David Cameron l'a rangé un jour dans la catégorie des "barjos, des cinglés et racistes qui ne disent pas leur nom", mais les récents succès de l'UKIP, parti nationaliste britannique, anti-européen et anti-immigration, risquent de placer le Premier ministre en position délicate.
Alors que le Parti conservateur de M. Cameron se débat avec la crise et d'impopulaires mesures d'austérité, le Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni savoure sa récente deuxième place aux législatives partielles dans la circonscription de Rotherham (nord de l'Angleterre).
Avec 21,79% des voix, il est arrivé derrière le Parti travailliste mais devant les formations au pouvoir, conservateurs et libéraux-démocrates finissant respectivement en 5e et 8e positions.
"L'UKIP gagne du terrain", s'est félicité son leader, Nigel Farage, député européen, affirmant incarner désormais "la troisième force" politique du pays.
En 2010, l'UKIP était arrivé quatrième à l'échelle nationale aux législatives, recueillant 3,1% des voix. Il compte douze membres au Parlement européen mais aucun à la Chambre des Communes, la chambre basse du Parlement britannique.
Avec la crise de l'euro qui a conduit une majorité de Britanniques à se prononcer en faveur d'une sortie de leur pays de l'Union européenne, selon de récents sondages, cette formation a une véritable carte à jouer, ce qu'ont bien compris certains responsables du Parti conservateur.
"L'UKIP est dorénavant une menace électorale pour le Parti conservateur", a ainsi écrit le mois dernier, dans un document de travail, Michael Fabricant, l'un des conseillers de David Cameron.
Il n'a pas manqué de rappeler que le Parti nationaliste avait coûté 40 sièges aux conservateurs en 2010 alors qu'il leur en manquait 20 pour obtenir la majorité et se passer d'une coalition avec les libéraux-démocrates.
"Il est temps d'envisager sérieusement si un rapprochement est possible", a-t-il ajouté.
La base d'un tel accord serait l'organisation par David Cameron d'un référendum sur le maintien de la Grande-Bretagne dans l'Union européenne en échange de l'engagement de l'UKIP de ne pas présenter de candidats contre les conservateurs pour des sièges où les Tories disposent d'une faible avance aux élections générales de 2015.
Le Premier ministre s'est contenté pour l'heure d'envisager en termes vagues une telle consultation, en butte aux pressions de membres de son parti.
Il préfère s'en tenir à l'idée qu'un "statu quo" dans les relations entre Londres et l'UE n'est pas acceptable, une position loin de satisfaire le dirigeant de l'UKIP: Nigel Farage a déclaré qu'il ne "pouvait même pas envisager" de s'entendre avec David Cameron.
Il garde en travers de la gorge les sobriquets dont le chef de file des conservateurs avait affublé son parti en 2006.
"Si je croisais son chemin, je traverserai la route pour l'éviter. Il n'y a rien à discuter", a affirmé à l'AFP Nigel Farage. Tout en précisant qu'il accepterait le dialogue avec les conservateurs s'ils avaient un autre chef et s'il avait l'assurance "écrite dans le marbre" de la tenue d'un référendum.
Le professeur John Curtice de l'université de Strathclyde, spécialiste des questions électorales, ne croit pas cependant à l'éventualité d'un accord UKIP-conservateurs, le parti anti-européen redoutant trop que cela obère ses chances de réaliser une percée significative lors des élections européennes de 2014, un scrutin où il réalise ses meilleures performances.
Mais ce débat met en lumière les difficultés que risquent de rencontrer les conservateurs pour s'assurer d'une majorité aux législatives de 2015.
11 déc. 2012
Source : AFP