Samuel Alberto Centeno Vazquez, un migrant originaire du Honduras, avait été approché par des hommes armés pour travailler avec le cartel des Zetas, alors qu'il longeait les rails qui, au nord du Mexique, mènent à la frontière avec les Etats-Unis.
Les membres du groupe criminel avaient promis à ce jeune homme de 19 ans un salaire de 1.000 dollars par mois, des filles et de la drogue s'il intégrait le cartel.
"Ils voulaient que je travaille avec eux, si vous voyez ce que je veux dire", explique Samuel à l'AFP, près du refuge pour migrants de Huehuetoca, dans l'Etat de Mexico.
On lui avait proposé de participer aux activités criminelles du cartel : meurtres, trafic de drogue, enlèvement et racket.
Les migrants en provenance d'Amérique centrale sont de plus en plus souvent recrutés par les cartels de la drogue, une tendance relativement récente, selon des organisations non gouvernementales.
Alors que l'émigration mexicaine vers les Etats-unis diminue, un nombre grandissant de migrants d'Amérique centrale traversent le Mexique pour trouver aux Etats-Unis une vie meilleure ou pour fuir les violences dans leurs pays.
Quelque 200.000 d'entre eux pénètrent illégalement au Mexique chaque année, selon des estimations du ministère de l'Intérieur. La plupart sont démunis et pour nombre d'entre eux il est difficile de résister aux offres des narcotrafiquants.
"Moi, j'ai dit non, mais d'autres sont partis avec eux", dit Centeno Vazquez.
Pendant des années, les migrants d'Amérique centrale ont été victimes d'enlèvements, de meurtres et de rackets de la part des groupes criminels et ou d'autorités mexicaines corrompues.
Le cartel des Zetas est l'un des plus violents du Mexique et il y contrôle de grandes portions de territoire. Mais son avenir est incertain depuis que son chef, Miguel Angel Trevino, a été arrêté lundi, le deuxième en moins d'un an.
D'autres migrants du refuge de Huehuetoca ont témoigné de leur expérience sous couvert d'anonymat. Ce lieu d'accueil, sorte de campement improvisé, est installé le long des lignes sur lesquelles circulent des trains de marchandises que les migrants prennent en marche au risque d'y perdre un membre, et même parfois leur vie.
"Parfois, les gens intègrent (les groupes criminels) parce qu'ils n'ont pas d'argent. Parfois, ce sont les Zetas qui infiltrent les refuges. Et les autres qu'est-ce qui leur reste, mourir de faim ? Tu ne veux pas mourir", dit un réfugié du Honduras.
Les migrants doivent aussi souvent payer une taxe aux cartels pour avoir le droit de voyager sur le toit du train qui mène à la frontière, selon les organisations d'aide aux migrants.
Certains indiquent qu'actuellement cette taxe se monte à 100 dollars par personne. Des passeurs peuvent faire payer jusqu'à plusieurs milliers de dollars pour une prise en charge complète jusqu'à la frontière américaine.
"Les gens n'ont pas assez d'argent pour payer le voyage et donc le recrutement est devenu un autre moyen de payer ces groupes. Dans la plupart des cas, soit ils vous recrutent, soit ils vous tuent vous, ou un membre de votre famille", explique Nancy Perez, qui dirige l'ONG Sin Fronteras (Sans Frontières).
En août 2010, 72 migrants sans papiers avaient été retrouvés tués dans un ranch l'Etat du Tamaulipas et les Zetas sont soupçonnés d'avoir perpétré ces massacres.
Le seul survivant, originaire d'Equateur, avait raconté que les membres de son groupe avaient été enlevés puis abattus par leurs ravisseurs: les migrants n'étaient pas en mesure de payer et refusaient de travailler pour le cartel.
18 juil 2013, Deborah Bonello
Source : AFP