jeudi 4 juillet 2024 18:24

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Droit de vote des étrangers, la promesse que la gauche ne parvient pas à tenir

Dans les pas de François Mitterrand, François Hollande a promis d’accorder le droit de vote à tous les étrangers aux élections municipales

Un bénévole du collectif « Votation citoyenne » pose près d'une urne lors d'un référendum organisé par ce même collectif

C’était en 1981 l’une des 110 propositions de François Mitterrand, premier président de gauche élu au suffrage universel direct. Plus précisément, la 80e, prévoyant déjà d’accorder le « droit de vote aux élections municipales après cinq ans de présence sur le territoire français ». Depuis, la gauche a été au pouvoir entre 1981 et 1986, 1988 et 1993 puis 1997 et 2002 sans que jamais cet engagement ne se concrétise.

« J’accorderai le droit de vote aux élections locales aux étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans », a encore promis cette année François Hollande, deuxième président de gauche élu au suffrage universel direct. Pourtant, lors de sa conférence de presse du mardi 13 novembre 2012, le chef de l’État a encore une fois reporté cette promesse.

Quoi qu’il en soit, le député PS Jean-Christophe Cambadélis a revendiqué, mercredi 14 novembre, « plus de 50 000 signatures » pour la pétition qu’il a lancée en faveur du « droit de vote pour tous ». Deux raisons expliquent la difficulté à mettre en œuvre ce changement.

Un référendum délicat

Accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections municipales nécessiterait de modifier la Constitution, qui stipule actuellement que sont électeurs « les nationaux français majeurs des deux sexes ». Depuis la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité de Maastricht, par exception, le droit de vote a toutefois été « accordé aux seuls citoyens de l’Union européenne résidant en France », sous réserve de réciprocité, pour les élections municipales et pour les élections européennes.

La procédure normale de révision constitutionnelle prévoit l’organisation d’un référendum. Or, depuis l’émergence du Front national au milieu des années 1980, François Mitterrand n’a jamais pris le risque politique d’une telle consultation populaire. « Aujourd’hui, ce n’est pas mon intention », a à son tour écarté François Hollande, sans l’exclure totalement d’ici à 2017.

Pas de majorité au Congrès

Le président de la République peut toutefois décider ne pas organiser de référendum mais de soumettre la révision constitutionnelle au Parlement convoqué en Congrès. Dans ce cas, le projet de révision n’est approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, c’est-à-dire 555 parlementaires sur 925. Or, la gauche ne dispose aujourd’hui que de 177 sièges au Sénat et de 344 à l’Assemblée nationale, soit 521 parlementaires au total.

Une majorité pour réviser la Constitution n’est donc possible que si une partie de la droite vote pour ou s’abstient. François Hollande a d’ailleurs indiqué qu’il « ne désespère pas » de pouvoir compter sur des députés ou des sénateurs « classés au centre ou à droite ».

« J’ai dit au gouvernement, aux responsables de groupes parlementaires de travailler pour constituer cette majorité, a-t-il insisté. Quand cette majorité sera constituée, le texte sera présenté. Mais pas avant.» Reste à savoir avec qui, car ce sont deux conceptions de la citoyenneté qui s’opposent, sans complètement recouvrir la séparation entre la droite et la gauche.

Citoyenneté et nationalité

Le discours dominant à gauche vise à permettre à tous ceux qui vivent et participent à la vie économique et sociale d’un territoire de participer aussi à sa vie politique. Dans cette conception, la citoyenneté n’est plus liée à la nationalité, mais au lieu de résidence. Il s’agit donc d’une citoyenneté plurielle, divisible en citoyennetés locales, nationale et européenne. Cette idée cadre bien avec les États fédéraux mais s’accommode mal du modèle français de l’État unitaire, même si l’ouverture du droit de vote aux ressortissants de l’Union européenne a marqué en 1992 une première rupture.

En face, le discours dominant à droite demeure au contraire attaché à la tradition française qui depuis 1795, veut qu’il y ait un lien indissoluble entre droit de vote et nationalité. Pour un étranger résidant en France, le seul moyen de participer à la vie politique est donc d’acquérir la nationalité française par naturalisation.

Enfin, plus récemment, à droite et à l’extrême droite, un nouvel argument, surfant sur la crainte d’une montée de l’islam politique, a surgi : l’éventuelle apparition de listes communautaristes, voire l’élection de maires communautaristes.

14/11/20121, STEPHANE DE SAKUTIN :LAURENT DE BOISSIEU

Source : La Croix/AFP

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