lundi 4 novembre 2024 23:30

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Les apostats de l'islam commencent à se compter en Europe

En rupture avec l'islam par rejet de traditions jugées pesantes, réaction au radicalisme ou quête spirituelle, des ex-musulmans s'organisent en Europe pour négocier leur apostasie, face aux pressions de leurs entourages.

En France, le film "L'Apôtre", de Cheyenne Carron, a levé le voile sur ces apostats, en racontant la conversion au catholicisme d'un jeune musulman, et ses difficultés à faire accepter ce choix par ses proches.
Le phénomène reste très minoritaire. Mais "il est temps que l'on arrête de se cacher", relève le pasteur Saïd Oujibou, passé de l'islam radical à la foi évangélique, parmi les rares convertis à médiatiser son parcours en France.

Ce quadragénaire dit avoir abjuré l'islam pour diverses raisons, relatives "aux libertés religieuses, à l'égalité homme-femme, à la question du salut que l'islam ne garantissait pas".

Il affirme être "toléré" par ses anciens coreligionnaires, même s'il évoque "sarcasmes et vexations". Mais il met en garde contre "le double discours" entretenu envers les musulmans en rupture de ban "chez certaines branches de l'islam en France", proches des Frères musulmans et des salafistes.

"L'apostasie est un impensé de la culture musulmane, et si le texte du Coran ne prévoit aucune sanction, la tradition prophétique prescrit de tuer l'apostat", relève Radouane Attiya, islamologue à l'université de Liège et ex-prédicateur formé en Arabie saoudite.

Selon les spécialistes, la tendance en Europe est en faveur de l'islam, qui compte plus de ralliements que de ruptures.

Mais les conversions au christianisme sont en hausse, affirme Saïd Oujibou, surtout au profit du protestantisme évangélique, volontiers prosélyte et qui côtoie l'islam dans les quartiers populaires et au sein des communautés immigrées.

"En Europe, comme d'ailleurs dans les pays arabes, il y a un athéisme rampant qui gagne du terrain", affirme M. Attiya. "Ce qui est nouveau, c'est la recherche de visibilité", en dépit du "suicide communautaire" auquel s'exposent ces musulmans en rupture de ban, analyse-t-il.

 'Ras le bol des barbus'

En Belgique, qui accueille des diasporas turque et marocaine très structurées, Ahmed, un ingénieur quadragénaire avoue, sous couvert de l'anonymat, un sentiment "d'isolement". Il a intégré il y a deux ans le Mouvement des ex-musulmans de Belgique, par "ras le bol face à l'omniprésence des barbus", "l'hypocrisie de l'islam" et le "contrôle total sur la vie humaine" imposée selon lui par cette religion.

Avec un site renvoyant aux livres de Robert Spencer, un militant américain anti-islam accusé de racisme et incitation à la haine, le groupe a pour objectif "de lutter contre l'endoctrinement islamique", revendique Ahmed.

Mais il peine à se faire entendre, avec seulement une dizaine de membres, dont certains préfèrent même dissimuler leur rupture à leurs proches.

Des organisations du même type existent depuis plusieurs années en Allemagne et au Royaume-Uni, animées par des Iraniens en exil. En septembre, le Conseil central des ex-musulmans d'Allemagne avait appelé à manifester contre une poignée de salafistes s'étant autoproclamés "Police de la Charia" à Wuppertal.

Issu d'une famille "très conservatrice" installée à Londres, Imtiaz Shmas, 25 ans, ne se reconnaît pas dans cet "activisme". Après avoir rompu avec sa foi il y a deux ans, il a rallié une "communauté underground" qui regroupe "environ 300 personnes".

"Nous avons des rencontres hebdomadaires, nous prenons soin les uns des autres", face aux pressions et rejets des entourages. "Vos proches ressentent ça comme si vous leur crachiez à la figure, ils pensent que vous êtes contre eux (...) Ma mère, en plus, redoute que mon enfant aille en enfer", explique-t-il.

Il estime le nombre des agnostiques à plusieurs milliers dans la communauté musulmane londonienne, forte de quelque 600.000 personnes.

20 nov. 2014, Catherine BOITARD

Source : AFP

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