L'occupation du chantier de la mosquée de Poitiers par des militants d'extrême-droite marque une "nouvelle escalade" au sein d'une multiplication récente des actes hostiles à l'islam, a estimé lundi Le Conseil français du culte musulman (CFCM).
"C'est un acte sans précédent dans ce pays", a déclaré lors d'une conférence de presse Mohammed Moussaoui, le président du CFCM, dont la mission est de représenter l'islam en France. "C'est la première fois qu'une mosquée est occupée de cette manière. Nous craignons que ce type d'actes se multiplient."
Samedi matin, plus de 70 manifestants avaient déployé sur le toit de la mosquée de Poitiers une banderole portant la mention "732, Génération identitaire", en référence à l'année où Charles Martel stoppa l'avancée des troupes musulmanes près de Poitiers.
Quatre des manifestants, présentés comme les animateurs du groupe, ont été mis en examen lundi et placés sous contrôle judiciaire lundi, a annoncé le parquet de Poitiers.
Ils doivent répondre d'organisation d'une manifestation publique "n'ayant pas fait l'objet d'une déclaration préalable dans les conditions fixées par la loi" et de "provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée".
Ont également été retenus les chefs d'accusation de "vol et dégradations de biens commis en réunion et portant sur des tapis de prière appartenant à la mosquée".
Ce jeune mouvement proche du Bloc identitaire voulait ainsi protester contre "l'islamisation de la France" et attirer l'attention sur des revendications comme la mise en place d'un référendum national sur l'immigration et la construction de lieux de culte musulmans en France.
Mohammed Moussaoui, qui s'exprimait aux côtés d'Ahmed Jaballah, président de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), a demandé que Génération identitaire soit dissous, en faisant aussi allusion à une vidéo diffusée sur internet par le groupe et présentée comme une "déclaration de guerre" à l'islam.
Parmi les partis politiques, le PS et le PCF ont déjà demandé la dissolution du mouvement d'extrême droite, de même que chez les associations le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP).
"La condamnation est encore en dessous de ce qu'on peut espérer", a déclaré Ahmed Jaballah, chef de file de l'UOIF, proche de l'idéologie des Frères musulmans. "J'aimerais bien que l'islamophobie soit aussi présente dans leurs discours (que) le combat contre le racisme et l'antisémitisme."
Ahmed Jaballah a jugé que la communauté musulmane de Poitiers "qui vit en bon terme avec les autorités religieuses (...) et locales" avait réagi avec "sérénité" à l'incident, en ne prononçant "aucun mot" lors de l'évacuation par la police des occupants de la mosquée.
(Julien Dury à Paris, Claude Canellas à Bordeaux, édité par Yann Le Guernigou et Gilles Trequesser)
22 octobre 2012
Source : REUTERS