mardi 24 décembre 2024 04:45

Immigration : la France se lance dans la chasse aux talents

Le projet de loi sur l'immigration sera en Conseil des ministres le 16 juillet. Il crée un « passeport talent » pour les chercheurs et créateurs d'entreprise.

Après plusieurs faux départs, la future loi sur l'immigration regagne les starting-blocks. Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur, doit présenter le 16 juillet en Conseil des ministres une réforme chère à son prédécesseur, Manuel Valls. Début 2013, ce dernier avait en effet annoncé son lancement imminent. Mais le tumulte médiatique suscité par l'affaire Leonarda avait contraint l'exécutif à lever le pied. L'un des principaux objectifs de cette loi relative au droit des étrangers est, en effet, «  d'attirer les étrangers qui contribuent par leurs compétences, leurs talents, à notre rayonnement, à notre croissance ou à notre compétitivité », comme s'en était expliqué l'ancien locataire de la place Beauvau en tout début d'année.

Les temps et les esprits sont aujourd'hui plus mûrs pour relancer ce projet, dont l'une des dispositions phares porte sur la création d'un « passeport talent », délivré pour une durée de quatre ans aux étrangers à fort potentiel financier et professionnel. L'avant-projet de loi dont « Les Echos » ont eu connaissance en dresse la liste : jeunes diplômés salariés, chercheurs, investisseurs, entrepreneurs et cadres hautement diplômés ou expérimentés, artistes ou sportifs de renommée internationale.

Actuellement, ces différentes catégories d'ayants droit « haut de gamme » rentrent chacune dans une case spécifique correspondant à un type de titre de séjour (carte de profession artistique, etc.). Chaque dispositif accorde les mêmes droits à ses bénéficiaires sans introduire en son sein d'échelle de valeur particulière. Dans sa conception actuelle, le système français d'immigration professionnelle ne permet donc pas de distinguer une élite ou une autre au sein de la petite masse des admis (près de 18.000 en 2011, dernier chiffre connu).

Un vrai progrès pour les chercheurs

Le « passeport talent » change la donne. Il revient en effet à exfiltrer les futurs demandeurs à « haute valeur ajoutée » de ces dispositifs qui subsisteront pour les moins diplômés et les moins fortunés. L'écart de traitement va nettement pencher en faveur des détenteurs du nouveau sésame. Avec lui, les commerçants et les professions libérales les plus chevronnés auront droit à une année de séjour de plus qu'avec la carte « compétences et talents » dont la validité est de trois ans. Un titre institué en 2007 dont le succès est des plus relatifs avec environ 300 bénéficiaires.

Le « passeport talent » représente aussi un véritable bond en avant pour les chercheurs dont la durée de séjour est limitée à an. Il offrirait par ailleurs l'avantage d'être reconductible tous les quatre ans et de ne pas imposer à son détenteur d'attendre l'expiration de sa durée de validité pour demander la carte de résident de 10 ans.

Autre progrès, et pas des moindres, la future loi immigration, que Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, espère voir bouclée au second semestre, ouvre l'entrepreneuriat aux jeunes diplômés hautement qualifiés (niveau master, au minimum). « Actuellement, l'autorisation provisoire de séjour dont ils bénéficient leur facilite l'accès au marché du travail français. Mais elle ne les autorise pas à créer leur entreprise. Cette limitation va sauter », se réjouit Alexandre George, du cabinet Migration Conseil.

La future loi suffira-t-elle pour attirer les meilleurs ? Tout dépendra des décrets d'application à venir et des critères qu'ils contiendront pour la délivrance du « passeport talent ». « S'ils ne sont pas modifiés, on aura seulement changé d'appellation », fait observer cet expert, qui craint l'effet d'annonce. 

24/06/14, Joël Cossardeaux,

Source : Les Echos

 

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