mardi 5 novembre 2024 03:24

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En première ligne, fierté et désarroi pour les acteurs de Mare Nostrum

Une moyenne de 400 migrants secourus chaque jour en Méditerranée. Pour les marins et humanitaires en première ligne de Mare Nostrum, l'opération est source de fierté, mais aussi d'angoisse et du remords d'être parfois arrivé trop tard.

"Nous avons vu des choses que je ne peux pas décrire. Le plus dur a été un naufrage où nous avons réussi à sauver 250 personnes (...), mais avec une mer démontée, de nuit, nous n'avons pas pu sauver tout le monde", raconte à l'AFP le capitaine des garde-côtes Giuseppe Maggio, de retour à Palerme après une nouvelle opération épuisante en mer.

Son bateau, le "Fiorillo", est l'un des 32 navires italiens ayant participé à Mare Nostrum depuis son lancement il y a un an, à la suite de deux naufrages ayant fait plus de 400 morts près de l'île de Lampedusa et de Malte.

Et même si l'Italie n'a pas les moyens de maintenir un tel dispositif de secours, les 32 membres d'équipage du "Fiorillo" rappellent qu'il ne peuvent pas arrêter : plus de 3.300 migrants ont encore péri en mer cette année.

"C'est sûr que cela nous coûte. Beaucoup d'entre nous ont une famille. J'ai deux enfants et c'est parfois difficile de concilier la vie de famille avec notre mission", explique-t-il en décrivant l'angoisse des nuits à chercher des survivants ou recueillir des corps après un naufrage.

Mais l'émotion d'un sauvetage "est bien plus forte que tous les efforts et les sacrifices consentis", assure le capitaine, dont le bateau ramenait ce jour-là à Palerme 261 Syriens, Maliens et Ghanéens secourus la veille en pleine mer.

A chaque fois, le plus dur est de maintenir le calme parmi les migrants pendant le transfert de leur embarcation de fortune vers un navire de secours.

"Nous avons affaire à des gens qui souvent ne savent pas nager, ne parlent pas notre langue et sont épuisés après des jours entiers en plein soleil. Il faut éviter toute panique", ajoute-t-il.

 Ne pas trop s'impliquer

Au port, Angela Puccio, une assistante sociale employée par la municipalité de Palerme, est chargée d'accueillir les mineurs non accompagnés, le plus souvent des adolescents qui partagent avec elle "les histoires horribles de ce qu'ils ont traversé".

"On ramène cela à la maison, mais on ne peut pas être trop impliqué, sinon on ne serait pas capable de continuer", explique-t-elle en courant de l'une à l'autre des tentes où la Croix Rouge et Caritas fournissent des chaussures, de l'eau et de la nourriture aux arrivants.

Pendant ce temps, le capitaine de frégate Francesco Laghezza est en mer à bord du "San Giorgio", à la recherche d'autres désespérés. En quatre mois, son navire a secouru 18.000 personnes.

"La première fois que nous avons sauvé des migrants, cela a été une expérience incroyable, et ce sentiment reste le même à chaque mission", raconte ce second qui enfile à chaque fois une combinaison blanche de protection pour aller au premier contact.

"Ils ont tous la même expression de perplexité et de peur dans le regard", explique-t-il lors d'un entretien par téléphone satellitaire.

Jeune médecin de bord du "San Giorgio", Ottavia Balbi soigne les malades et écoute en boucle des récits terribles de pays dévastés et de voyages à travers le désert, pour signaler aux travailleurs humanitaires à l'arrivée au port les traumatismes psychologiques les plus sérieux.

"Le plus difficile est de garder l'esprit clair, surtout avec les enfants malades. Mais quand ceux avec lesquels on a créé un lien vous saluent de la main en débarquant, c'est une immense satisfaction", raconte-t-elle.
Et les débats sur le coût et les effets pervers de Mare Nostrum n'atteignent pas Francesco Laghezza, qui entend "continuer à sauver des vies, quel que soit le nom de la mission ou le drapeau sous lequel nous opérons".

"Je suis fier de le faire. Qu'y a-t-il de plus noble que de porter secours à des hommes, des femmes et des enfants qui fuient la guerre et la persécution ?", insiste-t-il.

28 oct. 2014, Ella IDE

Source : AFP

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