Amnesty International ouvre le feu sur l’Union européenne. Elle l’accuse d’être le responsable de la mort de milliers de migrants qui tentent chaque jour de franchir ses frontières.
L’ONG va même plus loin en estimant que la mort de ces migrants est un choix politique comme en témoignent les politiques de l'UE en matière d'immigration et ses pratiques de contrôle aux frontières destinées à empêcher les réfugiés d'accéder à la procédure d'asile en Europe, ce qui met en danger leur vie. En effet, sur les quatre milliards d'euros affectés aux questions migratoires entre 2007 et 2013, la moitié a servi au contrôle des frontières (1,8 milliard d'euros), et 17% (700 millions euros) seulement à la protection des réfugiés, a révélé un rapport de l’organisation de défense des droits de l’Homme publié mardi dernier.
Des accusations très graves vu que près de 23.000 migrants sont morts noyés dans la Méditerranée depuis 2000 sans parler des centaines de portés disparus. A noter que les six mois de l’année en cours ont enregistré plus de 200 morts. Des réfugiés qui ont de plus en plus de mal à rejoindre l'Europe par voie terrestre et qui prennent de plus en plus souvent les routes maritimes, plus dangereuses, vers la Grèce ou l'Italie.
"L'Espagne a reçu 32 fois plus d'argent pour sécuriser ses frontières, plutôt que pour protéger ses réfugiés. Le problème, c'est que lorsque l'on sécurise de façon aveugle ses propres frontières, on ne protège plus personne, on ne prend plus en compte le caractère individuel des situations de ces migrants, on ne les envisage que comme une masse menaçante contre laquelle il faut réagir", explique Jean François Dubost, responsable du programme réfugiés et migrants, cité par France-info.
Une situation absurde d’autant plus que « près de la moitié des personnes qui essaient de pénétrer irrégulièrement sur le territoire de l'UE fuient des situations de conflit dans des pays comme la Syrie, l'Afghanistan, l'Erythrée ou la Somalie » et que l’Union européenne a le devoir de les accueillir en vertu du droit international d'asile, a précisé le rapport.
Amnesty International a, par ailleurs, dénoncé les politiques européennes visant à créer des « zones tampon » dans des pays voisins tels que la Turquie, le Maroc et la Libye dont l'objectif est de « bloquer les migrants et les réfugiés avant même qu'ils n'atteignent les frontières de l'Europe ». Pis, l’UE est accusée de « fermer les yeux » sur les violations des droits de l'Homme dont sont victimes les migrants comme en attestent les opérations de refoulement immédiat de ceux qui sont parvenus à gagner les frontières européennes. Amnesty International a recensé des cas de renvoi sommaire et en violation du droit d'asile par la Bulgarie et la Grèce, où cette pratique est "très répandue".
L'ONG a cité également le drame de 14 migrants qui avaient perdu la vie en février 2014 au large du préside occupé de Sebta, après avoir été la cible des balles à blanc et des gaz lacrymogènes tirés par les éléments de la Guardia civil.
Que demande donc Amnesty ? Elle exige des pays européens de cesser cette dissuasion aveugle et de mettre en place des visas provisoires pour les demandeurs d’asile depuis un pays de transit pour éviter d'autres drames. L’ONG estime que la mort de ces personnes n’est pas une fatalité comme en témoigne l’exemple de l'Italie, qui, après le drame de Lampedusa en octobre 2013, a mis en place une opération de sauvetage dénommée Mare Nostrum.
11 Juillet 2014, Hassan Bentaleb
Source : Libération