La commission australienne des droits de l'Homme a réclamé jeudi l'ouverture d'une enquête sur les conditions de détention imposées aux enfants de demandeurs d'asile, victimes d'abus parfois sexuels, de troubles mentaux ou d'automutilation.
Cette commission financée par des fonds publics a enquêté pendant 10 mois dans 11 centres de rétention et a présenté ses conclusions au Parlement dans un rapport accablant.
"Il n'y a apparemment aucune explication rationnelle justifiant la détention prolongée des enfants" déclare le rapport, intitulé "Les Enfants oubliés". "La rétention obligatoire et prolongée des enfants est une violation des droits de l'Homme".
Le Premier ministre australien de droite Tony Abbott est monté au créneau pour remettre en cause la légitimité du rapport, accusant ses auteurs de partialité.
L'Australie est critiquée de longue date sur la scène internationale pour le traitement qu'elle réserve aux demandeurs d'asile qui arrivent par bateau. Ceux-ci sont placés dans des camps de rétention dans des îles de l'océan Indien ou du Pacifique. Même si leur demande d'asile est considérée comme légitime après instruction de leur dossier, Canberra ne les autorise pas à s'installer en Australie.
Le nombre d'enfants vivant dans des centres de rétention avait atteint un pic de 1.992 à la mi-2013 sous le précédent gouvernement travailliste. Ce nombre s'est considérablement réduit depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs en septembre 2013.
Les enquêteurs ont mené 1.233 entretiens avec des enfants et leurs parents entre janvier 2013 et mars 2014. Au total, 233 cas de violences impliquant un enfant et 33 cas d'abus sexuels ont été signalés. Cent vingt-huit enfants se sont automutilés tandis que 27 autres ont cessé de s'alimenter.
La présidente de la commission Gillian Triggs a souligné que l'enquête établissait pour la première fois l'impact de la détention (un an et deux mois en moyenne) sur la santé physique et mentale des enfants.
Environ 35% d'entre eux souffrent de troubles mentaux "particulièrement choquants", notamment sur Christmas Island, selon Mme Triggs.
La commission, qui a demandé l'ouverture d'une enquête sur la politique d'immigration mise en oeuvre par les autorités, exige que tous les enfants et leur famille soient relâchés.
Le gouvernement australien explique qu'il s'agit de décourager le trafic des passeurs qui profitent d'immigrants venant pour l'essentiel d'Irak, d'Iran et d'Afghanistan.
Depuis décembre 2013, un seul bateau a réussi à gagner les rives du continent australien. Auparavant, les arrivées de bateaux étaient quasi-quotidiennes et des centaines de demandeurs d'asile ont perdu la vie lors de ces périples dangereux.
"Où était la commission des droits de l'Homme quand des centaines de personnes se noyaient en mer ?", s'est insurgé Tony Abbott. "Où était la commission quand près de 2.000 enfants étaient en détention?".
12 févr. 2015
Source : AFP