Ces dernières années, l'immigration est devenue difficile à canaliser pour l'Europe. Les conclusions du dernier Conseil européen montre les difficultés à mettre en place une politique commune d'accueil des étrangers.
« Je cherchais s'il y a avait des conclusions autres au sommet, parce que nous avions un peu de mal à penser que le sommet n'avait accouché que des lignes officielles » confie Pierre Henry, Directeur général de France terre d'asile. En d'autres termes, le sommet européen du 27 juin dernier à accoucher d'une souris, n'apportant aucune véritable révolution en termes d'asile et d'immigration. Pourtant, l'Europe fait face à ces difficultés aux frontières depuis des années, le nombre de migrants morts en mer Méditerranée étant même en très forte hausse sur la dernière décennie. Pour le conseil européen, la solution pourrait être d'avoir des « gardes-frontières européens ».
Italie esseulée face à l'immigration irrégulière
Selon les conclusions du sommet : « L'Union ne pourra faire face que si elle dispose d'une politique en matière de migration, d'asile et de frontières efficace et bien gérée, inspirée des principes de solidarité et de partage équitable de responsabilités ». Pourtant, l'Italie, qui voit arriver sur les côtes de ses îles (notamment Lampedusa), a dû mettre en place, seule, l'opération Mare Nostrum permettant de « sauver près de 60 000 migrants » : « cette question ne peut être posée que de manière solidaire à l'intérieur de l'Union Européenne. Nous ne pouvons pas laisser un Etat assumer seul l'arrivée d'un certain nombre de personnes. Sinon nous entrons dans un mode de gestion qui est celui de la patate chaude : les italiens, n'en pouvant plus, laisseront passer un certain nombre de gens dans l'espace de Schengen, ce qui introduira du désordre... » explique Pierre Henry. Pour ce dernier, trois choses seront fondamentales dans l'accueil des migrants : la bonne répartition des demandeurs d'asile entre Etats membres de l'UE, travailler sur les questions de protection des migrants, dont certains relèvent du droit d'asile (réfugiés syriens par exemple) et travailler à la prévention de l'immigration illégale avec les pays sources ou de transit.
Construire avec les nouveaux pays d'accueil
« Les pays de transit (Maroc, Tunisie, Algérie par exemple) sont de plus en plus en train de devenir des pays d'accueil. A partir de là, nous devons co-construire un système de droits, disant comment on entre dans un territoire, comment on en sort, les raisons... » selon le DG de France terre d'asile. Une vraie réflexion pour un travail en commun et pas simplement des « accords migratoires relativement asymétriques » : « Je ne parle pas des accords de réadmissions ou des accords migratoires, il faut une autre vision. Organiser une migration de projets dans l'espace Euro-méditerranéen. Réfléchir ensemble et aider les nouveaux pays d'accueil (Maroc, Algérie, Tunisie) ».
Renforcement de Frontex
Parmi les solutions abordées lors du sommet européen, il était question d'un renforcement de l'agence Frontex (surveillance des frontières) et d'une possible mise en place d'un « système européen de gardes-frontières ». Pas une solution selon Pierre Henry : « L'idée d'avoir un corps de douaniers européens me fait sourire. Pourquoi pas mais ce n'est pas le problème(…) Ce n'est pas ça qui permettra d'avoir une vraie politique commune en terme d'immigration, ni une vision solidaire ». Pour ce dernier, ce serait surtout une mauvaise utilisation des ressources : « Je regrette de voir en permanence les crédits de Frontex augmenter, alors que ceux alloués à l'intégration des ressortissants étrangers sur le territoire européen diminuent ».
L'Union Européenne a du mal à trouver des solutions efficaces et solidaires pour l'accueil des étrangers faisant du Vieux continent une forteresse. Pour Pierre Henry, l'avenir ne s'annonce pas forcément radieux mais il existe des solutions : « Dans les prochaines années, vous allez avoir une dominante sécuritaire qui modifiera la vision que nous pouvons avoir de l'immigration (…) Il faut continuer à penser au développement commun avec le souci de protection des populations ».
lundi 21 juillet 2014, Ferdinand Duhamel
Source : lecourrierdelatlas