Les migrations temporaires créent de la richesse dans le pays d’origine. C’est à cette conclusion qu’est parvenu le Forum euroméditerranéen des Instituts de sciences économiques (FEMISE) dans un rapport intitulé «Migration de retour dans les pays sud-méditerranéens: déterminants, impacts et implications».
Financée par l’Union européenne, cette étude montre que le retour des migrants vers leurs pays d’origine a un impact à la fois sur l’emploi, l’entrepreneuriat et les investissements. Ces derniers, note le rapport, «génèrent de la richesse, investissent et créent de l’emploi de retour au pays».
Selon Jackline Wahba, professeur d’économie à l’Université de Southampton et coordonnatrice du rapport, cette étude vise à montrer «l’impact de la migration de retour sur l’accumulation de capital humain et l’entrepreneuriat, et le rôle joué par les politiques migratoires de retour».
Pour mieux cerner cette question et en comprendre les enjeux, le Femise a axé ses travaux sur trois pays du Sud de la Méditerranée dont il a analysé le phénomène : le Maroc, la Tunisie et l’Egypte.
Ce travail s’est décliné autour de trois grands axes. Le premier a consisté à mettre l’accent sur la décision d’émigrer, alors que le second visait à étudier les caractéristiques des migrants de retour, Egyptiens et Marocains. Le dernier axe entendait montrer l’impact de la migration de retour sur l’accumulation de capital humain et l’entrepreneuriat, et le rôle joué par les politiques migratoires de retour. Selon le Femise, les ressortissants marocains et égyptiens étaient 12 millions à vivre hors de leurs frontières en 2013. Mais pas pour les mêmes destinations. En effet, «les Egyptiens s’exilent essentiellement dans les pays du Golfe et les pays de l’OCDE alors que les Marocains préfèrent l’Europe tout comme les Algériens et les Tunisiens», explique le rapport.
Issue du deuxième pays non européen après la Turquie, «la diaspora marocaine représentait à elle seule 4,5 millions de personnes en 2013», ajoute le rapport expliquant que l’aspiration à une vie meilleure constitue la principale motivation au départ.
Contrairement à une idée reçue, le rapport révèle que «82% des migrants marocains ont déjà un emploi», mais que ces derniers désirent simplement un salaire plus élevé.
Autre révélation faite dans ce rapport et non des moindres, «le niveau d’éducation des Egyptiens candidats au départ est plus élevé que celui des Marocains».
D’après cette étude, les Marocains auraient «tendance à rester tout au long de leur vie dans le pays d’accueil alors que les Egyptiens privilégient une migration temporaire avec un retour soit dans le pays d’origine, soit dans d’autres pays du Golfe».
A propos de l’âge des migrants, le rapport indique qu’il se situe en général entre 15 et 29 ans. En revanche, ce n’est qu’à partir de 44 ans que les migrants «décident de revenir dans leur pays d’origine avec dans leurs bagages de nouvelles connaissances et capacités qu’ils sauront mettre à profit une fois rentrés», souligne le rapport.
Que deviennent-ils une fois rentrés dans leur pays d’origine ? Le rapport note que la plupart d’entre eux «deviendront par la suite chef d’entreprise et joueront un rôle primordial dans la création d’emploi». D’où, estime le Femise, la nécessité de maximiser les bénéfices potentiels pour le pays d’origine.
Si le retour des migrants crée de la richesse dans leur pays d’origine, tout n’est pas rose pour ces derniers qui se trouvent souvent confrontés à des tracasseries administratives. «En particulier pour le transfert des droits acquis pour leur retraite et la cotisation à la sécurité sociale», constate le Femise.
Enfin, le Femise en est persuadé : «Le faible taux de natalité et le vieillissement des populations» dans les pays européens «devraient conduire à une augmentation sensible du nombre de migrants temporaires». Dans ce cas, «ils devraient être 4,9 millions en 2015 et 11,8 millions en 2020».
L’objectif général du Femise est de renforcer le dialogue entre les parties prenantes et de mener des recherches sur les questions prioritaires euro-méditerranéennes, peut-on lire sur son site Internet.
23 Octobre 2014, Alain Bouithy
Source : Libération