarrasse. Lundi, les voix officielles de l'Élysée se sont d'abord refusées à tout commentaire, renvoyant la patate chaude à… Matignon. «Cet engagement n'est pas une priorité dans l'instant, mais il s'agit d'un engagement du président, il sera donc tenu, concède finalement un conseiller élyséen. Il n'est pas question de reculer, même si tout le monde est conscient de la difficulté de la chose. Quelle que soit la voie choisie in fine, il faudra mener un gros travail politique et pédagogique.»

Dans l'entourage du premier ministre, on temporise: «Pour que cet engagement soit tenu, il faut une majorité des trois cinquièmes au Parlement, est-ce que les conditions sont réunies? Quant à un référendum, peut-il être gagné? Ce n'est pas le sujet majeur des Français, ce n'est pas pour eux une priorité.» Manière diplomatique de dire que cette promesse de campagne n'est pas non plus une priorité… du gouvernement. Certains ne cachent pas qu'elle a de grandes chances d'être enterrée. «L'hypothèse pour que François Hollande fasse un référendum sur ce sujet est proche de zéro», assure un ministre important, proche du président.

Le ministre délégué aux Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, a dû jouer aux pompiers, lundi soir, jurant que l'engagement «sera tenu». Dès 2013, a précisé Cécile Duflot mardi matin sur France Inter. La ministre du Logement en a profité pour tacler Manuel Valls: «Ca fait quelques années que c'est une revendication forte ET un élément puissant d'intégration (...) Maintenant, c'est une évidence pour tout le monde et une fois qu'on aura passé ce cap-là, on s'étonnera de ne pas l'avoir fait plus tôt», a-t-elle assuré.

Les élus PS, eux, n'ont pas l'intention de désarmer. «Ce n'est ni un appel comminatoire, ni un appel pour témoigner, nous voulons dire au président: “Nous sommes prêts!”», indique le député Jérôme Guedj, pour qui Manuel Valls est «dépositaire des engagements du président, comme tout le monde». «Ne pas mettre en œuvre cette promesse serait désastreux», ajoute un signataire. L'UMP s'est aussitôt engouffrée dans la brèche, sommant François Hollande de «clarifier ses intentions» et réclamant un référendum sur le sujet.

François Fillon exhorte le président à renoncer à son projet

L'ancien premier ministre UMP François Fillon a demandé «solennellement» lundi soir au président François Hollande de renoncer à instaurer le droit de vote des étrangers aux élections locales, une de ses promesses de campagne emblématique. Le candidat à la présidence de l'UMP a fait cette déclaration sous des applaudissements nourris lors d'un meeting avec plusieurs centaines de militants à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine.

«Je lui demande d'être à la hauteur de ses fonctions, il est le garant de l'unité nationale, il sait que ce sujet va créer un débat très violent à l'intérieur de notre pays, il sait que c'est un sujet qui va diviser profondément les Français au moment où on n'a pas besoin de se diviser parce que c'est déjà suffisamment difficile comme ça», a ajouté François Fillon. «S'il est à la hauteur de la responsabilité qui lui a été confiée par les Français, même si sa conviction, c'est que les étrangers doivent avoir le droit de vote aux élections locales, il doit retirer ce projet de loi.»

Avant lui, son concurrent à la présidence de l'UMP et actuel secrétaire général du parti, Jean-François Copé, avait sommé le chef de l'État de «clarifier ses intentions» sur le droit de vote des étrangers aux élections locales et, s'il décidait de s'engager dans cette voie, de soumettre «immédiatement à référendum» cette question.

18/9/2012, Solenn de Royer

Source : Le Figaro

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