Une exposition itinérante sur les Juifs hispanophones au Maroc est ouverte jusqu’au 31 août à l’Institut Cervantes de Casa, avant de déménager à Marrakech.
Les premiers Juifs d’Espagne sont arrivés au Maroc au VIIe siècle. S’ils ne sont plus que 200 aujourd’hui sur les 5 000 Juifs marocains toujours installés dans le royaume, leur nombre se comptait en milliers à une certaine époque. L’exposition « Les Hispano-juifs au Maroc et leurs diasporas » retrace leur histoire et leurs coutumes. Itinérante, elle s’est déjà installée dans plusieurs villes. Elle est en ce moment à l’Institut Cervantes de Casablanca, et ce jusqu’au 31 août.
Un ensemble de photographies provenant d’albums de familles et des documents (titres de séjours, recettes, etc.) sont affichés sur une trentaine de panneaux évoquant (en espagnol) de manière chronologique l’histoire de la communauté. L’objectif est d’évoquer « toute cette partie de l’histoire marocaine que l’on méconnaît », nous explique Verónica Lacassie de l’Institut.
Dans le nord, les premières installations massives
On y apprend que le premier gros contingent est arrivé en 1479, au moment de l’Inquisition, responsable de l’expulsion des Juifs d’Espagne. Parfois maltraités par les musulmans et les chrétiens, certains sont ensuite retournés peu après en Espagne et se sont convertis au catholicisme.
Ils se sont d’abord installés dans les villes de Tetouan, Chaouen, Ksar El Kébir puis de Tanger, Larache et Assilah. Cette communauté a continué à parler espagnol pendant très longtemps. Elle utilisait l’arabe seulement pour les relations commerciales. Aussi, elle a développé la jaquetia, une langue hybride issue de l’espagnol, l’arabe et l’hébreu. L’exposition évoque également les traditions culinaires et de loisirs de la communauté.
Une communauté soumise à la dhimma
Les Hispano-juifs se sont soumis à la dhimma qui leur interdisait notamment de faire du prosélytisme, d’avoir des relations sexuelles avec une musulmane ou de se moquer du Coran. Ladhimma les contraignait également à payer un impôt de soumission, à porter un vêtement différent de celui des musulmans ou à construire des lieux de cultes moins hauts que les lieux de prière musulmans.
L’exposition nous rappelle qu’au début du XXe siècle, les Juifs établis sur le territoire du protectorat espagnol n’étaient pas soumis aux lois antisémites qui frappaient la partie sous protectorat français.
La diaspora, disséminée en Amérique du Sud et en Israël
Les derniers panneaux de l’exposition s’attardent sur la diaspora de cette communauté. L’émigration a commencé au milieu du XVIIIe siècle. Certains sont partis pour Gibraltar, l’Algérie ou, plus loin, le Brésil. Puis à la moitié du XXe siècle, les familles en difficultés financières ont commencé à envoyer leurs enfants au Canada, en Argentine ou au Venezuela.
Alors que beaucoup croient que la diaspora finale (la dernière vague de départs) est le résultat de l’indépendance, elle commence en réalité dès 1948, avec la création de l’Etat d’Israël. Entre 1948 et 1956, 75 000 juifs ont quitté le Maroc, 3 000 étaient hispaniques. La communauté a terminé de s’exiler entre 1956 et 1973. En moins de vingt ans, ses membres sont passés de 30 000 à deux cent.
Exposition à l’Institut Cervantes de Casablanca jusqu’au 31 août et du 12 septembre au 12 octobre à celui de Marrakech.
23/7/2014, Pauline Chambost
Source : Tel Quel