Un rapport rendu, hier matin, par Amnesty International épingle la France pour « violations des droits humains ». L’État français y est pointé du doigt pour discriminations à l’encontre des étrangers.
Dans son dernier rapport sur «les violations» des droits de l’homme par les États, Amnesty International pointe la France, en premier chef, sur le sort qu’elle réserve aux Roms vivant sur son territoire. La présidente, Geneviève Garrigos, accuse ainsi l’État français de mener des expulsions de bidonvilles « dans des conditions absolument épouvantables ».
Des politiques répressives et discriminatoires
Le mois dernier, la Ligue des droits de l’homme publiait un rapport qualifiant l’acharnement des pouvoirs publics à l’encontre de ces camps de fortune de « violent, injuste et indigne ». La Commission nationale consultative des droits de l’homme, en novembre 2014, évoquait « une politique institutionnalisant, au plus haut niveau de l’État, la violation des droits des populations roms ». Quelques mois plus tôt, en avril, elle dénonçait déjà un racisme « brutal et biologisant » à leur encontre.
Chaque fois, le gouvernement fait mine de ne pas entendre quand il n’use pas de mépris. Car ces alertes ne freinent finalement pas les politiques répressives et discriminatoires. En mai 2014, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, n’affirmait-il pas, à propos des Roms, qu’il fallait « chercher à les faire retourner d’où ils viennent » ? Y a-t-il eu des sanctions suite à la note interne de la police de Paris, découverte le 5 mai 2014, demandant aux policiers de « recenser les familles roms et de les évincer systématiquement » ? Non, en France, on préfère classer « sans suite » l’affaire dans laquelle le maire de Champlan (Essonne) avait été brièvement inquiété pour avoir refusé l’inhumation d’un enfant rom dans le cimetière de sa commune. Il n’y aura pas, non plus, de rappel à l’ordre émis à l’encontre du maire de Limeil-Brévannes (Val-de-Marne) qui vient de lancer une pétition anti-Roms. Amnesty International fait aussi part « d’inquiétudes » quant à « l’impartialité » des enquêtes sur « les 1 000 cas de violences » policières traités par le défenseur des droits, en 2013. L’ONG a de quoi s’inquiéter. Le 11 janvier dernier, l’organisation new-yorkaise Human Rights Watch rendait un rapport sur les violences commises par la police contre les migrants à Calais. Le gouvernement avait tout simplement nié. « Quelles que soient les accusations (...), tout ce qui peut être dit est infondé », rétorquait Thierry Alonso, chef de la police dans la région. Et Bernard Cazeneuve d’ajouter qu’il regrettait que l’ONG « n’ait pas pris la peine de vérifier » ses allégations.
Nos gouvernants useront, à n’en pas douter, de la même mauvaise foi pour répondre aux accusations d’Amnesty International qui pointe également les limitations à la liberté d’expression imposées par la loi antiterroriste, les « freins à la liberté de réunion » constatés lors des manifestations contre les bombardements sur Gaza, l’été dernier, le nombre croissant des discriminations à l’encontre des musulmans ou encore du non-respect des droits des migrants. Pire, ces logiques racistes et violentes pourraient inspirer la nouvelle loi consacrée à l’immigration, qui doit être débattue au Parlement, en mai, et dont l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers prévient déjà que le texte « fait prévaloir la suspicion et la répression sur le respect et l’effectivité des droits ».Combien de rapports d’ONG, d’avis de conseils consultatifs et d’alertes du monde associatif faudra-t-il encore pour que la République recouvre enfin ses valeurs d’humanité ?
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26/2/2015, Émilien Urbach
Source : humanite.fr