Pour aider les migrants qui tentent d'entrer clandestinement aux Etats-Unis, une association, "Les anges de la frontière", cache des bouteilles d'eau dans les zones désertiques frontalières.
Parmi tous les dangers auxquels ils sont confrontés, les candidats à l'immigration qui tentent le voyage vers les Etats-Unis doivent survivre aux températures brûlantes du désert californien, qui montent jusqu'à 45 degrés.
"Beaucoup meurent de soif en le traversant", explique Enrique Morones, des bouteilles d'eau plein les mains, face au mur situé à la hauteur de Jacumba dans la Vallée Impériale, destiné à empêcher des milliers de Mexicains et de candidats à l'immigration originaires d'Amérique centrale d'entrer aux Etats-Unis.
"Le manque d'eau est la première cause de mortalité pour les 10.000 personnes qui ont péri en traversant illégalement ces zones désertiques, précise cet américano-mexicain né à San Diego, ville de l'extrême sud californien où il a fondé il y a vingt ans l'association les Anges de la frontière.
Une des initiatives promue par l'ONG est de cacher des bidons d'eau dans des buissons des zones frontalières, qui s'étendent des Etats mexicains de Sonora et Basse Californie jusqu'à l'Arizona et la Californie, où un mur sépare les deux pays.
Les volontaires disposent aussi des bouteilles du côté américain de la frontière, une terre aride peuplée de serpents.
"Il faut poser des bouteilles sous ces arbustes" remarque Nelly, une péruvienne qui collabore avec les Anges de la frontière depuis juin, quand a débuté aux Etats-Unis une véritable crise de l'immigration, où les centres de détention et la police de l'immigration sont aujourd'hui débordés par un afflux de sans-papiers.
Depuis octobre, près de 65.000 mineurs non accompagnés sont notamment arrivés près de la frontière, en majorité en provenance d'Amérique centrale d'où ils fuient la pauvreté et la violence.
Au loin, les gardes-frontières patrouillent dans leurs véhicules et surveillent chaque mouvement, aidés par des centaines de caméras, de senseurs et "drones" impossibles à voir à l'oeil nu.
Actes de malveillance
Ils savent que les migrants vont tenter de profiter de chaque distraction pour escalader le mur d'acier. Ils ne vont toutefois pas jusqu'à retirer l'eau "car il n'y a pas de position officielle" américaine sur cette question, explique M. Morones.
Quelques bouteilles sont trouées, pour la plupart par des coyotes, mais certaines par des résidents de la Vallée Impériale.
"Regarde cette bouteille! Quelqu'un l'a cassée!" s'exclame Enrique Morones, indigné. "C'est difficile de comprendre pourquoi quelqu'un ferait ça. L'eau peut sauver une vie", ajoute-t-il.
Pour Juan Hernandez, un autre américano-mexicain qui participe à des associations pro-immigrants, la Vallée Impériale "ne se distingue pas par sa solidarité".
Cette zone agricole "est habitée en majorité par des anglo-saxons à la recherche de main d'oeuvre à bas prix" qui ne veulent plus voir personne sur leurs terres une fois les récoltes finies.
Souvent lorsqu'ils partent en mission dans le désert, les bénévoles tombent sur des cadavres de migrants qui ont succombé à la chaleur, l'épuisement et la déshydratation.
Plus de 600 personnes non identifiées mortes aux portes du "rêve américain" reposent dans un cimetière de la petite ville voisine de Holtville, surnommé "le cimetière de ceux qu'on n'oublie pas".
Sur leurs tombes modestes, des croix portent un message: "vous n'êtes pas seuls".
D'après M. Morones, face à l'afflux de migrants, les autorités ont décidé d'"incinérer" les corps de ces migrants inconnus et de "disperser leurs cendres dans la mer en face de San Diego".
Si le nombre des migrants a commencé à diminuer depuis deux mois sous l'effet d'un regain de vigilance dans les pays d'origine et au Mexique, dans le sillage d'une intense pression américaine, "ce flux ne va jamais s'arrêter", assure M. Hernandez.
"Nous devons changer la façon de faire les choses pour vivre plus paisiblement. Nous les Mexicains, nous sommes déjà majoritaires autour des zones frontalières", remarque-t-il.
Le président américain Barack Obama, dont le projet de réforme sur l'immigration est bloqué au Congrès, a repoussé à la fin de l'année, après des élections qui s'annoncent difficiles, toute décision concernant d'éventuelles régularisations de sans-papiers.
09 sept. 2014, SARA