Elle en parle comme du combat de David contre Goliath. Lilia Garcia fait partie d’une association qui défend les droits des travailleurs auprès des sociétés de nettoyage et s’exprime, à ce titre, sur l’une des plus grosses actions en justice intentées aux Etats-Unis, celle de quelque 2 300 agents d’entretien, la plupart sans papiers, contre les principales chaînes de supermarchés du pays.
Dans “la Bataille des invisibles”, le réalisateur Manuel de Alba, professeur d’université, donne la parole à ces hommes et à ces femmes qui ont lutté pendant cinq ans pour faire valoir leurs droits en Californie, où affluent chaque année des centaines d’immigrés via le Mexique. “Les patrons profitent du fait qu’on est dans la clandestinité, qu’on n’ait pas de papiers, pour nous exploiter encore plus”, dénonce l’un d’eux.
Salaire horaire inférieur à 3 dollars quand le salaire minimum est lui autour de 7 dollars, heures supplémentaires non payées, travail sept jours sur sept à l’exception du 25 décembre : autant d’abus dont se sont rendus coupables les magasins Vons, Albertsons, Ralphs et Safeway. Face à ces géants de l’industrie, des employés particulièrement vulnérables qui souvent ne parlent pas anglais et sont peu informés mais prêts à tout pour garder leur boulot. Sauf ce jour où, à l’appel du syndicat des agents d’entretien, ils ont pour la première fois fait grève. Paralysant Los Angeles pendant près de quatre semaines.
Une grève en forme d’avertissement pour Building One Service Solutions, la plus grande entreprise de nettoyage américaine. Alors que le système fonctionnait encore sans intermédiaire dans les années 1970, celle-ci a peu à peu externalisé en ayant recours à des sous-traitants, notamment deux grosses familles de Zacapala, dans le sud du Mexique. On prête ainsi à l’entrepreneur Alfonso Zapata d’avoir offert un emploi aux Etats-Unis à plus de 2 000 personnes de la région. Le parrain local lance : “Pour ce procès aux Etats-Unis, ils peuvent rayer [son] nom de la liste. Si qui que ce soit parvient à m’inculper je répondrai aux accusations.” Si la class action a été difficile à monter, notamment parce que les plaignants étaient en majorité des clandestins, le procès s’est néanmoins soldé par une victoire pour eux puisqu’ils ont obtenu 22 millions de dollars de dommages et intérêts.
Primé, entre autres, au Festival international de Puebla en 2011, ce documentaire de 52 minutes résonne comme un bel hommage à ces milliers d’invisibles.
Documentaire. Le 20fevrier à 20h45 sur France Ô
20/2/2013, Flore de Bodman
Source : Le Nouvel Observateur