Les tomates marocaines sont de nouveau sur le banc des accusés. Cette fois-ci, c'est à cause des conditions de travail des ouvriers agricoles chargés de cueillir cette légume, jugées injustes.
Selon un dernier rapport de Fairfood, une ONG internationale, ces travailleurs exercent leur métier dans des conditions pénibles et dangereuses contre des salaires de misère. Elle estime que plus d'un tiers d'entre eux sont payés en deçà du salaire minimum agricole garanti (SMAG) équivalant à 147,44 euros par mois. Un fardeau qui touche en premier et de manière excessive les femmes qui représentent 70% des travailleurs agricoles dans la région du Souss-Massa-Drâa où la plupart des tomates du Maroc sont cultivées. Une situation des plus inacceptables qui n'a cessé d'être dénoncée par les syndicats marocains dont certains qualifient le secteur agricole de « monde de non-droit » et dont beaucoup de salariés sont des jeunes, des migrants, et des célibataires qui cherchent à éviter la stigmatisation sociale et la marginalisation.
Lahcen Moski, 38 ans, travailleur agricole dans un champ de tomates, a révélé aux auteurs du rapport, qu'il gagnait 60 DH (6,78 dollars) pour chaque journée de travail effectuée dans des conditions qui ne sont pas sans risque. "Que puis-je faire avec 60 DH alors que j'ai des enfants qui attendent nourriture, vêtements et médicaments ?», s'est-il demandé avant d'ajouter qu'il est souvent contraint de contracter des crédits pour nourrir sa famille.
Pour Fairfood, il n'y a pas que les exportateurs marocains à blâmer, les grandes chaînes de supermarchés européennes sont accusées de faire perdurer cette situation. En fait, le rapport indique que les grands détaillants européens notamment les Britanniques et les Néerlandais exercent plus de pressions sur ces travailleurs agricoles marocains qui fournissent 90 % des tomates écoulées sur le marché européen.
Des accusations balayées d'un revers de la main par la plupart des grandes chaînes européennes de supermarchés comme Albert Heijn aux Pays-Bas et Sainsbury et Tesco au Royaume-Uni. Les responsables de Tesco ont déclaré à ce propos qu'une enquête qu'ils ont menée eux-mêmes n'a pas débouché sur les mêmes résultats rapportés par Fairfood. D'après ces mêmes responsables, un contrôle des bulletins de paie de ces travailleurs a montré que tous sont payés au-dessus du salaire minimum agricole garanti.
Sainsbury a affirmé, pour sa part, que son fournisseur « paie non seulement le salaire légal, mais l'augmente de 20% pour tous ses travailleurs. Même son de cloche du côté d'Albert Heijn qui a déclaré que tous ses travailleurs ont été payés « au moins au salaire minimum agricole et que des taux plus élevés sont appliqués aux heures supplémentaires ».
Une défense qui ne semble pas convaincre cette ONG internationale qui compte lancer une campagne pour faire pression sur ces détaillants européens pour que des salaires décents soient payés aux travailleurs de leurs chaînes d'approvisionnement.
18 Novembre 2014, Hassan Bentaleb
Source : Libération