dimanche 24 novembre 2024 11:46

France/Emploi : le difficile parcours des enfants d'immigrés maghrébins

Faible niveau de qualification, absence de réseaux de relations sociales, discrimination : l'accès à l'emploi reste plus difficile pour les filles et fils d'immigrés africains que pour ceux d'immigrés d'Europe du Sud.

Deux poids, deux mesures pour les jeunes Français issus de l'immigration. Le chemin qui mène à l'emploi un fils ou une fille né en France de père ou de mère nord-africain, ou des deux, demeure bien plus escarpé que celui parcouru par un descendant d'immigré d'Europe du Sud. Avantage aux seconds, dont 82 % - soit autant que de « descendants de natifs de France » -trouvent un emploi cinq ans après leur sortie du système éducatif, contre seulement 61 % pour les premiers, signale l'Insee dans son dernier rapport consacré aux « Immigrés et descendants d'immigrés en France » et publié hier. Près d'un tiers des jeunes issus de l'immigration africaine (29 %) ont dû traverser au moins deux années de chômage avant de décrocher un job. Les « descendants de natifs de France » sont presque trois fois moins nombreux dans ce cas (11 %) et jouissent d'une plus grande sécurité de l'emploi : 74 % finissent par décrocher un CDI cinq ans après leur sortie d'école. C'est 7 points de plus que pour les enfants d'immigrés maghrébins.

Manque de relations sociales

Explication : les descendants d'immigrés d'Afrique ont des parcours de formation plus courts. D'où un niveau de qualification plus faible. Près d'un tiers (30 %) n'ont aucun diplôme, sinon le brevet. C'est deux fois plus que pour les enfants d'immigrés d'Europe du Sud ou de natifs de l'Hexagone. Les 12 % de fils et filles d'immigrés africains qui intègrent l'enseignement supérieur y sont aussi plus souvent en échec. « Ils sont plus souvent titulaires d'un baccalauréat professionnel ou technologique et éprouvent plus de difficultés à réussir dans les filières générales », note l'Insee. Par rapport à leurs condisciples titulaires d'un bac général, « ils sont en décalage et doivent réaliser un effort de rattrapage extrêmement important qui entraîne de nombreux abandons en cours d'année », observe Patrick Simon. Ce chercheur de l'Institut national d'études démographiques (Ined) faisait déjà peu ou prou le même constat en 1992.

Autre facteur défavorable, ces jeunes, le plus souvent issus de milieux ouvriers ou de parents « en retrait du marché du travail », ne bénéficient pas d'un réseau de relations sociales qui peut les aider à trouver un emploi. A l'opposé, « les descendants de Portugais sont en situation d'intégrer le marché du travail dans des segments où leur réseau familial ou communautaire offre un accès plus rapide », poursuit ce socio-démographe.

Les discriminations continuent d'exister, même si elles restent difficiles à apprécier. La prise en compte de certains facteurs, tels que l'origine sociale et le lieu de résidence, « permet d'expliquer 61 % de l'écart entre le taux d'emploi des descendants d'immigrés d'Afrique et celui des descendants de natifs », signale l'Insee. N'ayant pas les réseaux de ces derniers, les jeunes d'origine maghrébine ont beaucoup plus souvent recours à la technique du CV pour décrocher un stage ou un premier emploi. Une démarche qui aurait tendance à les exposer à une sélection par l'origine.

12 millions d'immigrés et d'enfants d'immigrés

Selon le rapport de l'Insee, la France comptait en 2008

5,3 millions d'immigrés (dernier chiffre disponible).

-Un tiers sont nés dans l'Union européenne avec le Portugal comme premier pays d'origine.

-Hors UE, le Maghreb constitue la première région de provenance (29 % du total des immigrés), suivi de l'Asie (14 %) et des autres pays d'Afrique (13 %).

S'y ajoutent 6,7 millions d'enfants d'immigrés :

-Les jeunes de 18 ans et plus ayant deux parents immigrés sont presque aussi nombreux que ceux n'en comptant qu'un : 2,2

millions dans le premier cas, 2,3 millions dans le second.

-La présence de descendants d'immigrés hors UE est inférieur à 2 % dans la moitié ouest de la France.

11/10/2012, Joel Cossardeaux

Source : Les Echos.fr

Google+ Google+