Si la décision n'est pas encore prise officiellement, Macky Sall a fait savoir mardi qu'il envisageait très sérieusement la "suppression pure et simple du visa d'entrée au Sénégal".
"En politique, il faut savoir revenir sur une décision." Mardi 17 mars, devant les correspondants de la presse étrangère au Sénégal, le président Macky Sall n'a pas fait dans la langue de bois concernant cette mesure controversée entrée en vigueur le 1er juillet 2013. Depuis cette date, les ressortissants des pays qui exigent des Sénégalais un visa ont en effet l'obligation, pour pouvoir pénétrer au Sénégal, de s'acquitter d'un visa biométrique d'un coût de 52 euros par personne. "Je ne suis plus très loin de proposer la suppression pure et simple du visa vers le Sénégal", a fait savoir mardi matin le chef de l'État.
À l'origine, l'instauration de la réciprocité en matière de visa avait deux objectifs principaux : rehausser la dignité des Sénégalais, dont l'accès à l'espace Schengen ou à l'Amérique du Nord est devenu, au cours des deux dernières décennies, un véritable parcours du combattant ; mais également offrir aux caisses de l'État une manne financière bienvenue. Seul problème : adoptée sans véritable concertation avec les représentants de l'industrie touristique au Sénégal, la mesure avait alors suscité un immense scepticisme dans un secteur déjà passablement sinistré depuis la crise financière de 2008, qui souffre par ailleurs du surcoût de la destination Sénégal, dans un pays où les taxes aéroportuaires sont les plus élevées du continent.
Destination onéreuse
Contradictoire avec l'ambition affichée par Macky Sall de développer le tourisme – principal apport de devises avec la pêche – dans le cadre du Plan Sénégal émergent (PSE), l'instauration des visas a eu deux répercussions néfastes, dont le pouvoir semble finalement avoir tiré les leçons. Combinée à l'effet désastreux de l'épidémie d'Ebola sur le tourisme, qui s'est révélé en 2014, elle aboutissait à faire du Sénégal une destination onéreuse – pour une famille de deux adultes et deux enfants, le budget visa est actuellement de 208 euros.
Du côté du tourisme d'affaires, là aussi, la mesure a entraîné des complications bureaucratiques qui rendaient les formalités de passage à la police de l'air et des frontières encore plus laborieuses qu'auparavant. Sur l'insistance des syndicats hôteliers, une exonération d'un an pour les tour-opérateurs avait été adoptée in extremis, avant d'être reconduite.
"Vues les contraintes posées par cette mesure et la mauvaise perception qu'elle a reçue, une évaluation très ferme est en cours", a indiqué Macky Sall ce matin. Si ses conclusions ne sont pas encore connues, le chef de l'État, qui avait déjà annoncé lors de sa tournée récente en Casamance la suppression d'une partie des taxes aéroportuaires, n'a pas fait mystère de son sentiment personnel. "Il ne faudrait pas que la destination Sénégal se retrouve handicapée par des contraintes bureaucratiques."
17/03/2015, Mehdi Ba
Source : Jeuneafrique.com