jeudi 4 juillet 2024 16:19

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La Suède face au casse-tête du logement pour le flot croissant d'immigrés

Par son côté bucolique, la campagne qui entoure le centre d'asile d'Odengaarden dans le sud de la Suède tranche avec le caractère lugubre des histoires que racontent les occupants.

Maisoun Mahmoud, une juriste syrienne d'origine palestinienne, a donné tout ce qu'elle avait à des passeurs pour s'enfuir vers la Scandinavie. À 35 ans, elle végète avec une centaine d'autres nouveaux arrivants dans le centre bondé.

"Tout le monde ici a un problème", confie-t-elle. "Des fois on a envie de pleurer".

Si la Suède est saluée pour sa politique d'asile généreuse, l'afflux record de demandeurs pèse sur les deniers publics et alimente le débat sur l'immigration avant les législatives dimanche.

Aucun pays d'Europe n'a accordé plus de permis de séjour à des réfugiés que la Suède l'an dernier, et le pays nordique table sur jusqu'à 80.000 nouveaux réfugiés cette année, du jamais vu depuis le conflit yougoslave au début des années 1990.

Face à un nouvel afflux en provenance de zones de conflit comme la Syrie et la Somalie, l'agence de l'immigration ont demandé en juillet une rallonge de 48 milliards de couronnes (5,2 milliards d'euros), en plus des 91 milliards déjà budgétés pour les quatre prochaines années.

Ses centres d'accueil affichant complet, l'agence doit se résigner à louer des hôtels, des auberges de jeunesse ou encore des villages de vacances pour accueillir les plus de 2.000 personnes débarquant chaque semaine.

Plus de la moitié d'entre elles arrivent dans le port de Malmö, où elles déposent leur demande d'asile avant d'être hébergées temporairement ailleurs dans le pays.

Le centre d'Odengaarden, dans le village de Röstaanga, est révélateur du système D en vigueur puisqu'il était destiné des conférences il y a encore trois mois.

L'endroit "est bien mais on ne peut pas se reposer parce qu'on partage sa chambre avec d'autres", explique Mme Mahmoud.

Ne s'exprimant qu'en arabe, un Syrien explique qu'il était garagiste mais qu'il passe désormais ses journées à manger et dormir. Les lendemains s'annoncent difficiles pour lui sans l'anglais ni le suédois.

Enjeu électoral

La crise de l'hébergement n'est pas limitée aux grandes villes: elle s'étend aussi aux villes de province sur lesquelles les demandeurs d'asile pourraient jeter leur dévolu mais qui ont peu d'emplois à offrir. De ce fait, 11.000 réfugiés restent condamnés à y vivre bien qu'ils aient décroché un permis de séjour, selon l'Office national des migrations.

L'immigration est devenue un enjeu électoral: la poussée des Démocrates de Suède, parti d'extrême-droite anti-immigration, risque d'affaiblir le futur gouvernement en le privant d'une majorité parlementaire.
Ni la gauche ni la droite ne devrait obtenir de majorité absolue dimanche, et les deux blocs ont exclu toute discussion avec les Démocrates de Suède, qui pourraient doubler leur score avec entre 10 et 12% des scrutins.

"Les autres partis redoutent toute association avec les Démocrates de Suède", analyse Anders Hellstroem, chercheur de l'université de Malmö spécialisé dans les questions d'intégration européenne et de politique scandinave.

"La minorité non négligeable (d'électeurs, ndlr) attirée par le message des Démocrates de Suède n'a pas d'autre parti pour qui voter", dit-il.

Les inquiétudes que suscite l'immigration ont été mises en lumière par les troubles de mai 2013 dans les quartiers à forte population immigrée de Stockholm et sa banlieue, brisant l'image d'une Suède paisible et égalitaire, et soulignant les problèmes d'intégration.

Après trois ans dans le pays, moins d'un réfugié sur cinq a un emploi. Après sept ans, le chiffre monte à environ 50% seulement -- contre 85% chez les Suédois nés en Suède.

Bien qu'une vaste majorité de Suédois continuent d'être favorables à une politique d'asile libérale, leur tolérance "en pratique se limite à payer des impôts élevés", estime Robert Hannah, un candidat du Parti populaire (libéral), dans les colonnes du quotidien Svenska Dagbladet.

Les Suédois acceptent que les enfants d'immigrés fréquentent les mêmes écoles que leur progéniture "à condition qu'il n'y en ait pas trop", souligne ce fils d'immigrés assyriens. "La discrimination quotidienne n'est pas due principalement aux racistes des Démocrates de Suède mais au fait qu'il semble plus facile de fréquenter et d'employer ceux qui vous ressemblent le plus".

10 sept. 2014, Sören BILLING

Source : AFP

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