dimanche 24 novembre 2024 09:57

Etrangers, regroupement familial, séjour... Petit lexique de l'immigration

Les questions sur l'immigration reviennent de façon récurrente dans le débat en France. Un musée dédié à l'histoire de l'immigration a d'ailleurs enfin été inauguré, lundi 15 décembre, sept ans après son ouverture au public.

Pourtant, les confusions dans les termes sont légion. Quelques définitions pour y voir plus clair.

La confusion entre immigré et étranger est des plus classiques, et permet à certains intervenants dans le débat de les additionner... à tort. La différence tient essentiellement dans le lieu de naissance. Un étranger peut être né en France (une personne née sur le sol français de parents étrangers, qui n'a pas la nationalité française à sa naissance, n'est pas immigrée), alors qu'un immigré est forcément né à l'étranger.

En outre, contrairement à un étranger, un immigré peut avoit la nationalité française.

On ne peut donc pas additionner immigrés et étrangers, puisque plus la moitié d'étrangers sont aussi immigrés. Selon les chiffres de l'Insee de 2008, on comptait 5,34 millions d'immigrés en France, parmi lesquels 3,17 millions de personnes étrangères et nées à l'étranger (donc immigrés et étrangers). D'autre part, 550 000 étrangers étaient nés en France - et donc n'étaient pas immigrés.

Nationalité et séjour

On peut vivre en France sans posséder la nationalité française. Néanmoins, nombre d'immigrés font une demande pour l'acquérir. Il existe plusieurs manières de le faire : par mariage, par filiation, ou par naturalisation.

Un enfant né en France de parents étrangers devient automatiquement français à sa majorité s'il réside en France depuis cinq ans au moins. En revanche, le mariage avec un Français n'octroie pas automatiquement la nationalité. Il faut quatre ans après le mariage pour pouvoir faire une demande, sous certaines conditions : séjour régulier (donc détention d'une carte de séjour), communauté de vie, connaissance de la langue française, absence de condamnation pénale…

Acquisitions de nationalité en 2013

97 318 acquisitions de nationalité française ont été enregistrées en 2013, dont 49 757 naturalisations, 24 145 déclarations anticipées (acquisition par filiation), et 17 513 acquisitions par mariage.

Droit d'asile

Le droit d'asile est le fait pour un étranger de pouvoir demander une protection à la France contre des persécutions dans son pays d'origine, pour des motifs religieux, politiques ou autres. Il est reconnu par la Constitution et par des traités internationaux dont la France est signataire.

17 % On évoque très souvent les demandeurs d'asile, qui ne sont pourtant pas la catégorie de migrants la plus fréquente, loin de là : en 2013, on comptait 60 095 premières demandes d'asile en France, selon les chiffres de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

Seules 5 965 demandes d'asile ont été accordées dès la première demande. Les candidats déboutés ont la possiblité de saisir la Cour nationale du droit d'asile. Celle-ci a accordé 5 450 demandes à des candidats refusés par l'Ofpra. Au total, 11 415 demandes d'asile ont accordées par la France en 2013. Ce qui correspond à environ 17 % des dossiers.

Titres de séjour

Ce sont les titres, documents de séjour et de circulation des étrangers non européens, qui correspondent à l'immigration légale. Leur durée varie de quelques mois (pour les autorisations provisoires de séjour) à dix ans (les cartes de résident) et ils sont délivrés sur la base de critères familiaux, économiques, professionnels, d'études ou humanitaires.

Selon les chiffres provisoires de l'Insee pour 2013, 208 723 premiers titres de séjour ont été délivrés, dont une majorité pour un motif familial (98 277).

8,6 % des premiers titres de séjour délivrés l'ont été pour un motif économique ; c'est-à-dire que les entrants disposaient d'un contrat de travail au moment de l'obtention de leur titre de séjour.

A ces quelque 18 000 personnes, il faut ajouter 61 315 étudiants (près de 30 % de titres délivrés), les titres à caractère humanitaire (8,5 %) et une catégorie « divers » (6,4 %), qui regroupent les mineurs, les retraités et les « compétences et talents ».

Sans-papiers

L'expression « sans-papiers » désigne les personnes présentes en France sans en avoir le droit, donc de manière irrégulière. Par définition, on ne sait pas combien de sans-papiers sont présents en France, ni depuis combien de temps, ni combien arrivent chaque année.

Un indicateur du nombre de sans-papiers est l'aide médicale d'Etat (AME), qui permet aux immigrés en situation irrégulière de bénéficier de soins médicaux. 263 962 personnes en ont bénéficié en 2013. Pour bénéficier de cette aide, il faut résider en France de manière stable et ne pas gagner plus d'un certain montant.

Les conflits aux frontières de l'Europe (Afrique, Maghreb, Proche et Moyen-Orient) conduisent à un afflux de migrants irréguliers vers l'Europe, et la France. Notre pays est néammoins moins concerné que d'autres en Europe. Les migrants irréguliers sont pour certains en transit vers d'autres pays européens. L'Allemagne ou le Royaume-Uni notamment.

Regroupement familial

Le regroupement familial permet de faire venir son conjoint ou ses enfants lorsqu'on est immigré. C'est le principe qui est appliqué par défaut depuis 1976, sauf exceptions - qui sont nombreuses (conditions de logement, de revenus, de régime matrimonial...).

Une confusion est souvent faite entre regroupement familial et droit au séjour : le regroupement familial concerne les étrangers vivant en France. En revanche, les immigrés qui ont acquis la nationalité française et veulent faire venir conjoint ou enfants se situent dans le cadre du droit au séjour.

Aujourd'hui, plus de la moitié des titres de séjour sont délivrés pour motif familial. Ce qui ne signifie pas que les personnes qui séjournent en France s'y installent forcément.

Générations

Outre 5,3 millions d'immigrés, on compterait, selon l'Institut national des études démographiques (Ined), 6,5 millions de personnes ayant au moins un parent immigré, à la première génération.

23 % de la population avait au moins un grand-parent immigré, selon d'autres calculs. Soit, donc, un Français sur quatre qui serait issu de l'immigration à deux générations. Ce n'est qu'une estimation, car il est difficile de retrouver la nationalité d'origine aussi loin. Néanmoins, ces chiffres tendent à montrer que parler de « Français de souche » n'a pas grand sens.

AME

Tout étranger bénéficie de la Sécurité sociale à condition de cotiser, donc de travailler légalement, ou s'il est demandeur d'asile, étant un ayant droit d'un assuré ou bénéficiaire de l'aide médicale d'Etat (AME).

Pour bénéficier de l'AME dans le cas d'une personne en situation irrégulière qui ne travaille pas, celle-ci doit résider en France de façon ininterrompue depuis trois mois et y séjourner pendant plus de six mois par an, avec des ressources qui ne dépassent pas un certain plafond. L'AME peut en outre être accordée de façon exceptionnelle sur décision du ministre à des étrangers de passage en France dont l'état de santé le justifie.

605 millions € ont été budgétés en 2014 par le gouvernement pour assurer l'AME. En 2013, 203 962 personnes en ont bénéficié ; il s'agit pour plus de 80 % de personnes seules, majoritairement des hommes et jeunes, selon le rapporteur spécial de la mission « Santé » au Sénat, Jean-Pierre Caffet.

RSA

Pour bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), il faut être en possession d'un titre de séjour et d'une carte de travail depuis au moins cinq ans, si on est natif d'un pays extérieur à l'Union européenne. Pour les ressortissants de l'UE, ce délai est de trois mois, et ceux-ci ne peuvent prétendre au RSA s'ils sont entrés en France pour y chercher un travail.

Allocations familiales

Un étranger non européen peut prétendre aux prestations familiales, mais à condition, d'abord, de résider habituellement en France et de détenir un titre de séjour – et d'avoir des enfants présents légalement sur le territoire. Enfants qui doivent vivre auprès des parents et à leur charge.

Pour toucher les prestations, plusieurs options : les enfants doivent être nés en France, ou être venus dans le cadre du regroupement familial, avoir un parent reconnu réfugié, ou encore un parent bénéficiaire d'une carte « scientifique-chercheur ». Les travailleurs détachés temporairement et non affiliés à la Sécurité sociale n'ont pas le droit aux prestations.

Les étrangers en situation régulière sont également éligibles aux aides au logement (APL, ALF et ALS) sous condition de ressources.

Europe

Les immigrés vivant en France sont pour beaucoup… Européens. Contrairement à ce qu'on peut lire ou entendre, les européens sont bien comptabilisés dans les chiffres de l'immigration.

37,4% Là encore, loin des clichés, l'Europe représente 37,4% des immigrés en 2010. Algérie, Maroc et Tunisie ensemble représentent 29,8%. Le reste de l'Afrique, 13%.

16.12.2014, Samuel Laurent et Madjid Zerrouky

Source : lemonde.fr

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