La France tente de rétablir une injustice qui n’a que trop duré. Elle vient d’accorder la nationalité aux migrants âgés d’origine maghrébine et d’Afrique subsaharienne plus communément appelés « Chibanis » qui ont travaillé une grande partie de leur vie en France et qui, une fois mis à la retraite, se retrouvent lésés par rapport aux personnes de nationalité française ayant exercé le même emploi.
Selon une loi votée le 17 septembre dernier par l’Assemble nationale, tout étranger, parent d’enfants français, et présent sur le territoire depuis au moins 25 ans, aura droit à la nationalité française par simple déclaration qui sera reçue par les préfets de départements et enregistrée par le ministre en charge des Naturalisations, sous réserve de respect des autres conditions légales. Un peu plus de 200.000 personnes seront concernées par cette mesure.
Ainsi et grâce à ce nouveau dispositif, les Chibanis pourront accéder aux mêmes droits que les citoyens français, notamment celui de voter et d’organiser plus librement leur retraite entre la France et leur pays d’origine. Un vrai soulagement pour un grand nombre d’entre eux. Particulièrement ceux qui ne disposent pas d’une retraite complète et qui sont contraints de résider plus de six mois sur le territoire français pour toucher leur pension.
S’inspirant d’une proposition du rapport de la mission d’information parlementaire sur les immigrés âgés, votée à l’unanimité et publiée début juillet 2013, beaucoup de parlementaires ont considéré cette loi comme une avancée importante et une sorte de reconnaissance envers ces migrants qui ont contribué à la richesse et à l’essor économique de la France. Leur accès simplifié à la nationalité devrait favoriser leur intégration.
En effet, cette population essentiellement masculine vit dans l’isolement et à l’écart de la société française. Etablis la plupart du temps dans des foyers et souffrant d’illettrisme et de non maîtrise de la langue française, les Chibanis ont été « maintenus dans un état de précarité, limitant ainsi leurs contacts avec le reste de la société ».
Une précarité sociale qui s’ajoute à la précarité économique puisque la majorité d’entre eux se retrouvent aujourd’hui avec des retraites de misère. « Anciens travailleurs dans les secteurs de la construction, de l’industrie et des travaux publics, les Chibanis ne touchent pas de retraites élevées et beaucoup d’entre eux ont droit à des aides non-contributives telles que l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et la Caisse d’allocations familiales (CAF) ».
Mais il n’y a pas que les problèmes de l’intégration sociale et des difficultés économiques. Les soucis de santé s’invitent au débat. En effet, les Chibanis sont particulièrement exposés à des problèmes dus à leur vieillissement et à leurs conditions de vie. Ceci d’autant plus que cette population a enduré pendant très longtemps des conditions de travail pénibles et stressantes qui ont eu un impact négatif sur leur état de santé. Une situation des plus graves puisque cette population vieillissante vit dans des logements exigus et inadaptés et se retrouve dans l’incapacité d’adhérer à de mutuelles adaptées à ses besoins.
27 Septembre 2014, Hassan Bentaleb
Source : Libération