Au-delà du cas Léonarda, l’association dénonce le fond de la politique de Manuel Valls.
Après dix-huit mois de pouvoir socialiste, les membres du Réseau Education sans frontières (RESF) font un constat amer : rien, ou presque, n’a changé en matière de politique migratoire. Au-delà des cas très médiatisés de Léonarda et de Khatchik, c’est le fond de la politique de Manuel Valls - soutenu par le président de la République - qui leur pose problème.
c’est se foutre du monde, tonne Brigitte Wieser, responsable à Paris. Ce n’est pas ça qui a mis le feu, mais le fait d’expulser une élève en cours de formation.» A ses yeux, «les lois sarkozystes sont toujours appliquées, mais par un gouvernement qui se dit de gauche, et qui les critiquait il y a quelques années».«Cette idée selon laquelle il n’y a qu’une seule voie possible en matière de migrations est irresponsable, abonde son collègue Richard Moyon. Cela obère l’avenir.» Et le responsable de RESF d’imaginer les futurs discours de «messieurs Ciotti ou Copé, quand ils seront devenus ministres d’un gouvernement pain au chocolat» : «Ils auront beau jeu de répéter que, comme le disait très justement Manuel Valls, les Roms sont inassimilables ou que la fin du regroupement familial ne doit pas être taboue.» En clair, avec sa ligne mêlant «fermeté et humanité», le gouvernement ferait le jeu de la droite et de l’extrême droite.
«Il y a évidemment le spectre du Front national derrière tout ça, juge Marie-Pierre Barrière, militante dans la Marne. En période de crise, l’administration ne veut pas donner l’image d’une France accueillante pour les autres.» Brigitte Wieser ne désespère pourtant pas : «L’emballement autour de Léonarda est peut-être dû à un ras-le-bol chez les gens de gauche, notamment après les sorties de Valls sur les Roms.» Gérard Colo, membre du réseau dans le Val-de-Marne, précise : «Le vivier associatif est en train de se retirer du PS. Il y a un sentiment de trahison.»
Vœux. Ce débat «apaisé» sur la politique migratoire, que RESF appelle de ses vœux, n’est pas pour demain. La future loi sur l’immigration a déjà été repoussée deux fois, et rien ne devrait bouger d’ici aux élections municipales, au printemps 2014. En visite officielle à Copenhague, Jean-Marc Ayrault a suggéré de «revenir à l’essentiel» pour mettre «fin à toutes les exploitations politiques et politiciennes» de l’affaire Léonarda.
21/10/2013, Sylvain Mouillard
Source : Libération