La France «n'est plus un très grand pays d'immigration», estime le gouvernement dans un rapport publié mardi, en amont d'un débat au Parlement qui vise à «sortir des fantasmes» sur les flux migratoires.
Les députés discuteront le 16 avril d'immigration professionnelle et étudiante, avant les sénateurs le 24. Leurs débats ne seront pas suivis d'un vote mais nourriront un projet de loi, attendu à l'été, sur l'immigration.
Le gouvernement souhaite profiter de l'occasion pour «apaiser» un sujet particulièrement inflammable en France. «Il s'agit de dépasser les idées reçues, de sortir des fantasmes avec des données chiffrées», souligne-t-on au ministère de l'Intérieur.
Pour ce faire, le Secrétariat général à l'immigration et à l'intégration (SGII) a rendu public mardi un «document préparatoire au débat» dans lequel il regrette que «la réalité des flux migratoires soit trop souvent méconnue ou présentée à des fins polémiques».
Contrairement à l'entre-deux guerres et à la période des 30 glorieuses, «la France n'est plus un très grand pays d'immigration», souligne notamment le SGII, qui s'intéresse aux étrangers extra communautaires.
«Le solde migratoire global apparaît, du fait de la relative faiblesse des flux entrants, comme modéré en France : 110 000 «entrées - sorties», alors qu'il atteint 200.000 au Royaume-Uni et 400.000 en Espagne et en Italie» ajoute-t-il.
Ce ton tranche avec celui de l'ancien gouvernement: le président Nicolas Sarkozy estimait encore en mai que la France «avait accueilli trop de monde» et qu'il y avait «trop d'étrangers sur notre territoire».
La France n'est surtout pas un grand pays d'immigration économique: sur les 193.000 premiers titres délivrés en 2012, seuls 9% répondaient à un motif professionnel, alors que l'immigration économique représente plus de 20% des flux en Grande-Bretagne, Espagne, Italie ou Canada, note le SGII.
«La politique migratoire française a tenté de favoriser le recrutement de travailleurs qualifiés, sans toutefois connaître d'inflexion majeure», constate le SGII, dressant en filigrane un constat d'échec de la politique «d'immigration choisie» souhaitée par Nicolas Sarkozy, à cause de «la crise» mais aussi d'un cadre trop «complexe et dissuasif».
En revanche, «le nombre d'étudiants admis au séjour en France n'a cessé de croître d'année en année depuis la fin des années 1990», avec une progression des étudiants chinois et des plus diplômés.
En 2011, on comptait 288.500 étudiants étrangers, dont 80% non communautaires, ce qui représente un coût annuel estimé à environ 2 milliards d'euros annuels. Seul un tiers s'installera de manière permanente en France, estime le SGII.
Or, le pacte pour la compétitivité du 6 novembre prévoit de renforcer l'attractivité de la France en accueillant davantage de talents étrangers - professionnels et étudiants.
Sans préjuger «des conclusions que le gouvernement sera amené à tirer du débat parlementaire», le SGII énumère douze leviers d'action pour rationaliser la politique du gouvernement.
Parmi les pistes évoquées: regrouper les titres de séjour pour motif économique (il y en a onze aujourd'hui), alléger la procédure d'autorisation de travail, moduler les taxes versées pour l'embauche d'un étranger à son niveau de qualification...
Pour assurer que l'investissement dans la formation d'étudiants étrangers rapporte à la France sans trop nuire aux pays d'origine, le SGII suggère de s'interroger sur le niveau des frais d'inscription ou encore sur le nombre de redoublement autorisés.
A une semaine du débat, le gouvernement n'avait pas encore fait connaître ses arbitrages sur ces questions mais Manuel Valls pourrait préciser sa position en ouverture des discussions.
9 avril 2013
Source : Libération