dimanche 24 novembre 2024 05:01

La contestation s’organise contre une loi sur la neutralité dans les crèches

La commission nationale consultative des droits de l’homme réclame le retrait de la proposition de loi sur l’interdiction du voile dans les crèches privées et toutes les structures éducatives qui accueillent des mineurs.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme exprime « ses vives préoccupations » au sujet de la proposition de loi (PPL) visant à étendre le principe les devoirs neutralité religieuse des fonctionnaires aux éducateurs des structures privées de la petite enfance et à toutes celles qui accueillent des mineurs.

La commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté le jeudi 5 mars ce texte qui avait déjà été voté en première lecture au Sénat en 2012. L’examen de cette PPL visant « à étendre l’obligation de neutralité à certaines personnes ou structures privées accueillant des mineurs et à assurer le respect du principe de laïcité » doit désormais être débattu en séance le 11 mai prochain.

LA FRAGILITÉ JURIDIQUE DU TEXTE

Regrettant que ce texte soit arrivé dans le calendrier parlementaire sans« débat public préalable », la CNCDH « recommande » ainsi son « retrait pur et simple ». Cette déclaration, adoptée le 19 mars, renvoie à un avis déjà voté à une très large majorité en septembre 2013 par cette instance consultative. Elle mettait alors en garde contre la fragilité juridique d’une telle extension du principe de neutralité au secteur privé, qui serait contraire à la Constitution et à la Convention européenne des droits de l’homme.

La PPL Alain Tourret, du nom du rapporteur (PRG) du texte vise à interdire le port de tout signe d’appartenance religieuse dans les établissements privés qui accueillent des enfants de moins de six ans mais qui reçoivent« des financements publics ». La CNCDH souligne dans sa déclaration« une formule extrêmement vague » qui ne précise ni « la nature » ni « le quantum » de tels financements.

LE RISQUE D’UNE NOUVELLE « GUERRE » SUR LA LAÏCITÉ

Le texte vise aussi toutes les structures éducatives, comme les centres de vacances ou les centres de loisirs qui accueillent des mineurs. Cette extension du principe de neutralité avait provoqué l’émoi dans le monde associatif, notamment au sein du mouvement scout qui a vigoureusement dénoncé une telle dérive.

 « Ce texte est contraire au principe de laïcité au sens de la loi de 1905 en refusant des subventions à des activités autres que cultuelles, souligne la déclaration de la CNCDH. L’adoption de cette proposition risque de voir resurgir une guerre sur le sens à donner au principe de laïcité par une proposition de loi d’une part, discriminatoire et d’autre part, inutile. »

UN PASSAGE EN FORCE

Comme cette commission, d’autres instances se sont élevées contre la proposition de loi. L’Observatoire de la laïcité, en octobre 2013, puis le Conseil économique social et environnemental (Cese) en novembre 2013 s’étaient aussi prononcé à une très forte majorité contre une telle perspective.

Au-delà de l’argumentation de fond, la CNCDH regrette un passage en force de certains élus. La commission des lois a en effet jugé« nécessaire » l’intervention du législateur. « C’est faire bien peu de cas du travail de fond d’institutions dont c’est la mission de veiller à la garantie des libertés et droits fondamentaux et d’alimenter précisément la réflexion du parlement » critique la commission.

La CNCDH annonce qu’elle organisera « à l’approche de l’examen du texte » une conférence de presse.

24/3/15, BERNARD GORCE

Source : la-croix.com

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