Des employées sans papiers d'un salon de coiffure africain de Paris, qui occupaient leur lieu de travail depuis l'été dernier pour dénoncer l'exploitation dont elles s'estiment victimes, vont recevoir des autorisations provisoires de travail, a-t-on appris mardi de sources concordantes.
"Après dix mois de lutte, je n'y croyais plus", se réjouit Aïcha. Entre les fauteuils défoncés de leur ancien salon, les coiffeuses sans-papiers du quartier de Château d'Eau à Paris savourent comme une victoire l'annonce de leurs prochains titres temporaires de séjour.
"Il a été décidé par le Préfet de police de leur remettre une autorisation provisoire de séjour les autorisant pendant trois mois à chercher un emploi légal", a-t-on indiqué au ministère de l'Intérieur.
Il ne s'agit pas d'une régularisation, a-t-on précisé de même source, car les neuf personnes concernées devront ensuite trouver un emploi déclaré pour poursuivre la procédure.
Mais "c'est une grande victoire" pour les salariés, qui occupaient leur ancien lieu de travail, au 57 boulevard de Strasbourg, pour dénoncer l'exploitation des clandestins dans les salons afros du quartier et demander des titres de séjour, a indiqué mardi Maryline Poulain, chargée de l'immigration à l'antenne parisienne du syndicat CGT.
Cinq autres employés sans papiers avaient déjà reçu des documents similaires il y a un mois.
"C'est un signal très positif pour les autres salariés de Château d'Eau", s'est félicitée Mme Poulain, qui a accompagné les grévistes du "57" dans leur combat contre un système relevant selon elle de la "mafia".
Les employés du salon, non déclarés, étaient payés "à la tâche" (ce qui est illégal) environ 400 euros par mois en travaillant 7 jours sur 7, de 09H00 à 23H00.
"Il faut à présent engager un travail de fond, conjointement avec la ville de Paris et la mairie du 10e arrondissement, pour sortir du système d'exploitation", a ajouté la syndicaliste.
En mai 2014, les 18 salariés, dont 14 sans-papiers, s'étaient mis en grève pour obtenir la régularisation de leur situation. Ils avaient obtenu de leur employeur la reconnaissance de leur statut de salariés mais, fin juillet, le gérant leur signifiait que le salon avait été mis en liquidation.
L'affaire, très médiatisée, a aussi connu des développements judiciaires. Une procédure est en cours, après le dépôt d'une plainte par les salariés et la CGT notamment pour "traite d'êtres humains", "escroquerie" et "conditions de travail indignes".
L'une des coiffeuses, Aïcha, en est sûre: les gérants "ont compris la leçon". Elle en veut pour preuve cette annonce qu'elle a repérée dans un salon voisin, cherchant un coiffeur en CDI. "Ça ne se voyait jamais, avant".
07 avr. 2015
Source : AFP