Contrairement aux autres communautés étrangères ayant préféré fuir en masse à cause de la situation sécuritaire et politique difficile en Libye, une bonne partie des Marocains résidant dans ce pays ont choisi d'y rester, confortés en cela par leur parfaite intégration au sein de la société et une capacité d'adaptation hors pair.
C'est l'histoire d'une existence de plus de trois décennies, durant lesquelles la communauté marocaine a partagé avec le peuple libyen des moments sombres de son histoire, comme l'embargo aérien des 1990, les événements de 2011 et les pénibles années post-révolution du 17 février 2013. Leur présence est très remarquable, notamment dans certains quartiers comme celui de Karkach, au centre de Tripoli, qui concentre une bonne partie de Marocains exerçant différents métiers et qui ne pensent, nullement, à un éventuel départ du pays, pour différentes raisons.
Pour Mohamed Laaraybi, propriétaire d'un atelier de réparation de véhicules, il est impensable de quitter la Libye, quelles qu'en soient les raisons, après tant d'années passées dans ce pays où il a déposé les bagages dans les années 1970 et où ses enfants se sont fait une vie et ont mené à bien leurs carrières.
Même l'insécurité qui règne actuellement ne les dissuade pas. "Nous partageons, comme toujours, le même destin avec la population de ce pays qui nous a bien accueillis et nous a permis de gagner notre vie avec dignité", dit ce sexagénaire, faisant remarquer que les membres de la communauté marocaine, forts de leurs qualités humaines et leur professionnalisme, ont percé dans différents domaines et se sont forgés une bonne réputation.
Mais pour Jaouda Bahi, issu de Benslimane et qui s'adonne à la sculpture sur plâtre, la décision de rester en Libye s'explique par la contrainte financière. "Les opportunités d'emploi et les revenus suffisent à peine à couvrir les dépenses de ma famille et à mettre un peu d'argent de côté", explique cet artisan qui représente une frange de ses concitoyens en situation précaire et qui placent le souci sécuritaire bien après le pain quotidien. C'est d'ailleurs le même motif qui pousse plusieurs Marocains à affluer en Libye malgré l'instabilité politique.
En effet, selon le chargé d'affaires par intérim de l'ambassade du Maroc à Tripoli, Ali Lamssili, le nombre de Marocains ayant choisi de quitter ce pays dernièrement reste limité, précisant qu'il s'agit de jeunes confrontés à des difficultés d'intégration car ayant nouvellement rejoint ce pays, ne disposant pas de titres de résidence légale ou poussés vers le chômage après la fermeture de plusieurs établissements dans les zones de confrontation armée.
Dans une déclaration à la MAP, le diplomate a fait savoir que l'ambassade, ainsi que les consulats généraux du Maroc à Tripoli et Benghazi ont enregistré près de 3.000 ressortissants marocains désireux de quitter la Libye depuis la mise en place d'une cellule de crise, ajoutant que la possibilité de gagner Tunis par voie terrestre pour prendre un vol vers le Maroc a été assurée après la réouverture du bureau de la Royal Air Maroc à Tripoli, en plus d'aides financières aux personnes en situation difficile.
En plus, une cellule de crise installée au point frontalier Ras Jdir s'est penchée sur les cas des Marocains ne disposant pas de documents de voyage, ce qui a considérablement soulagé la communauté Marocaine à un moment où les citoyens étaient exposés à un marché noir très actif à l'apogée de la crise, a-t-il rappelé, précisant que, à des fréquences qui ont baissé dernièrement, 1.600 Marocains se sont envolés vers leur pays à bord de vols réguliers de la RAM, alors que d'autres ont embarqué dans des appareils de deux compagnies libyennes.
Le diplomate a également loué le rôle actif de la société civile qui contribue à résoudre de multiples difficultés rencontrées par la communauté marocaine, notamment d'ordre social, et participe à l'encadrement de l'opération d'évacuation.
29 sept. 2014 Redouane Baakili
Source : MAP