samedi 2 novembre 2024 12:25

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Malades de l’intérieur

Depuis une loi de 2011, les conditions d’accès au titre de séjour pour raison médicale se sont considérablement durcies, par la volonté de la majorité de l’époque de renvoyer les personnes étrangères malades dans leur pays d’origine, dès lors qu’un traitement existe, fut-il totalement inaccessible.

Deux ans et demi après le changement de majorité, et malgré les promesses électorales de François Hollande, la loi n’est toujours pas modifiée. Pire encore, les pratiques administratives n’ont cessé de se dégrader, aboutissant, du fait notamment des pressions exercées par les préfectures sur les médecins des agences régionales de santé (ARS), à une chute du nombre de titres de séjour accordés à des personnes gravement malades. Depuis 2012, le rythme des expulsions s’est même accéléré atteignant des niveaux inédits, malgré la mobilisation des associations et des alertes répétées auprès des ministères de la santé et de l’intérieur.

Un projet de loi, dont l’examen par le parlement n’est pas envisagé avant le printemps 2015, prévoit enfin de rétablir le principe de l’effectivité de l’accès aux soins. Que de temps perdu et de situations de vie brisées !

Mais cette effectivité, ainsi que la gravité de la pathologie, seront désormais évaluées par les médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) en lieu et place des médecins des ARS. Doit-on rappeler que l’OFII gère déjà, sous tutelle du ministère de l’intérieur, les aides au retour, les contrats d’accueil et d’intégration, ou encore les visites médicales dans le cadre général de la politique de maîtrise des flux migratoires.

Pourquoi la santé des personnes étrangères devrait-elle sortir du giron exclusif du ministère de la santé ?

Pourquoi le ministère de l’intérieur aurait-il son mot à dire en matière de santé publique ? Pourquoi les personnes malades relèveraient-elles d’autorités différentes selon qu’elles sont françaises ou étrangères ? 

Fini le temps où la politique relative à l’immigration était partagée avec d’autres ministères (affaires étrangères, justice, affaires sociales). Avec le transfert de cette compétence d’évaluation médicale à l’OFII, l’intérieur règnera dorénavant sur tout.

Les propositions de La Cimade rejoignent celles d’autres associations : rappeler aux préfectures les dispositions législatives et les règles de procédure pour mettre fin aux multiples pratiques administratives illégales ; maintenir un dispositif d’évaluation médicale placée sous la tutelle exclusive du ministère de la santé et mettre fin aux ingérences et pressions des préfectures et du ministère de l’intérieur ; rendre effectif le droit au séjour et la protection contre l’expulsion de toutes les personnes étrangères malades vivant en France, y compris les ressortissants de l’Union européenne. Pour ne pas risquer de passer d’une logique de médecine de prévention à une médecine de contrôle, d’une logique de santé publique à une logique de gestion des flux migratoires.

28 JANVIER 2015, Jean-Claude Mas

Source : mediapart.fr

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